Développement agricole en Guadeloupe et opportunités politiques, soyons vigilants !

L"agriculture guadeloupéenne constitue pour longtemps encore certainement, un pan essentiel de notre économie. Au moment où l"on parle de plus en plus d"autonomie alimentaire, la position du président de l"insti- tution en charge du développe- ment agricole qui est également président de l"établissement public foncier depuis son élec- tion comme conseiller régional de la Guadeloupe, nous inté- resse. Nous avons posé quelques questions à Patrick Sellin…

En plus d"être président de la Chambre d"agriculture, vous êtes aujourd"hui, conseiller régional et depuis lundi, président de l"EPF. Serez-vous en mesure d"apporter des réponses plus concrètes pour un meilleur développement de notre agriculture, à un moment où l"on parle de plus en plus d"autonomie alimentaire ?Patrick Sellin :Je pense que quand un ouvrier a des outils perforants et divers, il est plus à même de produire un travail plus élaboré. C’est exactement dans ce

cas de figure que je me trouve. La compatibilité de tous ces outils devrait normalement me permettre d’avoir une lecture plus fine de la situation et me permettre ainsi d’élaborer d’une manière plus per- fectible une vision homogène du territoire guadeloupéen, en pré- servant au maximum les espaces à forte valeur agronomique, et tendre ainsi, vers un véritable équilibre du territoire. Car, nous avons besoin de retrouver une ali- mentation saine, avec moins d ’utilisation de produits phyto- pharmaceutiques (herbicides)

. Mais en même temps, il faut pou- v oir loger les gens dans un cadre de vie apaisant, avec les infra- structures nécessaires à l’épa- nouissement de ses concitoyens et du pays.

Quelles réponses envisagez-vousd"apporter à ceux qui subissent la sécheresse, la crise sanitaire et les retards dans le versement de l"aide à la replantation ?

A la Chambre d’agriculture, notre mission est d’encadrer et d’animer les CUMA, ainsi, au cours de ces dernières années, 80% des CUMA sont tombés en désuétude et les ETA ont pris le relais. Nous avons eu un problème de gestion de ces outils, oh combien nécessaires à l’agriculture guadeloupéenne. La taille de nos exploitations permet la mutualisation et des économies d’échelle qui débouchent sur un moindre coût pour chaque adhé- rent. Dans le cadre de la structura- tion et avec les fonds d’aides, la Chambre sera aux côtés des agri- culteurs comme d’habitude afin de leur permettre de mobiliser ces fonds avec l’appui de nos agents et cadres de la Chambre consulaire.

La disparition des CUMA demeureun frein au développement de l"agriculture, notamment au Nord Grande-Terre, quelle initiative que votre Chambre consulaire préco- nise face à cette situation ?

Si nous pouvons toujours faire des propositions pour se prépa- rer à la sécheresse, nous avons des solutions pour les aides de l’Etat. La Chambre et d’autres organismes instruisent des dos- siers, mais ce sont les services de l’Etat qui paient.

Le conseiller régional que je suis, a toujours la possibilité de sensibili- ser la Commission agricole sur cette problématique pour que la Région vienne en aide rapide- ment sur nos estimations aux agriculteurs.

D’ailleurs, la Région procède, dès que la situation se présente, à l’at- tribution d’aides de première urgence (aliments et bons d’ali- ments pour le bétail, bacs à eau, etc.). Il faut entretenir les marres et les cours d’eau, maîtriser nos systèmes d’irrigation avec les techniciens de la Chambre, pré- parer aussi du stock de fourrage (production, producteurs de fourrage, etc.).

Pour ne plus souffrir de l’arrivée tar- dive des aides qui restent néces- saires pour l’ensemble de nos filières, nous devons devenir auto- nomes à ce niveau-là, pour rester compétitifs, vu le coût de la produc- tion par rapport au coût de la métropole et aux voisins de la Caraïbe. La crise sanitaire nous a fait du mal, particulièrement les filières de diversification qui souffrent. Très peu de nos mandants ont perçu les aides covid, compte tenu de leurs difficultés à être à jour fiscalement, socialement et comptablement.

Nous pensons que nous ne sommes pas au bout de nos surprises avec cette pandémie. L’agriculteur gua- deloupéen doit se réinventer, déve- lopper les circuites courts encore plus, tout en respectant la traçabilité avec un produit de qualité signalé par le logo «Produit pays», par exemple (travail en cours).

Bientôt deux unités de transforma- tion de produits agricoles vont voir le jour, une aux Abymes et une autre à Anse-Bertrand, comment la Chambre se positionne-t-elle face à ces deux projets ?

Cependant des opportunités ver- ront le jour dans les années à venir. Je parle de l’usine centrale et du Parc agro des Abymes.

Nous pensons que l’agriculteur gua- deloupéen ne doit pas rater ces deux grands rendez-vous. La Chambre d’agriculture donc, fera son travail d’accompagnement et d’encadrement nécessaire, vu la taille de nos exploitations avec un accent certain sur la structuration. Car, nous pensons que c’est une opportunité pour la relance de développent agricole et la création de richesses, donc, des emplois.

Comment allez-vous conciliervotre mission de président nouvel- lement élu au niveau de l"EPF et votre casquette de président de de la Chambre d"agriculture, face aux pressions de toutes sortes pour préserver la sole cannière et en même assurer un aménagement de notre territoire ?

Ces deux missions me paraissent complémentaires car aujourd’hui, la Chambre d’agriculture protège cet outil indispensable qu’est le foncier. L’EPF, devient un outil à propos, car étant particulièrement au service des communes et des EPCI dans leurs recherches de stratégie fon- cière. J’aurai une meilleure vision du développement du territoire à l’in- térieur de la ville en permettant aux villes de régler le problème des dents creuses et par là même les indivisions. Permettre la mise en place de logements plus adaptés aux séniors, car nous avons une population vieillissante ; Permettre de mettre en place des jardins par- tagés, créant ainsi des poches d’oxygène dans le cadre de ville écologique ; Redynamiser et recréer la ville sur la ville, ce qui per- mettra de préserver dans la zone rurale, les espaces à forte valeur agronomique, donc, je ferai une complémentarité de ces deux cas- quettes, au service d’un développe- ment harmonieux de nos terri- toires, et, ainsi, m’inscrire véritable- ment dans le pari de l’intelligence.