Le droit à réparations

Contrairement à la démarche engagée par le Président de la République Emmanuel Macron qui a demandé pardon publiquement aux Harkis à quelques semaines des futures élections présidentielles de 2022, la demande des descendants des AFRès (Africains Réduits en Esclavage) est restée let- tre morte. Serait-ce parce que ce sont des Noirs ?

R egarder le monde tel qu’il est aujourd’hui, nécessite de se pencher sur un dou- ble processus, d’une part, la traite négrière, et d’autre part, l’esclavagisme qui ont laissé des séquelles sur plusieurs conti- nents, notamment l’Afrique et l’Amérique.

De fait, ce passé n’est pas si loin- tain, si l’on ajoute aux quatre siè- cles d’esclavage, un siècle de tra- vail forcé, donc sans consente- ment et sans rémunération, qui n’a été aboli qu’à la fin de la seconde guerre mondiale.

Revendiquer les réparations, morales, politiques, matérielles et financières, c’est donc analy- ser les conséquences du passé sur le présent pour construire un avenir meilleur.

En 2014, à la médiathèque de Lamentin en Guadeloupe s’est tenue une rencontre caribéenne qui avait comme objectif de faire triompher la vérité et la justice sur les conséquences de l’escla- vage des Africains libres réduits en esclavage et la traite négrière transatlantique menée par les pays occidentaux.

A ce «symposium», les partici- pants avaient dans une motion, exigée des excuses officielles de la France par François Hollande, Président en exercice. Cette demande a été formulée au titre des souffrances insondables, de la déshumanisation et des humi- liations imposées des siècles durant aux Africains réduits à la condition d’esclaves et de biens meubles par le Code noir. En plein 21 ème siècle, aucun Président français n’a pris l’initia- tive, dans une démarche de réparation, d’abroger le Code noir, alors que certains s’enor- gueillissent du fait que seule la France ait déjà reconnu l’escla-vage comme crime contre l’hu- manité. Jusqu’à ce jour, après des années de formatage de la société française sur la notion de supériorité ou d’infériorité des races, les descendants des Africains réduits en esclavage subissent encore et toujours les affres de cette période sangui- naire, historique.

Contrairement à la démarche engagée par le Président de la République Emmanuel Macron qui a demandé pardon publi- quement aux Harkis à quel- ques semaines des futures élec- tions présidentielles de 2022, la demande des descendants des AFRès (Africains Réduits en Esclavage) est restée lettre morte. Serait-ce parce que ce sont des Noirs ?

La question des réparations apparaît encore incongrue en France alors qu’elle fait l’objet de débats publics et de mesures concrètes dans de nombreux pays. D’ailleurs, la loi Taubira de 2001, prévoyait explicitement de «déterminer le préjudice subi et d’examiner les conditions de réparation due au titre de ce crime», avant que ce passage de la loi ne soit retiré au dernier moment.

Rien ne peut justifier l’abandon de ce combat qui est juste et légi- time. L’esclavage a été un vérita- ble processus «industriel», inter- continental et d’une durée jamais vue à l’échelle de l’huma- nité. De plus, les traces écono- miques, sociales, culturelles de ces crimes contre l’humanité sont connues et encore très vivaces dans les pays colonisés.

Le Mouvement International pour les Réparations (MIR) doit s’étoffer de tous les Etats coloni- sés du continent africain pour gagner le droit à réparations.