Investir le débat parlementaire pour obtenir l’adaptation de la loi sur l’obligation vaccinale et l’ouverture des négociations

Les élus, à l’occasion des voeux du nouvel an, ont tous proclamé leur volonté de servir le pays et de garantir les meilleures conditions de vie à la population. Mais leur amnésie sur l’existence et le caractère de la crise majeure qui menace gravement les équilibres dans notre société est le s igne palpable du décalage entre les «voeux politiciens» et le réel guadeloupéen.

Le débat imposé par le gouvernement Castex sur le pass vaccinal, en réa- lité sur l’obligation vaccinale générale, dixit le ministre Véran, donne l’op- portunité aux élus et au Collectif des organisations en lutte d’ouvrir une brèche dans la politique liberticide et anti-peuple du pouvoir français.

L es élus, s’ils veulent retrouver le peuple guadeloupéen se doivent, en lien avec le puissant mouvement social en action dans le pays, de mobiliser toutes les ressources législatives, réglementaires, juridiques de la Constitution fran- çaise pour proposer au gouvernement français une application adaptée de la loi sur l’obligation vaccinale en Guadeloupe et le retrait de toutes les mesures discriminatoires et répressives contre le personnel de santé et les pompiers.

C’est la seule réponse juste pour obtenir l’apaisement du mouvement social et permettre l’ouverture des négociations sur les autres revendica- tions entre la représentation élue de la Guadeloupe et le Collectif des organisations et les associations.

L’amendement de la députée Justine Benin est dans la même veine que sa proposition de loi sur l’eau. Le gouvernement y adhère parce que cet amendement ne s’attaque pas au problème de fond, pire il ouvre une nouvelle discrimination tout en scellant le sort des personnels non vacci- nés qui seront radiés des cadres au 31 décembre 2021.

C’est une manoeuvre déloyale et inacceptable. Si les élus de la Guadeloupe acceptent, dans les conditions actuelles de la pandémie, ce deal avec le pou- voir, ils vont se parjurer définitivement. L’enjeu majeur de santé aujourd’hui, ce n’est pas l’acharnement insensé du gouvernement qui court après une immunité vaccinale impossible en Guadeloupe, mais la capacité de prendre en charge les malades, la continuité des soins, l’exigence de sauver les vies.

La directrice de l’ARS qui est sortie des bois, nous dit que le service hospitalier n’aura pas le personnel suffisant pour faire face à une éventuelle 5ème vague et compte-tenu de la situation en France qui glisse vers une catastrophe sani- taire avec près de 80% de vaccinés (2ème dose), elle ne pourra pas mobiliser la réserve sanitaire.

Pour éviter à la Guadeloupe une nouvelle épreuve, comme celle que nous avons connu au mois d’août dernier, la solution responsable et humanitaire c’est le retour de tous les personnels suspendus ou menacés de l’être : agents hospitaliers, infirmiers libéraux, médecins, pompiers, ambulanciers et autres, à leur poste de travail avec bien sûr des protocoles adaptés. On sait maintenant, et la directrice de l’ARS le docteur Valérie Denux l’a confirmé, qu’il existe des traitements que l’on peut administrer à l’hôpital dans les premiers jours de la contamination au covid- 19. C’est bien cette voie raisonnable qu’il faut emprunter en Guadeloupe.

Les élus guadeloupéens et le Collectif des organisations et associations vont-ils se hisser à la hauteur de leurs responsabilités et faire le choix du peuple guadelou- péen sans quémander la reconnaissance du gouvernement. S’ils ont un doute sur leur capacité à affronter et à gagner cette bataille, nous les invitons à s’inspirer des précédents historiques qui ont conduit les pouvoirs à renoncer à des politiques anti sociales et anti-peuple : Le 31 mars 2006, le Président de la République Jacques Chirac promulgue la loi De Villepin sur le CPE (Contrat de première embauche) adoptée après trois mois de mobilisation générale de la jeunesse et des syndicats. Devant la montée en puissance de l’opposition à cette loi, il suspend son application pour l’abandonner définitivement le 10 avril.

En 1987, les députés communistes réunionnais Paul Vergès et Hélie Hoareau s’opposent au Parlement à la loi sur la parité sociale au motif qu’elle priverait les Réunionnais de leur droit à l’égalité sociale. Les deux députés annoncent que si la loi est votée, ils démissionneront de leur mandat. Cette loi est votée le 14 octobre 1987. Les communistes démissionnent et rentrent à La Réunion poursuivre leur combat. L’égalité sociale est appliquée en 1996, Elie Hoareau est réélu député en 1988, Paul Vergès en 1993.

En politique, seuls le courage et la fidélité à ses engagements permettent de chan- ger l’ordre des choses établies. Nous encourageons vivement les élus guadelou- péens à rompre avec l’esprit «godillots» et le Collectif des organisations et asso- ciations à maintenir avec fermeté la ligne de dialogue pour placer l’avenir de la Guadeloupe au centre de leurs actions.

Nous demandons solennellement aux élus guadeloupéens et au Collectif de renouer le dialogue, pour éviter le piège tendu à la Guadeloupe par le Gouvernement français et porter une réponse guadeloupéenne, à la crise struc- turelle qui défigure notre pays. Pointe-à-Pitre, le 30 décembre 2021