Éradiquer la pauvreté dans le monde : mythe ou réalité ?

En ce début de la troisième décennie de ce XXI ème siècle, plus de 700 millions de personnes vivent encore dans l’extrême pauvreté et peinent à satisfaire leurs besoins les plus élémentaires, tels que la santé, l’éducation et l’accès à l’eau et à l’assainissement. C’est énorme ! Même dans notre pays, la situation est explosive car près d"un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté ! Alors, on aurait le droit de se poser la question à savoir si l’objectif de l’Organisation des Nations unies (ONU) de vouloir mettre fin à la pauvreté d’ici 2030 est vraiment atteignable ?

MAIS, QUE SIGNIFIE «ÊTREPAUVRE» AU XXIÈME SIÈCLE ?

Il est indéniable que la notion de pauvreté n’est pas la même dans tous les pays. Alors, comment mesu- rer la qualité de vie d’un pays à l’autre ? Si l’on s’ar- rête sur les difficultés à vivre, à joindre les deux bouts, les causes répertoriées seront multiples : le manque d’argent, l’insuffisance de ressource maté- rielle telle que l’eau, la nourriture, le logement, les vêtements. C’est aussi l’inaccessibilité à l’accès à des droits élémentaires tels que se soigner, aller à l’école.

Pour d’autres, notamment dans les pays riches, cela se résume par des inégalités très fortes, des inégalités s ociales à travers la différence de richesses dans un même pays. Ces inégalités font qu’une partie de c ette population ne puissent pas vivre correctement comme les autres notamment au niveau de la c onsommation, des loisirs, etc.

En clair, la pauvreté c’est l’état d’une personne qui est privée des res- sources nécessaires pour vivre décemment dans son environne- ment. Pour la mesurer, l’ONU dis- pose d’un indicateur de développe- ment humain qui prend en compte le revenu par habitant, l’espérance de vie, le niveau d’éducation (taux d’analphabétisme, taux de scolari- sation). Par conséquent, il est facile de conclure que face à la pauvreté, le monde est INÉGAL !

De fait, ces inégalités empêchent toute amélioration du niveau de vie de ces populations ou encore pire elles participent à la dégradation de l’environnement (déforestation, surexploitation des sols) et à diffi- culté de se protéger des catas- trophes naturelles ou encore sani- taires ! Mais voilà, même dans les pays riches, 30 millions d’enfants grandissent dans la pauvreté !

Et dans notre pays, la Guadeloupe qu’en est-il ? Le portrait type de la personne pauvre dans notre pays serait a priori une femme, jeune, seule, non diplômée et sans emploi dont les revenus seraient essentielle- ment constitués par des prestations sociales. Si l’on part du niveau de vie médian (soit près de 1300 € par mois), les très pauvres seraient celles qui vivraient avec mois de 790 € par mois, les pauvres entre 790 € et 1300 €. Cependant une grande majorité qui se trouverait en-des- sous de ce seuil de 1300 € serait mal- gré tout qualifiée de «non pauvre».

PEUT-ON CROIRE RAISONNA- BLEMENT QUE LA SITUATION POURRAIT S’INVERSER ?

Tout d’abord, il faut savoir que l’ob- jectif 1 de l’ONU est d’éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde pour la décennie 2020-2030. Cet objectif se déclinait en sous-objectifs dont voici les grandes lignes :Réduire de moitié au moins la pro- portion d’hommes, de femmes et d’enfants de tous âges souffrant d’une forme ou l’autre de pauvreté.Mettre en place des systèmes et mesures de protection sociale pour tous. Faire en sorte que tous les hommes et les femmes, en particu- lier les pauvres et les personnes vul- nérables, aient les mêmes droits aux ressources économiques. renforcer la résilience des pauvres et des personnes en situation vulné- rable et réduire leur exposition aux phénomènes climatiques extrêmes et à d’autres chocs et catastrophes d’ordre économique, social ou envi- ronnemental.

Mais avec l’étalement de cette crise sanitaire dans la durée et ses consé- quences sur l’économie, même avec les plans de relance des pouvoirs publics ne devrait-on pas s’attendre avec une aggravation de la situation des pauvres et voire l’augmentation du nombre de personnes basculant dans une situation de pauvreté ? Car même avec un emploi, la garantie d’une vie décente n’est pas assurée. En effet, l’ONU prévoit que près de 8% de la population mondiale risque de tomber dans la pauvreté ! Si ces prévisions s’avèrent justes, les espoirs d’éradiquer la pauvreté pour 2030 s’évaporeraient.

Tabler uniquement sur la croissance économique comme moyen pour réduire la pauvreté, a été un leurre pour tous ces gouvernements.

Baisser aussi bas le seuil du niveau de pauvreté pour faire croire que les politiques gouvernementales ont des résultats significatifs.

Toutes ces mesures qui ont mis de côté la dégradation environnemen- tale qui accompagne la croissance économique, les impacts du chan- gement climatique sur la pauvreté elle-même et l’absence de politique de redistribution de la richesse n’ont fait que se conforter dans l’illusion.

Pour vraiment éradiquer la pau- vreté, il faut changer de système ou tout au moins construire une société dans laquelle chaque indi- vidu a une place dans cette société avec des droits et la possi- bilité d’utiliser ses droits. En effet, la pauvreté n’est pas seulement une question de revenus trop fai- bles. Elle est aussi question d’ex- clusion du pouvoir, de maltrai- tance institutionnelle et sociale, de discrimination.

Selon Olivier de Schutter, le rappor- teur spécial de l’ONU, «La pauvreté est le prix que nous payons pour des sociétés qui excluent des personnes dont les contributions ne sont pas reconnues. Dans ces conditions, éradiquer la pauvreté, c’est construire des sociétés inclusives qui passent d’une approche carita- tive à une approche d’autonomisa- tion basée sur les droits».

Même en France, selon «Alter- natives économiques», l’occasion manquée du quinquennat d’Em- manuel Macron est la lutte contre la pauvreté ! «Il s’était fixé des objec- tifs ambitieux en matière de lutte contre la pauvreté, mais sa politique n"a donné lieu qu"à quelques coups de pouce ponctuels, sans réforme structurelle. Insuffisant pour com- penser les effets de la crise sanitaire et d"une politique fiscale favorisant les plus riches».

De plus, une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP) contredit le gouvernement. Elle conclut que le niveau de vie des 5% les plus pau- vres a régressé depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron. A contrario, les grands gagnants sont les plus riches Français (1%). Leur niveau de vie a progressé de 2,8% car ils ont profité massive- ment de la réforme de l’impôt sur le revenu mais surtout de la suppres- sion de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) transformé en impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Q uant à notre pays, que dire de la solution du pouvoir politique en annonçant le financement de 1000 emplois aidés pour les jeunes avec un taux d’environ 35% de la p opulation qui vit en-dessous du seuil de pauvreté national et avec un taux de chômage chez les j eunes d’environ 40%, et de plus de 25% de bénéficiaires de Rsa (Revenu de solidarité active) ? F ace à une telle situation d’échec des politiques publiques, face à un système qui engendre de l’injus- tice, des inégalités, de la pau- vreté, il est primordial et urgent q ue les peuples se réveillent, soient présents ou soient repré- sentés dans les lieux de décision, s ’unissent et manifestent leurs désaccords avec les choix des politiques gouvernementales. D ans notre pays, l’occasion nous est offerte en ces temps de crise sanitaire et de mesures de casse sociale, des lois réduisant comme peau de chagrin les libertés de n otre peuple, pour s’unir et mani- fester notre choix d’une autre société plus humaine, plus juste, p lus solidaire afin que l’éradication de la pauvreté ait des chances de devenir réalité chez nous !