Premier bilan du carnaval 2022

Dans un contexte sanitaire très surveillé s’est déroulé le carnaval 2022 qui a connu un franc suc- cès avec la participation du public et des différents groupes. Un premier bilan a été tiré par M. Willy Abare, président de l’Office du carnaval de Guadeloupe.

Quel bilan faites-vous de ce carna- val 2022 ?

Willy Abare :Vu le laps de temps qui nous était imparti pour l’organi- sation, je trouve qu’on a bien tra- vaillé. Les carnavaliers étaient tous contents, le public qui attendait cela de longue date l’était également. Je ne peux que féliciter le Groupe- ment de Pointe-à-Pitre présidé par Joël Jacota et la Fédération de Basse- Terre (la Fédé), présidé par Fer- nand Sonor, d’avoir pu en très peu de temps organisé une manifesta- tion d’une telle envergure, bien que restreinte et qui a tenu toutes ses promesses. Malgré le carac- tère particulier de ce carnaval, le public était bien au rendez-vous et n’a pas hésité à manifester toute sa joie après cette longue période de confinement.

Il y a un fait qui a retenu l’atten- tion de tout le monde, c’est le lyan- naj entre deux groupes carnava- lesques Kontak et Toumblak !

Cela c‘est déjà produit, avec Double face. Cette année, c’était beaucoup plus visible à cause de la conjonc- t ure

. Il faut reconnaître que cette situation sanitaire, nous a permis de revenir à la notion de solidarité et de l’entre-aide. Il y avait bien sûr des réticences pour ceux qui voulaient f aire un carnaval comme en 2020 mais ce n’était pas possible. Donc, ils se sont finalement ralliés à d’au- t res groupes pour montrer que la solidarité existe entre les groupes carnavalesques. L’autre fait mar- quant, s’est déroulé le Mardi-Gras, à l’issue du défilé en pyjama. Le groupe Double-Face a été reçu par le groupe carnavalesque Akyo en son local. C’est bien pour montrer qu’il n’y a pas de problème entre les groupes à peau et les groupes à caisses claires.

Les gens ont une autre vision du carnaval, mais cela n’empêche pas que les femmes et les hommes qui font le carnaval échangent entre eux, même s’ils n’ont pas la même conception carnavalesque.

Ne pensez-vous pas que le carnaval2022 portait plus sur le défoule- ment que le côté satirique et la dénonciation ?

C’est juste, c’était du défoulement, les gens avaient marre d’être confi- nés, ils étaient compressés. Que ce soit, carnavaliers ou public, tous avaient besoin d’oublier ces moments de privation.

Dans de telles conditions, on nepeut parler de carnaval d’un point de vue commercial ?

Qui oserait demander de l’argent à une entreprise dans cette période de crise sanitaire et sociale ? Je confirme que ce n’est pas un carna- val d’un point de vue commercial. Heureusement, car on aurait reçu plein de critiques compte tenu que nous traversons une crise écono- mique sans précédent. Le public a eu en prime le «MasEspo Val» durant quatre jours au Pavillon de Pointe-à-Pitre. C’est une première ?

Oui et non, car le KMK (Komité Mas Kiltirèl) avait fait auparavant à peu près pareil au Centre Culturel Rémy Nainsouta. Com- me je l’ai déjà rappelé, cette pan- démie nous a permis de revoir certaines choses. Le «Mas Espo Val» a été à l’initiative du GCCRP (Groupement pour la Culture et le Carnaval de la Région Poin- toise), je pense que pour l’année prochaine, il faudra le reconduire en mieux avec une meilleure communication.

Malgré le timing qui nous a été accordé pour l’organisation, on avait beaucoup de visiteurs, destouristes. En revanche, le reproche qu’on nous fait cons- t amment, c’est qu’en dépit du fait que nous ayons un beau carnaval, nous n’exploitons pas suffisam- m ent cet événement comme le font, les pays anglo-saxons qui font des expositions et organisent des soirées carnavalesques où tout le monde peut participer.Avez-vous déjà pensé à la créationd’un musée dédié au carnaval ?

C’est une question qui revient sou- vent. C’est aussi le souhait des car- navaliers. Je pense qu’un jour ce sou- hait se réalisera comme ce fut le cas pour le vélodrome.Quel message laissez-vous à lapopulation et aux autorités de ce pays ?

Je m’adresserai tout d’abord à la population : je recommande à tous ceux qui ne sont pas intéressés par le carnaval de ne pas venir sur le cir- cuit, perturber la manifestation, notamment, ceux qui viennent avec leur véhicule et qui mettent la musique à fond la caisse. Il y a d’au- tres lieux pour cela.

Il est regrettant que nous soyons entrés dans un phénomène de carnaval de la peur, où on ne se sent plus en sécurité comme au carnaval du Brésil. Des coups de feu sont tirés à balles réelles sur les policiers, on pique et on tue des gens. Non, il ne faudrait pas que notre carnaval dérape ainsi. Notre carnaval doit garder «un visage propre», c’est le défi que nous allons relever en 2023.