Se rappeler et saluer notre passé

Lundi 23 mai a eu lieu la journée nationale en hommage aux vic- times de l’esclavage. Comme chaque année à la même date, l’association du Comité Marche du 23 mai 1998 a organisé un grand rassemblement à Saint- Denis en banlieue parisienne. Plus de 4000 personnes se sont jointes à cet événement et ont pu assister à un concert offert par des artistes antillais.

Les émotions sont tou- jours très vives à cette date. Chaque année, depuis 24 ans, l’association du Comité Marche du 23 mai 1998honore la mémoire des victimes de l’esclavage dans les colonies fran- çaises le 23 mai. Présidée par Emmanuel Gordien, elle a pour volonté de mobiliser les généra- tions autour de leurs aïeux et ancê- tres et, ainsi, de saluer leur histoire.

Au cours de cette journée Limyè Ba Yo, la ministre des Outre-Mer du nouveau gouvernement, Yaël Braun, a pu prononcer quelques mots, accompagnée sur scène de nombreuses personnalités antil- laises comme Jocelyne Beroard, Were Wana, Misié Sadik ou encore Les DéChenNé. De plus, un hom- mage a été rendu à Jacob Desvarieux, disparu l’an passé. «La France souhaite que l’on commé- more l’abolition de l’esclavage le 10 mai mais, nous, nous souhaitons aussi commémorer tous les esclaves lors de la journée du 23 mai. Ce sont deux dates différentes car ce sont nos parents et leur mémoire qu’il est important de réhabiliter».CONSOLIDER NOTRE MÉMOIRE COLLECTIVECe rassemblement répond à l’envie de l’association Comité Marche du 23 mai 1998de donner du sens à une histoire sinistrée et quelque peu éparpillée. «En 2000, nous réunis- sions plus de 40 000 personnes à Paris pour marcher et se rappeler des esclaves, devenus des citoyens. N’oublions pas que la culture créole s’est construite dans l’asservissement et la violence. La déportation massive des Africains vers les Caraïbes a fait naître une nouvelle culture, une cul- ture pleine de ressources (langue, musique, gastronomie) mais elle s’est aussi construite dans la douleur en proie à des troubles identitaires majeurs. Il est important de com- prendre les fondements de notre cul- ture créole et de cette société qui est née avec les victimes de l’esclavage»ajoute Emmanuel Gordien, «ces mêmes victimes font partie de la mémoire de tous les ultramarins et nous travaillons pour faire exister cette mémoire».CRÉER DES ARCHIVES ET DES GÉNÉALOGIESL’association Comité Marche du 23 mai 1998s’est donnée les moyens de créer une base de données com- plète qui recense tous les affranchis depuis 1848. «A l’époque, les esclaves n’avaient que des pré- noms. A leur libération, ils ont eu le droit de posséder un nom. Aujourd’hui, il est possible de remonter à nos ancêtres grâce à notre nom de famille».En effet, grâce au site anchoukaj.org, tous les Guadeloupéens et Martiniquais peuvent retrouver la trace de leurs ancêtres esclaves. «C’est le fruit de nombreuses années de travail et de récoltes d’informations. Nous colla- borons avec des historiens et des chercheurs de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et nous leur mettons à disposition nos archives pour mener à bien leurs recherches. Nous espérons que cela pourra nous permettre, sur le long terme, de construire la généalogie de tous les ultramarins y compris Guyane et La Réunion».www.cm98.fr