Le vote, droit ou devoir ? (2 è me partie et Fin)

LE VOTE, ACTE RATIONNEL OU DÉTERMINÉ PAR L’ORIGINE SOCIALE

Le milieu social d’où est issu l’indi- vidu peut influencer ses choix en matière de vote, la population se répartissant en groupes sociaux nés de la division sociale du travail, des inégalités de conditions d’existence et des relations de pouvoir. Ces groupements plus ou moins homo- gène sont caractérisés par une ten- dance à l’hérédité des positions : on parle de reproduction sociale. La théorie des classes l’une des oeu- vres majeurs de Karl Marx, poserait le principe selon lequel les antago- nismes de classes pousseraient à une lutte qui se mènerait sur le plan économique, social et politique.

Partant de cette analyse, l’apparte- nance à un groupe ou à une «classe» influencerait énormément le choix de vote du citoyen. Le rôle du milieu social est déterminant dans l’orientation du suffrage.

La famille demeurant le premier facteur de socialisation de l’individu, ce milieu exercerait une forte influence sur les orientations poli- tiques de l’électeur. En sociologie on parle de déterminisme social ou de pensée holistique. Selon cette approche, l’acte de vote serait la résultante du choix du «groupe» et non d’un choix purement rationnel.

Cependant, de nombreux résul- tats à des élections ont démontré que la seule appartenance à une classe n’a pas permis l’accession au pouvoir des Partis dits de masse. Le déterminisme social ne peut pas définir à lui seul le choix du vote d’un individu.

D’autant plus qu’on lui oppose l’in- dividualisme croissant qui poserait le principe selon lequel l’action serait centrée sur la rationalité et l’intentionnalité. Les agents cher- cheraient à optimiser leurs déci- sions dans un calcul rationnel afin de satisfaire leurs intérêts propres.

Dans cette approche, la conscience de classe ne s’appliquerait pas et seule la raison serait le facteur de choix. Dans le cas du vote, ce serait envers le candidat ou le parti poli- tique qui défendrait ses intérêts individuels et non celui du groupe que le choix de l’électeur se porte- rait. Mais même dans cette analyse, la notion de classe est présupposée car c’est bien parce que tel courant politique promettrait des actions dans des domaines précis que des voix seraient portées à son encon- tre. La formulation des program- mes politiques a pour vocation de s’adresser à une catégorie de per- sonnes, à une classe n’ayant pas for- cément conscience d’en être une.

Par ailleurs, l’information transmise par les médias est un outil de com- munication et de propagande d’im- portance qui a pour effet d’orienter l’opinion publique et donc le vote.

On sait que les individus ont inéga- lement accès à l’information que ce soit par les moyens de la collecter mais également de la traiter. Cette situation aura pour conséquence de créer un désintérêt et de soustraire la participation d’une classe d’indi- vidus à la gestion des politiques publiques. Les règles de fonction- nement des institutions pousse- raient les citoyens à déléguer leur «choix» de vote à des appareils politiques, par le biais d’une forme de contrat social moral (on parle d’adhésion) pour représenter et défendre leurs intérêts.

C’est aux «politiciens» une fois élu qui auront la charge d’être les porte- paroles de ses électeurs et de met- tre en oeuvre le programme pour lequel ils ont été élus. Or on peut assister à l’élection d’individus, «les élus», qui sont sensés porter des revendications, réaliser des actions au nom de leurs électeurs mais prennent des décisions contre les intérêts de ces derniers.

De plus, les détournements de fonds publics, les conflits d’intérêts et les scandales à répétition ont érodé la confiance de la population dans les politiques et son appareil. Par ailleurs, un point fondamental doit être soulevé, celui de la sous- représentation de certains groupes sociaux dans certaines instances, tel que l’hémicycle de l’Assemblée nationale. En France, en 2019, les ouvriers représentaient 5,3 millions de per- sonnes, soit 20% de l"emploi total. Quand on analyse, la composition de l’Assemblée notamment lors des élections législatives de 2017 la proportion d’ouvriers élus, était quasi-nulle. Est-ce que cela vou- drait-il dire que la classe ouvrière, à laquelle on peut ajouter les employés, les agriculteurs, les chô- meurs et les personnes en situation de précarités ne souhaitent pas être représentés et défendre leurs droits et leurs intérêts ? La réponse est bien évidemment Non !!! ANALYSE DU VOTE,ENTRE COMPRÉHENSION ET INCOMPRÉHENSION

Face à la déception des promesses électorales non tenues, notam- ment de la part des grands Partis, une part de la population préfère ne pas effectuer son devoir citoyen et s’abstient lors des grands rendez- v ous démocratiques. Cette abs- tention est un indicateur objectif d’un état donné d’une société : c elle d’une crise de confiance des citoyens envers les institutions et une défiance envers ses représen- t ants. L’ensemble de la classe poli- tique gagnerait à s’intéresser aux raisons pour lesquelles une part croissante et continue des citoyens s’abstiennent afin d’envi- sager un nouveau modèle de l’ex- pression démocratique plus en accord avec les aspirations du peu- ple dans le fonctionnement des institutions et sa gestion.

La représentativité des différentes classes sociale est inégale ce qui conduit une partie de la population, principalement celles issues des milieux populaires à se désintéres- ser de la vie publique. Il aura fallu attendre 2022 pour que la première fois dans l’histoire de la Ve République, une employée de m énage (Rachel Keke/ Etiquette Nupes) soit élue.

L e vote en tant que tel ne peut pas être théorisé comme une science exacte ou naturelle, les f acteurs de choix et de décisions de l’électeur dépendent d’un nombre incalculable de variables et de réflexions propres à l’indi- vidu reposant sur une analyse subjectif de sa propre situation et de sa perception de la société.

Tout comme le vote blanc, l’absten- tion se trouve être également une forme d’expression du vote citoyen. Mais il faut faire attention, en nuan- çant ces propos car les abstention- nistes ne constituent pas un bloc parlant d’une même voix, ni du point de vue sociologique ni du point de vue politique.

L"abstention peut être d’origines diverses soit dû à un manque d"in- tégration sociale donc de désinté- rêt de la chose publique, soit une instrumentalisation politique afin de favoriser ou défavoriser tel candidat propulsé par un Parti politique ou soit encore l"ex- p ression d"un comportement rationnel propre au contexte d"une élection donnée ou d’une s anction de la classe politique et de la technocratie.

L E VOTE UN DEVOIR DÉMOCRA- TIQUE QUI DOIT ÉVOLUER

Pour donner toute sa portée au vote dans le processus démocra- tique, la loi devrait envisager de lui attribuer un caractère «obliga- toire» en renforçant les modes de participation à la vie publique avec le référendum et de prendre en compte des formes d’expres- sions notamment la comptabilisa- tion du vote blanc, mais égale- ment en accroissant les pouvoirs des électeurs en leur donnant la possibilité de révoquer un élu en cas de faillite dans sa gestion et la non tenue des promesses électo- rales sous certaines conditions.