La sécurité routière en question

La sécurité routière, depuis des années déjà, fait l’objet de toutes les préoccupations des pouvoirs publics, particulièrement en Guadeloupe où le taux d’accidents est de loin le plus élevé, comparé aux départements de France.

Les colloques, les assemblées, les séminaires, les lois, les répressions, les radars et autres spots publicitaires pour sensibiliser l’usager à la bonne pratique de la conduite automobile n’y ont rien fait. La courbe liée aux hécatombes sur nos routes ne s’infléchit pas. Mais diable ! Où est la cause de tant de morts sur nos routes ?
Beaucoup d’éléments conjugués peuvent expliquer cette situation, qui cause énormément de détres-ses dans les familles par le nombre de décès, de blessés, de malades et d’handicapés à vie. Il y a un fait indéniable, le parc automobile de la Guadeloupe, depuis tantôt, a considérablement augmenté, donc proportionnellement le nombre d’accidents augmente.
DES LOBBYS TIRENT PROFITS DE CETTE SITUATION
Il y a plus de vingt ans déjà, le vote de la loi Sapin, par son application mécanique en Guadeloupe, a mis fin à l’organisation du transport de passagers en Guadeloupe, tel qu’il a existé depuis avant la guerre. Il était, par certains endroits, chaotiques, mais il assurait tant bien que mal la vie économique et sociale du pays et permettait surtout à certaines catégories d’employeurs et de petits patrons guadeloupéens de survivre. Par leur élimination, nos compatriotes entre espoirs et désillusions, ont opté pour avoir chacun son propre véhicule, au risque de participer chaque jour aux interminables embouteillages d’un point à un autre du territoire. Tout ceci, avec son corollaire de dépenses supplémentaires, de stress, de fatigue etc. Il y a certainement un puissant groupe financier et des lobbys qui tirent profits de cette situation.
Les campagnes publicitaires, les prospectus et autres gadgets avec la force du message subliminal distillé en permanence ici et là, modifient le rapport de l’homme guadeloupéen avec la voiture. Pour lui, avoir son véhicule contribue à son bien-être, à son confort, voire même, c’est s’adjoindre une nouvelle cellule, un autre organe à son propre corps physique et intime, qu’il ne peut aucunement partager avec d’autres. Par déduction, la route participe de ce même état d’esprit : le conducteur est dans son univers personnel, tel un robot.
Autrement dit, la conduite automobile est liée à un mode de vie qui est celui de notre société guadeloupéenne où : compétition, précipitation, individualisme, le chacun pour soi, sé lòt-la apa mwen, poté mannev, manfou-ay, sont souvent au rendez-vous. Après avoir agi sur tous les leviers existants, où respectivement les responsabilités sont partagées entre l’Etat, la Région, le Département et les communes, il y a encore de nombreux points avec un taux d’accidents important dû à la qualité des routes, aux marquages, à l’éclairage, à la signalétique… que l’alcool, la vitesse et la prise de stupéfiants ne peuvent à eux seuls expliquer.
ESPÉRER METTRE FIN À L’HÉCATOMBE SUR NOS ROUTES RELÈVE D’UNE VUE DE L’ESPRIT
Pour mémoire, depuis cette fameuse loi Sapin, en l’espace de moins d’un quart de siècle, l’Etat, pour mieux organiser le bordel, a toujours désigné sur un seul et même «petit» pays comme le nôtre, deux autorités organisatrices du transport de passagers. Une autorité en charge de tout ce qui est urbain et une autre pour tout ce qui est inter-urbain.de passagers. La responsabilité a été confiée simultanément au Conseil général de l’époque, aux Commu-nautés d’agglomération, pour enfin revenir à la Région. En l’état actuel des choses, notre constat est que ce phénomène qui gangrène notre pays et décime notre jeunesse, trouve sa source dans l’aspect sociétal et multidimensionnel de notre pays qui reste à explorer. Agir sur un pan de la société guadeloupéenne et espérer mettre fin à l’hécatombe sur nos routes relève d’une vue de l’esprit.