Combattre les violences conjugales, un défi de chaque jour

A l’occasion du 3e anniversaire du Grenelle des violences conjugales, organisé en 2019 à l’initiative du gouvernement français, la Direction territoriale de la police nationale (DTPN) a souhaité réunir les divers acteurs de Guadeloupe qui agissent quotidiennement dans la lutte contre un fléau qui touche toutes les strates de la société.

Début septembre, elles avaient toutes fait le déplacement. Commissaires de police, avocates, psychologues, représentantes d’associations d’aide aux victimes, pour échanger autour de leurs actions à la demande du ministère de l’Intérieur. Elles ont ainsi pu tirer le bilan de trois années de travail intense et mettre en lumière les projets en cours.
DES DISPOSITIFS DE PLUS
EN PLUS DISSUASIFS
Alors qu’il semble toujours peu aisé de chiffrer le nombre de victimes de violences conjugales en Guadelou-pe, des mesures concrètes ont été instaurées dans cette lutte. C’est ainsi que lorsqu’une personne dépose plainte pour ce type de comportement et que le Tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre estime que celle-ci est en danger immédiat, il peut délivrer un téléphone «Grave Danger». «Depuis 2022, le procureur de la République dispose de 30 téléphones qui sont remis après une évaluation de la dangerosité de l’auteur. Ce téléphone est remis par un juriste en présence de l’un des membres de notre association Guadav. Nous lui expliquons son fonctionnement et lui présentons les numéros à contacter en cas d’incident. C’est un outil indispensable dans l’accompagnement des victimes» explique Sandra François, directrice de Guadav, association d’aides aux victimes.
La victime est également transférée à une adresse inconnue de l’auteur et peut contacter l’association pour toute question ou crainte et/ou demander directement l''aide des forces de l''ordre. «Ce dispositif leur permet de se sentir davantage en sécurité. D’un simple appel, elle peut être rassurée et rapidement prise en charge».
Autre outil mis en place en juin 2021, le bracelet anti-rapprochement qui a pour but de surveiller les auteurs de violences conjugales et les empêcher de s''approcher de leurs victimes. Il permet de géolocaliser le conjoint violent et de déclencher un système d''alerte lorsqu''il s''approche de la personne protégée au-delà d''un périmètre défini par le juge. «C’est un dispositif encore plus restrictif car la police est alertée immédiatement et l’auteur est sanctionné d’office. Il en existe deux sur le territoire de la Guadeloupe et, couplé avec le téléphone «Grave Danger», nous avons l’ambition de faire diminuer les féminicides. C’est notre combat quotidien, tous acteurs confondus».
D’autres mesures de sensibilisation
L’association Guadav, agréée et conventionnée par le ministère de la Justice, s’attache à rester au plus près des victimes. «Nous sommes très sensibles à l’écoute de leurs besoins, qui est le coeur de notre action. Nous avons détaché une personne d’astreinte les soirs et week-ends pour répondre à l’appel du 17. A tout moment, elle pourra orienter la victime vers un hébergement d’urgence où elle se verra remettre un kit de vie avec des produits de premières nécessités. Nous nous devons d’être réactifs». De plus, des QR codes seront affichés dans divers lieux de santé. «Ceux-ci vont répertorier tous les numéros d’urgence, les adresses des associations, et nous rédigeons actuellement un guide informatif pour les victimes».
De plus, une large campagne de communication de panneaux sur les bus va être lancée en Guade-loupe prochainement. «Nous travaillons sur la sensibilisation des violences conjugales également à travers des expositions de photos chocs dans les centres commerciaux. Nous essayons, par tous les moyens, d’interpeller sur ce fléau qui est devenu une véritable priorité notamment depuis le premier confinement».
AGIR AU PLUS PRÈS
DES VICTIMES
L’an passé, Guadav a été sollicitée par 600 personnes. «Ce chiffre n’a guère de sens car il ne recense pas réellement toutes les personnes victimes de violences conjugales en Guadeloupe. Mais c’est tout de même un chiffre conséquent qui démontre que ce phénomène gangrène notre territoire».
L’association Guadav réalise un travail de fourmi depuis plus de dix ans. «Nous sommes sollicités par le tribunal pour recevoir toute victime et l’écouter autour de ses besoins et ses questionnements. Nous nous rendons, bien sûr, disponibles à toute demande spontanée». Elle dispose de permanences décentralisées sur tout le territoire Grande-Terre et Marie-Galante (l’association Initiati-ves France Victimes prendra le relai sur Basse-Terre) et d’une équipe pluridisciplinaire (assistante sociale, avocat, psychologue, policier) qualifiée. «Nous souhaitons proposer un accompagnement le plus complet possible. Nous savons à quel point il est compliqué de sortir du cycle de la violence. Il y a encore peu de personnes qui vont jusqu’au bout de ce processus. Beaucoup se stoppent en chemin et ne déposent pas de plainte par peur de représailles ou du fait d’attachements envers l’auteur... Il faut être fort, c’est un cheminement qui demande du temps et du courage et notre porte est ouverte à chaque étape. Nous avons l’espoir que la parole puisse tendre à se libérer».
Ainsi, Guadav organise des groupes de paroles et des ateliers pédagogiques autour de la confiance en soi, du self-défense et du coaching mental. «Les violences conjugales touchent tous les milieux, toutes les strates sociales et tous les profils. Nous devons créer des dispositifs toujours répressifs et nous devons y allouer des moyens financiers toujours plus suffisants. C’est un défi de chaque jour».
Pour les personnes victimes de violences, contactez ce numéro gratuit et anonyme :
Association GUADAV FRANCE VICTIMES 97 1
86-92 Centre Saint-John Perse, Quai Ferdinand de Lesseps - 97110 Pointe-à-Pitre
Tél. : 0590 84 22 86 - 0690 94 25 36