Les déterminismes de la révolution
Les manifestations qui se produisent actuellement en Iran, après la mort de Masha Amini décédée le 16 septembre après son arrestation par la police des moeurs à Téhéran, pour un port du voile jugé non conforme enflamme le pays.
Mercredi 27 octobre 2022 au quarantième jour du décès de la jeune fille s’est tenu à nouveau tenu des manifestations en Iran pour protester contre toutes les formes d’injustices commises envers les femmes et de manière élargie toutes les couches sociales opprimées. Par nature, la révolte fait face à la répression, et c’est environ 82 morts qui sont recensés depuis le début du conflit selon l’ONG Amnesty International.
Même s’il faut garder une certaine distance et une objectivité sur les faits relatés par les médias de occidentaux pour des faits se passant à l’étranger, il n''empêche que le vent de la révolution qui souffle actuellement en Iran a pris ses racines dans la colère et la frustration de la population. L’avenir nous dira si le peuple iranien réussira à faire changer les moeurs et les mentalités.
Cependant une réflexion, qui nous concerne aussi en Guadeloupe au vu du contexte social que nous connaissons peut être posée : Quels sont les facteurs déterminants pour mener à bien la révolution sur un territoire ?
La révolution que l’on peut définir comme un changement brusque et violent dans la structure politique et sociale d''un État, qui se produit quand un groupe se révolte contre les autorités en place et prend le pouvoir , succède généralement à une crise. Crise qui elle-même est la résultante de dysfonctionnements structurel et conjoncturel de la société.
Les avis divergent d’un point de vue économique et historiographique sur les origines d’une crise et de ses conséquences. Pour les libéraux, la crise serait naturel et cyclique. Elle permettrait l’amélioration du système de production pour faire progresser de manière innovante le système capitalise afin qu’il soit plus performant. La crise est donc à la fois inessentielle, totalement intégrable au fonctionnement ordinaire de l’ensemble et, à terme, bénéfique.
Dans une analyse plus approfondie à la suite des mouvements successifs de crises survenues en Europe au XIXe siècle, la notion de contradiction fait son apparition mettant à mal l’illusion d’une autonomie de l’économie de marché. La crise est en effet un moment dans la temporalité de la société qui prend racine dans le système établi avec son organisation économique et sociale. La réflexion menée entraîne petit à petit le refus de l’ordre établi par les gouvernants on parle alors de «Révolution».
Selon le courant idéologique libéral, les révoltes qui précèdent les révolutions ne serait menées que par une classe qui ne comprendrait pas suffisamment les mécanismes d’évolutions de la société et donc tomberait dans un cycle de violence sans but réel. La plupart des révolutions seraient la conséquence d’une revendication de type consommatrice et immédiate, plus vulgairement appelé la révolte du ventre. Or c’est bien à la suite de révoltes et de rapports de forces que certaines avancées sociales ont été obtenus pour les classes ouvrières qui avaient des conditions de travail difficiles.
Les révolutions découlent de réflexions menées par des groupes sociaux dans une société confrontées à des crises qui sont souvent économiques mais aussi politiques, sociales ou culturelles. Le système prédominant crée des contradictions en son sein poussant à l’émergence d’une conscience collective contestataire contre un fait établi par une minorité d’individus (les possédants, les gouvernants, etc…). La révolte face à l’injustice peut mener à la révolution.
Cependant quand la révolte n’est pas organisée et que la classe contestataire n’est pas uni, des soubresauts peuvent entacher le mouvement révolutionnaire. La classe dominante peut en profiter pour faire une contre-révolution et discréditer ses opposants en lui faisant porter la responsabilité de l’origine de la crise. Il est important pour favoriser un mouvement révolutionnaire d’avoir la pleine adhésion de la population car à la base, la révolte doit résulter d’exigences de changement de la population.
Les Iraniens (femmes et hommes, toutes générations confondus) sortent dans les rues car elles se sentent concernées par la mort d’une jeune fille qui aurait pu être son enfant, sa soeur, son amie ou sa femme. C’est l’élan de compassion et de révolte qui embrase les villes du pays.
En Guadeloupe, face aux multiples problématiques que nous rencontrons (misère sociale et économique, chômage de masses, répressions syndicales et politiques, suspensions des personnels soignants non vaccinés, à la mort de compatriote après le contrôle des forces de l’ordre, à la contamination de nos eaux, la vétusté du réseau de distribution, terres polluées, etc., etc…) à combien serions-nous prêt à descendre dans les rues pour entamer une révolution ?