Fonds-Thézan : les barrages de la honte ont volé en éclats

L’événement a fait le buzz sur les réseaux sociaux le week-end dernier avant de se propager sur les médias audio-visuels par la suite.

Samedi 28 janvier, les deux barrages de la honte ont volé en éclats sur le plateau de Fonds-Thézan Sainte-Anne, libérant à nouveau les servitudes donnant accès au littoral, à la mer, à la vue paradisiaque que seule une poignée de nantis s’était octroyé le droit d’en profiter exclusivement.
Mais, c’était sans compter avec la ténacité des proches riverains propriétaires, des Guadeloupéens d’origine ou d’adoption, qui ont dans ce combat «libérateur» obtenu le concours du LCDM (le Comité de défense mobile) et de nombreux autres citoyens.
Il faut savoir que, depuis la nuit des temps, les habitants, propriétaires et voisins, ont toujours fréquenté cette zone dite des «50 pas géométriques» (environs 80 m, en partant de la mer) sans jamais la détruire, ni s’en approprier.
Certains s’y adonnaient à des cultures vivrières, d’autres l’utilisaient pour faire paître leurs bovins ou pour la fabrication du charbon de bois. On pouvait même apercevoir des pêcheurs à la ligne et quelques fois même des ramasseurs de burgots.
Peu à peu, des traces ont été matérialisées par les services officiels, tel l’ONF (Office national des forêts) et entretenues aujourd’hui en principe par les services en charge du littoral et des 50 pas géométriques.
Ces traces sur la côte permettent en effet encore de relier l’Anse à Eblin à l’entrée Est de Fonds-Thézan à la plage des Salines (Le Gosier), notamment en traversant plusieurs Anses et plages telles Anse à Saint (Sainte-Anne), Anse Jacques et Petit-Havre (Gosier).
Les terrains dominants cette zone des 50 pas géométriques ont petit-à-petit été construits. Des villas ont peu à peu remplacé les champs, comme partout en Guadeloupe.
Alors, au fil des années, certains nouveaux arrivants, dont leurs propriétés bornent cette zone réservée et protégée, se sont octroyés le droit de privatiser ces lieux publics ; d’abord en rasant la végétation, tels des arbres parfois centenaires comme le Mapou.
Ainsi donc, ils pouvaient admirer à perte de vue la beauté du paysage, de la mer, des îles de notre archipel.
Mais cela ne leur suffisait pas ! Sur-tout que pour eux «trop de gens» en profitaient, et traversaient à proximité de leurs maisons, assez souvent pour certainse, non clôturées du côté de la mer, alors que vers la rue, sont érigés des murs assez hauts.
Alors, il leur fallait empêcher l’accès du public à la côte.
Il faut savoir que les premiers propriétaires des villas construites il y a une vingtaine d’années, en bout de route, ont toujours laissé libre le passage donnant accès à la côte. Car ils savaient bien que les autres propriétaires avaient chacun laissé 1,50 m ou 2 mètres pour permettre l’accès, non seulement des riverains «du fond», mais aussi celui des 50 pas géométriques, porte ouverte sur la mer.
Malgré les protestations des propriétaires mitoyens, et d’autres personnes, sans consultation, aucune du propriétaire voisin bornant le chemin, ils ont érigé une barrière avec portail télécommandé, surplombée d’une caméra de surveillance, braquée sur l’extérieur.
C’est devant une telle arrogance et la lenteur doublée de la lourdeur des autorités et administrations compétentes, que la décision a été prise de passer franchement à une étape supérieure.
L’exaspération, devenue donc à son comble, a incité certains riverains propriétaires à se rapprocher du LCDM qui, par la voie du média Kannal 97+ a alerté la population qui a répondu présente et s’est mobilisée samedi afin de faire sauter, non seulement les deux portails cités, mais aussi le portillon qui, au bout du lotissement voisin, obstruait aussi un passage entre deux propriétés, dédié à l’accès au site magistral de la chaudière ; «Tou a chodyè», comme l’ont toujours appelé les anciens.
Au-delà de l’action menée ce jour-là, ce fut aussi une porte ouverte, un exemple donné par Fonds-Thézan, non seulement aux autres coins du littoral de la ville qui sont dans le même cas, mais aussi à toute la Guadeloupe, surtout dans les zones dites «touristiques».
Ce problème survenu à Fonds-Thézan Sainte-Anne soulève réellement et plus largement celui de l’occupation du littoral, surtout en milieu rural, étant entendu qu’en zones urbaines certaines côtes ont été concédées ou vendues par l’Etat à des propriétaires dominants ces espaces.
Une sérieuse réflexion s’impose alors, et de réelles dispositions sont à prendre afin que le littoral guadeloupéen soit la propriété de tout un peuple, plutôt que celle de quelques nantis.