En voie d’un premier long-métrage pour Nelson Foix

Révélé en 2020 pour son court-métrage Timoun aw, récompensé par de nombreux prix cinématographiques aux Antilles et à l’étranger, le réalisateur guadeloupéen Nelson Foix est de passage à Paris pour développer ce projet sur grand écran. En pleine écriture, il compte bien porter ce long-métrage dans les salles obscures.

Deux ans après sa sortie, votre court-métrage Timoun aw, produit et tourné en Guadeloupe, fait toujours recette. Comment expliquez-vous un tel plébiscite ?
Nelson Foix : Il est vrai que ce film continue toujours de vivre et d’être partagé un peu partout. C’est très agréable de savoir que son travail plaît. Je n’ai eu que des retours positifs localement et bien au-delà. Il a reçu des prix en Jamaïque, il a été présenté en Afrique, aux Etats-Unis et il a été nommé aux Césars en début d’année. Il a une belle vie et je ressens toute l’énergie positive qu’il stimule. C’est fort, surtout que nous l’avons présenté durant la période covid où tout le cinéma était à l’arrêt. Je n’ai pas pu me déplacer comme je l’aurais souhaité et voir que mon film existe malgré tout démontre bien le besoin de cinéma, notamment en Outre-mer ! Cela reste encore trop rare qu’un film dépasse nos îles. Il y a un manque flagrant de représentation de nos territoires dans le cinéma et cela m’encourage d’autant plus à réaliser d’autres projets

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En parlant de projet, n’y en a-t-il pas un sur le feu ?
En effet, nous avons décidé de réaliser un long-métrage autour de la fiction de Timoun aw. J’ai été contacté par des producteurs pour m’aider à faire grandir ce projet et je suis ravi. Tout le monde a reconnu la qualité de mon court-métrage et, aujourd’hui, ils sont emballés à l’idée de travailler à mes côtés pour écrire la version longue pour le cinéma. Je suis épaulé dans ce cheminement qui est très long… Certes, des portes se sont ouvertes à moi mais passer du court au long est un processus compliqué car il faut trouver des financements. Pour Timouw aw, j’avais répondu à un appel à projet de Canal+ Caraïbes et la Région Guadeloupe Ils m’avaient financé à hauteur de 50 000€. Aujourd’hui, nous aurions besoin de deux millions d’euros. Ce sont deux projets bel et bien différents et je suis à Paris pour rencontrer les éventuels diffuseurs privés et organismes publics de l’Etat qui pourraient nous accompagner. Je cours de partout, je vais au charbon, car je crois en ce futur film.
Avez-vous commencé l’écriture ?
Oui ! L’histoire sera la même. L’his-toire de la paternité et de ses aléas. Mais le titre sera différent. Je dois me détacher du court pour pouvoir développer d’autres lignes dramatiques et narratives et intégrer de nouveaux personnages. Un film de 28 minutes et de 180 min. Il faut aussi créer des histoires dans les histoires. Je veux parler des relations humaines, car c’est ce qui m’anime, mais je vais en parler avec plus de maturité qu’à l’époque. Je vois le monde un peu moins naïvement que pour Timoun aw et j’ai aussi beaucoup plus de compréhension de l’homme et de ses problématiques. Je veux que ce film soit plus abouti.
Ce projet semble vous porte
très haut
Cela fait dix ans que j’attends de pouvoir tourner mon premier long-métrage et c’est désormais à portée de main. Depuis dix ans, je veux explorer le cinéma sans limite. Nous avons encore des réglages à faire, mais le film est dans ma tête. Nous prévoyons de le tourner en 2023 en Guadeloupe et je suis emballé par cela. Ce n’est pas un film dédié aux Antillais, mais ça reste un film que je veux ancrer dans notre société. Il sera tourné à Pointe-à-Pitre, non loin des quartiers où j’ai grandi. Nous allons faire un casting d’acteurs locaux qui maîtrisent le créole. Oui, tout cela me motive. Nous n’avons pas de référence dans l’univers cinématographique. Nous avons des icônes dans le domaine du sport et dans la musique, mais pas dans le cinéma. Il nous faut tenter des choses et sortir du cocon séduisant qu''offrent la Guadeloupe et son insularité. Je veux prendre des risques tout en mettant à l’honneur ma culture. Je suis métisse et je sais faire ce grand écart entre Paris et Pointe-à-Pitre.
Pensez-vous que votre futur film puisse faire autant d’échos en Hexagone qu’aux Antilles ?
Je l’espère ! Je fais des films à vocation universelle. Ils doivent pouvoir parler à tous ou alors c’est que j’ai raté mon film. Je sais apprécier un film coréen, or, je ne suis pas coréen. Je vais apprécier ce film, car il va me parler de choses que je vis, il va me transmettre des émotions. Moi, je suis une éponge, j’aime raconter les ragots et les potins et je m’en inspire pour écrire. Dans Timoun aw, j’évoque la paternité. N’est-ce pas quelque chose d’universel ? A travers ce film, je veux me donner l’opportunité de réaliser un rêve et, également, d’offrir à la Guadeloupe ce cadeau, celui d’amener un film antillais sur grand écran et de ne plus avoir peur de faire la différence.