Le voyage du Pape en République Démocratique du Congo Une bouée d’espoir
Le peuple de la République Démocratique du Congo (RDC), victime depuis des décennies d’une crise humanitaire complexe, l’attendait incontestablement.
Une crise qui s’est accentuée depuis deux ans, marquée par la famine, la maladie, la corruption, des conflits entre communautés, notamment les Téké et Yaka, des enlèvements d’enfants et d’adultes, religieux comme civils, des assassinats, l’exode massive.
C’est dans un contexte politique, économique, social et sociétal des plus inquiétants, que le Pape François a tenu à faire ce voyage. Il a débarqué à Kinshasa le mardi 31 janvier 2023, accompagné de son équipe et de journalistes. Evidem-ment, les conditions de sécurité dignes de tous les chefs d’Etat avaient été assurées.
A la rédaction de Nouvelles-Etincelles, il nous revient seulement de retenir et de répercuter les différents messages adressés à la population de 105 millions de personnes environ dont 60% de jeunes, devant les autorités gouvernementales, le corps militaire, l’ensmble des personnels religieux de l’église, les représentants de la société civile et le corps diplomatique.
En quoi faisant, ce n’est pas oublier le rôle de l’église catholique dans l’asservissement, la paupérisation, la soumission de peuples à travers le monde au profit des Etats coloniaux. Mais depuis, que de chemin parcouru par les peuples de la planète qui, pour la grande majorité, savent reconnaître depuis des siècles leurs bienfaiteurs, grâce aux différents procédés de conscientisation et de communication.
Continuer à penser que : «la religion est l’opium du peuple», c’est se tromper dangereusement. Ce serait donc faire preuve d’intolérance, d’intransigeance, d’intégrisme même, que de ne pas reconnaître que la religion catholique prend de plus en plus conscience de ses erreurs, de ses dérives et qu’il lui arrive même de demander «pardon». Et d’ailleurs, des générations de Guadeloupéens peuvent attester la contribution du catholicisme dans leur éducation pour éviter les déviances, la violence, la criminalité.
Dans la capitale de la RDC, le Pape s’est acquitté de sa mission évangélique en rencontrant des élus au plus haut niveau de l’Etat, des enfants, des jeunes, des adultes, des personnes âgées. Il a écouté et entendu toutes les souffrances. En réponses, ses propos n’ont point été entachés de complaisance, tant à Kinshasa qu’au Soudan du Sud. Nous reprenons des échos qui nous sont parvenus de différentes sources.
Devant une assistance médusée et le regard perdu du pape, une Congolaise déclare : «J’ai été retenue comme esclave sexuelle et j’ai subi des maltraitances pendant trois mois. Chaque jour, ils nous faisaient manger la pâte de maïs et la viande des chairs des hommes tués… Quelque-fois, ils mélangeaient les têtes des gens dans la viande des animaux qu’ils nous faisaient manger… Celui qui refusait de les manger, on lui coupait les mains et on nous faisait manger sa chair…».
L’Abbé Guy Robert Mandrodelo survivant mutilé lui aussi, en levant sa main gauche, sur laquelle il ne reste que deux doigts, raconte ce qu’il a enduré, en même temps que des dizaines de victimes du conflit, enfants comme adultes exhibaient leurs mains mutilées.
Aussi bien en République Démo-cratique du Congo qu’au Soudan du Sud, le Pape François s’est appliqué à dénoncer, condamner et exiger la réconciliation et la paix. Lors des messages de compassion, confor-me à sa mission de Pas-teur, fort éloquents, expressifs et qui ne peuvent souffrir, ni d’équivoque, ni d’ambiguïté, le Pape a fait état des divers maux qui affectent le pays et le continent. Il a alors invité les Congolais et en particulier les jeunes : A «lutter contre la corruption».
A «se relever, reprendre dans leurs mains, comme un diamant très pur, qu’ils sont, leur dignité, leur vocation à garder en harmonie et en paix la maison qu’ils habitent» en ajoutant : «Mais ce pays et ce continent méritent d’être respectés et écoutés, ils méritent espace et attention : retirez vos mains de la République démocratique du Congo, retirez vos mains de l''Afrique ! Cessez d’étouffer l’Afrique : elle n’est pas une mine à exploiter, ni une terre à dévaliser. Que l’Afrique soit protagoniste de son destin. Que le monde se souvienne des désastres commis au cours des siècles au détriment des populations locales et qu’il n’oublie pas ce pays ni ce continent. Que l’Afrique, sourire et espérance du monde, compte davantage : qu’on en parle davantage, qu’elle ait plus de poids et de représentation parmi les nations !».
Ce message se passe de commentaires sinon de celui du porte-parole du Gouvernement congolais Patrick Muyoya pour qui «la parole, l’homélie du Pape, s’adresse aussi à tous ceux qui ont le pouvoir et qui peuvent militer pour le retour de la paix en RDC. Elle correspond à ce qu’on attendait comme message. Il a prêché pour le pardon, il a prêché pour l’humilité. Il a rappelé qu’il était le défenseur des pauvres, de ceux qui souffrent. Nous pensons que le message a été capté à la fois par nous Congolais mais aussi par ceux qui peuvent agir pour que la paix revienne».
N’est-ce pas ce message de vérité, et d’amour qu’il convient, pour l’homme de l’église, de porter aux Congolais, aux Soudanais, à l’Afri-que et, mieux, à toute la planète dans ce monde en bouleverse.
C’est ce même message que l’on peut lire dans sa lettre encyclique sur la fraternité et l’amitié sociale d’octobre 2020 dont des extraits ont été publiés dans le numéro 911 du 25 février 2021 et le numéro 939 du jeudi 09 septembre 2021 de Nouvelles-Etincelles, à l’initiative de Christian Céleste.
En tout cas, ceux qui ont crû bon de dénigrer ou d’aider au dénigrement du souverain Pontife et de condamner son voyage ont été bien mal inspirés.