Le carnaval de Guadeloupe, est-il un vecteur de développement économique ?

Le carnaval est une fête populaire qui, à vrai dire, n’est pas donnée au peuple, mais que le peuple se donne à lui-même. On donne seulement ici le signal que chacun peut être aussi déraisonnable et fou qu’il le souhaite, et qu’en-dehors des horions et des coups de couteau, tout est permis.

Le carnaval en Guadeloupe est un des événements culturels les plus importants. Notre carnaval est particulier, spécifique, exceptionnel sur le plan culturel, parce qu’il est riche de sa différence et différent par sa richesse intrinsèque, si on le compare aux autres carnavals de la Caraïbe. Il est une exception, car il sous-tend une revendication culturelle, la lutte d’un peuple contre la disparition de sa culture, contre l’acculturation et «l’interculturation» due à la mondialisation.
Pour en avoir une idée précise en quelques chiffres, c’est plus de 20 000 carnavaliers, entre 50 000 à 100 000 spectateurs. Le carnaval devrait contribuer, au développement économique de la Guade-loupe. Considéré comme un pur produit d’appel touristique, force est de constater que de nombreux opérateurs touristiques utilisent cet événement, pour capter leurs clients, en atteste le foisonnement de magazines de bord distribués par les différentes compagnies aérien-nes sur les vols à destination du pays.
Quand on observe l’immense énergie et la vitalité déployée dans le déroulement des défilés et des «déboulé», on peut s’avancer à dire qu’il contribue à canaliser, chaque année les énergies de nombreux jeunes, à libérer les corps et les esprits des moins jeunes, envahis par le stress de la vie quotidienne.
Il en découle de la problématique suivante : le carnaval guadeloupéen, contribue-t-il réellement à l’activité économique de la Guadeloupe ?
Le volet économique et social est observé par le biais d’un organisme central intervenant dans le carnaval en Guadeloupe, à savoir l’Office du Carnaval de la Guadeloupe (O.C.G), pour repérer les voies de développement tant économique, que social, véhiculées par notre carnaval.
L’IMPACT ÉCONOMIQUE
DU CARNAVAL
EN GUADELOUPE
Pour réaliser et faire vivre cet événement à toute la population, c’est un investissement considérable qui doit être mis en oeuvre. Le coût du carnaval serait le résultat de l’addition de plusieurs aides des collectivités territoriales, notamment la Région Guadeloupe, du Conseil départemental, des EPCI, des sponsors, de l’apport de chaque adhérent des groupes, et du temps associatif.
D’après l’enquête, on estime que pour les taxis, la valeur ajoutée est assez forte (85% du chiffre d’affaires). En ce qui concerne les restaurants, la valeur ajoutée (V.A) atteint environ 60% du C.A, et le revenu distribué est de l’ordre de 30%. L’excédent brut d’exploitation (E.B.E) représente 40% de la valeur ajoutée.
S’agissant des commerces, la valeur ajoutée n’est que de 50% du chiffre d’affaires, le revenu distribué et transféré représente environ 60% de la valeur ajoutée
Le Carnaval Guadeloupéen, de par sa diversité et sa spécificité, peut devenir un outil de développement tant économique que social.
Le potentiel économique de cette tradition qui a évolué au cours des siècles est inestimable. Certes, il existe des méthodes quantitatives qui pourront permettre de calculer cet impact. Néanmoins, le potentiel économique social, culturel ne pourra être que sous-évalué. On ne peut en aucun cas limiter cette valeur économique uniquement à sa valeur marchande.
Cependant, on ne peut faire abstraction du volet emploi du carnaval. Le carnaval, génère-t-il des emplois pérennes ? Rien n’est sûr, le carnaval est l’affaire du monde associatif. En commercialisant des packages (ateliers, sorties, photos par exemple) les groupes s’assureraient des retombées commerciales qui leur permettraient de créer des emplois pour structurer leur offre et mener plus confortablement leurs actions culturelles sur le territoire. Alors, à quand cette véritable mutation ? Veut-on professionnaliser le carnaval pour créer des emplois tout au long de l’année autour d’un élément fort de notre patrimoine ? Il y a de nombreuses idées à prendre du côté de nos îles caribéennes…
Des sommes importantes sont dépensées dans le carnaval, depuis des années, mais cet investissement financier ne rapporte que très peu à l’économie touristique de la Guadeloupe. Le jour où les hôtels seront remplis par des visiteurs venus spécialement admirer notre carnaval, on aura cette bataille.
Le carnaval recèle d’importantes valeurs économiques qui ne sont pas en totalité prises en compte, par manque de données chiffrées, mais aussi par méconnaissance.
La dimension économique est intimement liée à la dimension sociale, l’économie a une incidence sur le social. Grâce au carnaval, la communauté guadeloupéenne est peut-être en train de créer un modèle de développement endogène basé sur l’économie du culturel, voire l’industrie du culturel. Ainsi, par les retombées économiques, voire financières qu’il induirait, ce nouveau modèle vivifierait et pérenniserait la dynamique de ce vivre-ensemble guadeloupéen tout particulier…