HOMMAGE À SYLVIANE TELCHID «Sé soulyé i sav si chosèt ni tou»

Beaucoup de belles choses ont été dites et répétées à l’occasion de la disparition de Sylviane Telchid. Cette personnalité inspirante native de Capesterre Belle-Eau, a comme certains de ses illustres prédécesseurs (Gérard Lauriette, Sony Rupaire…) marqué son existence par la transmission de sa passion pour les Lettres guadeloupéennes.

Il est appréciable de prendre connaissance des différentes réactions suscitées lors de son décès. Mais, il faut aussi s’interroger, sans polémiques inutiles, sur le silence de certains de ses compagnons durant toutes ces dernières années qu’elle a vécues, déjà même un peu avant sa maladie. Elle était nommée rarement comme pour l’éteindre davantage. Si Les Nouvelles-Etincelles l’affirment c’est parce que, avec un minimum de recul nécessaire, le constat est flagrant, les nécrophages ont vu leur appétit s’aiguiser du fait de l’émotion suscitée par son décès.
Sylviane Telchid a laissé à son pays archipel Guadeloupe, un patrimoine pédagogique, didactique, langagier, culturel fondamentalement important pour l’avenir de la langue créole. Elle n’était point universitaire, ni théoricienne mais une praticienne aguerrie devenue incontournable. Les références aux différentes contributions dans l’avancée pour une reconnaissance de la langue créole de Guadeloupe est aussi incontestable. Il faut s’imaginer le mépris réel dans lequel était plongée la langue maternelle de beaucoup de Guadeloupéens à l’époque jusqu’au milieu des années quatre-vingt. Il est temps de rendre hommage aux nationalistes de l’association générale des étudiants guadeloupéens (l’AGEG) d’avoir mené l’ardent combat de la réhabilitation du créole et du gwoka notamment.
Sylviane Telchid s’est appuyée sur les travaux universitaires sans jamais en être dépendante totalement afin de contourner les inévitables errements. En Guadeloupe, personne n’a encore fait mieux qu’elle, quiconque n’a encore fait autant quantitativement et surtout qualitativement. Certes, ses travaux doivent faire l’objet d’études critiques afin de faire avancer la créolistique en Guadeloupe. Mais proclamons et revendiquons d’abord le respect qu’elle mérite pour avoir porté haut le flambeau de l’illustration largement positive de cette langue de Guadeloupe.
Sylviane Telchid a toujours privilégié une médiatisation contrôlée (adaptée) et maîtrisée de ses différentes interventions. Sa parole était pertinente et inscrite régulièrement dans une pédagogie fluide. Plutôt discrète naturellement, elle a beaucoup misé et travaillé en équipe. Cependant, il lui est trop souvent arrivé que la réciprocité n’ait guère joué en sa faveur. Elle savait pourtant aller à l’essentiel et favoriser le collectif. Nul ne peut dire qu’elle a fait partie des bavards à la recherche d’un micro cherchant à tout prix à se forger une actualité pour demeurer artificiellement au sommet de la crête. Elle n’a jamais cherché à écraser ses pairs ni en privé et même habilement en public afin d’acquérir quelque illusoire leadership. Elle n’a jamais sollicité ni médaille ni honneur obligé, ni faveur institutionnelle. L’image que nous gardons d’elle est celle d’une battante souriante, généreuse, une travailleuse acharnée de longue haleine.
Syiviane Telchid est la première femme du pays à avoir consacré autant d’énergie, de temps, et d’investissement à la production intellectuelle pour la défense et l’illustration de la représentation méliorative de la langue guadeloupéenne. Nous devons reconnaître ou admettre qu’elle s’est toujours abstenue de se laisser envahir par l’enflure d’un ego ravageur qui est la marque de fabri-que de certains. L’humilité l’a toujours habitée, l’amour des langues également. Elle ne cherchait jamais à se mettre en avant. Elle ne s’est jamais fourvoyée dans des confrontations non constructives. Elle n’a pas non plus emprunté les voies et moyens de sa construction en profitant des autres. Elle était dans la coopération sincère sans aucune arrière-pensée. Bien au contraire, sa bienséance, son humour, sa persévérance au travail, son humanité permanente et transparente la guidait dans l’échange et le partage. C’est une personnalité dont la Gua-deloupe doit être fière ! RESPECT !

LIV MAN TÈLCHID MAKÉ

Co-auteur :
1980 Grammaire comparée
Créole/Français (CM2-6e)
Imprimerie mairie de Basse-Terre
1983, Dictionnaire Créole/Français, Hatier
1986, 1 000 proverbes de la Caraïbe francophone, Acct/Editions Caribéennes
1986, Kosyè (22 leçons de créoles en 6e) C.D.D.P.
1989, Fables de la Fontaine en créole (adaptation), K7 audio) E.D.P.E
1990, Dictionnaire Créole/Français,
2e édition, Servedit-Jasor
1990, Le Créole sans peine, ASSIMIL
1994, Ecrire la parole de nuit
(collectif), Gallimard.
1998, Femmes des Antilles
(traces et voix) collectif,
Stock, G. Pineau, M. Abraham.
Le Créole guadeloupéen de poche,
ASSIMIL.
2000, Kamo, Editions Jasor.
2000, Zayann : Fables de la Fontaine
en créole, PLB Editions.
Auteur :
1983, Jé kréyol : jeux créoles pédagogiques, Edition AKPK.
1985, Ti Chika et… d’autres contes
antillais, Editions Caribéennes.
1996, Throvia de la Dominique
(roman) l’Harmattan
1997, Dictionnaire du Français régional
des Antilles, Editions Bonneton
1998, Grand-Père Chabri raconte
(légendes et mystères du
Pays-Guadeloupe), Editions Jasor.
1999, Jeux créoles (jeux pédagogiques), Editions Jasor.
En préparation : l’Enfant des autres (roman), Editions Jasor
Traduction de la bible en créole.
Dictionnaire d’expressions créoles,
Editions jasor
Inédit : Adaptation pour théâtre
Jacques Roumain : Gouverneur
de la Rosée
Jean Cocteau : Le bel indifférent
Bertolt Brecht : La noce chez
les petits-bourgeois
Anton Tchekov : La demande en mariage
Molière : l’Avare
Roger Martin du Gard : La gonfle
Gilbert Laumord : Robinson et Vendredi