«Entre deux batailles difficiles» : le Parti communiste grec (KKE) livre son analyse sur la recomposition de la scène politique Grecque

Extraits diffusés par le Secrétariat des Relations internationales du KKE La Grèce continue d'attirer l'at- tention des travailleurs du monde entier, en perspective des élections législatives à venir. Elles sont d'une importance cruciale et se tiendront le 17 juin puisque aucun des trois partis arrivés en tête n'a réussi à former un gou- vernement de coalition. Le résultat des dernières élections et la ligne politique du Parti communiste de Grèce (KKE) suscitent un intérêt certain, à en croire les arti- cles dans les journaux, les maga- zines et les sites web des communistes et des progressistes. Ces derniers jours, ces questions ont été dans la ligne de mire de plu - sieurs analystes. Commençons par le début.(…)

L'ILLUSION DE «L'UNITÉ DE LA GAUCHE» ET LE MENSONGE DU «GOUVERNEMENT DE LA GAUCHE»

_ Beaucoup de travailleurs politi- sés, de différents pays en Europe et partout dans le monde, se posent la question suivante : pourquoi le KKE ne fait pas quelques concessions ? Pourquoi insiste-t-il dans la ligne politique de rassemble- ment des forces sociales qui veu- lent se battre contre les monopo- les, contre le capitalisme, contre les unions impérialistes, pour le pouvoir ouvrier et populaire et ne soutient pas la politique de «l'unité de la gauche», la lutte pour corriger la réalité capitalis- te et de l'UE, par une collabora- tion politique ou gouvernemen- tale avec d'autres forces «de gauche» et social-démocrates, à l'exemple d'autres partis communistes en Europe ?

Tout d'abord, le KKE a clarifié depuis longtemps que le sens de «gauche» et «droite» ne sont pas des termes qui reflètent la situation politique d'aujourd'hui. Aujourd'hui, le terme «gauche» pourrait s'utiliser pour décrire le Secrétaire général de l'OTAN ou le Premier ministre d'un pays qui mène une guerre impérialiste et prend des mesures anti-ouvrières et anti-populaires contre les travailleurs de son pays. (.)

L'OBJECTIF EST DE RÉDUIRE L'INFLUENCE DU KKE ET DE L'ASSIMILER AU SYSTÈME

_ Le refus du KKE à se soumettre aux formations de «gauche» ou même à un gouvernement de «gauche» est la «cible» des ennemis et des «amis», qui directement ou indirectement appellent le KKE à «s'unir» aux autres forces de «gauche». Cette ligne est suivie par les partis communistes qui sont dans le présidium du PGE. En outre, il y a eu quelques attaques grossières venant par exemple de groupes trotskystes -qui sont plus connus à l'étranger qu'en Grècequi caractérisent le KKE comme un parti sectaire et dogmatique.

Comment serait-il possible que le KKE avec la ligne de la lutte de classes et du conflit qu'il défend rassemble des centaines de milliers de personnes en Grèce, si le parti était sectaire ? Comment est-il possible par exemple que dans les rangs du Front Militant de Tous les Travailleurs (PAME) soient regroupés des dizaines de syndicats de base, des fédérations sectorielles, des associations de syndicats au niveau régional représentant des centaines de milliers de travailleurs ?

RESTAURATION DU SYSTÈME BOURGEOIS

Le KKE a depuis longtemps aver- ti le peuple grec que la classe bourgeoisese prépare à restaurer le paysage politique afin de préserver son pouvoir. La raison en est qu'elle ne peut plus gérer un système politique fondé sur l'alternance au pouvoir d'un parti politique bourgeois conservateur (ND) ou social-démocrate (PASOK), comme cela s'est produit depuis 1974, après la chute de la dictature militaire. Le système bourgeois essaye de «se débarrasser» des partis et des personnes qui ont été irrémédiablement discrédités aux yeux du peuple. Dans ces conditions, SYRIZA, qui a un programme social-démocrate, a été mise en avant lors des élections en promouvant des mensonges flagrants, avant et pendant la période pré-élec - torale, en semant des illusions qu'il peut y avoir un avenir meilleur pour les travailleurs sans entrer en conflit avec les monopoles et les unions impérialistes. C'est pourqu oi ils sont placés devant d'énormes respon - sabilités vis-à-vis du peuple.

Le KKE appelle les travailleurs à se rendre compte que la restau - ration qui est en train de se réali - ser n'a rien à voir avec la satisfac - tion des besoins actuels de la population. Même le soi-disant «gouvernement de gauche » est un «canot de sauvetage qui prend l'eau» lancé aux tra - vailleurs qui étouf fent des impas - ses du système capitaliste. Le peuple ne doit pas se laisser prendre au piège par de fauxdilemmes

Dans la perspective des élec - tions du 17 juin, les partis bourgeois et l'opportunisme mettent en avant de nouveaux dilemmes trompeurs qui seront utilisés bientôt pour piéger le peuple, af faiblir la résistance des masses populai - res et radicales et réduire l'in - fluence électorale du KKE. Le KKE ne cache pas le fait que cette bataille sera très dif ficile pour les communistes.

Afin de préciser quel type de faux dilemmes sont mis en avant, nous allons examiner certains d'entre eux :

1. Euro ou drachme ?

_ Un faux dilemme concerne l'accusation de la ND contre SYRIZA dont la politique mènerait le pays à sortir de l'euro, ce qui serait catastrophique pour les travailleurs. D'une autre part, SYRIZA répond que la sortie de la Grèce de l'euro signifierait un coût énorme pour les autres pays de la zone euro et que cela ne se produira jamais.

De fait, en considérant que la crise capitaliste se développe, on ne peut pas exclure, selon les scé - narios en cours de discussion, la contraction de la zone euro par l'expulsion de la Grèce et d'autres pays ou la dévaluation interne de l'euro dans notre pays. En ce sens, le chantage de l'Union euro - péenne et du FMI est réel et la réponse ne peut pas être la com - plaisance que SYRIZA encourage.

T outefois, il convient de noter que tous les autres partis sauf le KKE, c'est-à-dire la ND, SYRIZA, leP ASOK, la DIMAR se battent entre eux pour savoir qui va être en mesure de maintenir le pays dans l'euro et accusent mutuelle - ment leur politique respective de conduire la Grèce à la drachme. Leur objectif consiste à imposer à la conscience du peuple, le faux dilemme «euro ou drachme» pour occulter le fait qu'ils ont la même stratégie puisque tous ces partis sont compromis avec l'UE. Ils demandent au peuple de voter et de se battre sous des drapeaux étrangers à ses propres intérêts, de suivre la fausse ligne «à l'intérieur ou à l'extérieur de l'euro», quand tous les partis sauf le KKE- sont en faveur de l'UE et de l'euro. Les travailleurs et le peuple, que ce soit avec l'eu - ro ou la drachme, vivront dans la pauvreté.

Le KKE appelle les travailleurs à ignorer ce dilemme. Ils ne doi - vent pas accepter le choix de la monnaie avec laquelle ils vont mesurer leur pauvreté, leurs réductions de revenus et de pen - sions, les taxes, les frais médicaux et d'éducation. Le dilemme «euro ou drachme» est l'autre face de l'intimidation basée sur la faillite incontrôlée, ce qui est déjà une réalité pour une grande majorité du peuple. Ils veulent que le peuple soit pris dans de faux dilemme afin de pouvoir faire du chantage au moment d'impulser des lois anti-populai - res, en lui disant de choisir entre des mesures barbares et le retour à la drachme, qu'ils identifient au chaos et la misère. En même temps, en Grèce et à l'étranger, il y a des secteurs de la ploutocratie qui veulent revenir à la drachme. Cela leur permettrait à eux et à la bourgeoisie dans son ensemble de faire plus de profits que dans les conditions actuelles où le pays est maintenu dans l'euro. Le peuple en faillite n'obtiendra pas de prospérité ni avec l'euro ni avec la drachme, tant que les monopoles dirigent la production, le pays reste dans l'UE et la bourgeoisie au pouvoir. La seule réponse au dilemme «euro ou drachme», du point de vue de l'intérêt populaire, est le retrait de l'UE, le pouvoir populaire et l'annulation unilatérale de la dette. Il va sans dire que, dans ce cas-là, le pays aura sa propre monnaie.

2. Solution grecque ou euro- péenne ?

_ Tout le monde parle d'une solution européenne de la crise en Grèce et se réfère aux négociations avec les institutions de l'UE pour une solution globale au problème de la dette qui inclura également la Grèce. Tous les partis grecs, à l'exception du KKE, ont salué l'élection de Hollande à la présidence française. Ils disent qu'il mettra fin au duo antipopulaire «Merkozy». En outre, ils parlent des consultations avec l'UE qui concernent des mesures de développement. Ces dernières consisteraient à subventionner des grandes entreprises afin de leur permettre d'investir .

Leur tactique est destinée à cacher le fait que le responsable de la souf france du peuple n'est pas à Bruxelles mais dans le pays. C'est la bourgeoisie, les employeurs qui ont entre leurs mains les moyens de production, les navires, les bureaux, les servi - ces de notre pays. La participa - tion de la Grèce dans l'Union européenne, sur la base des déci - sions des partis de la ploutocratie, sert leurs intérêts. C'est une pro - vocation de présenter l'UE comme un terrain dans lequel on peut trouver une solution pour le peuple. C'est l'UE avec les gou - vernements locaux et le FMI qui ont élaboré les mémorandums. C'est l'UE qui a adopté la straté - gie «UE 2020» et le traité de Maastricht, sources de toutes les mesures contre les travailleurs et les peuples inclus ou non dans les mémorandums. Ils disent au peu - ple que même la plus petite amé - lioration des mesures est en lien avec les négociations au sein de l'UE, alors que celle-ci ne vise qu'à assurer aux monopoles une sortie de crise au détriment des peuples. Ils demandent à la victime d'attendre que l'agresseur lui donne la solution à ses problèmes dans le cadre d'une Union européenne submergée de plus en plus dans la crise et de plus en plus réactionnaire, étant donné les rivalités internes et l'antago - nisme avec les autres centresimpérialistes.

SYRIZA a une grande responsabi- lité vu qu'elle cherche une renégociation de la stratégie du mémorandum en paralysant le mouvement et le laissant dans l'attente. Supposément, ces négociations couronneraient de succès le «gouvernement de gau- che» dont rêve SYRIZA et ses partenaires au sein de l'UE. En même temps, on parle de «cohésion sociale» et de «paix sociale» imposées par un «gouvernement de gauche», cela a pour but de museler les luttes ouvrières et populaires dans une période où celles-ci doivent s'intensifier et se radicaliser en premier lieu contre la ploutocratie nationale et les partis qui sont à son service ou la soutiennent en usant de l'intimidation ou des illusions.

Le KKE révèle au peuple qu'il est nécessaire de compter sur un mouvement ouvrier et populaire en Grèce qui se batte pour la rup- ture et le renversement des décisions du capital et de l'UE et qu'en même temps il faut mettre en avant la coordination au niveau européen, non avec des négociations, mais avec le renforcement du mouvement ouvrier populaire européen contre l'UE, sur une ligne de rupture.

3. Austérité ou développement ?

_ Dans une Europe capitaliste plongée dans la crise, les gouvernements tentent de faire du «développement», à savoir la sortie de la crise prônée par le capital de l'UE. En Grèce, les partis en faveur de l'UE s'accu- sent mutuellement sur la pro- portion, dans leur offre poli- tique, entre les mesures d'aus- térité et celles de développement. De cette manière, ils essaient de cacher que la voie du développement capitaliste implique l'austérité dans les conditions d'une concurrence capitaliste forte et de l'accentuation des contradictions inter-impérialistes. Les mesures de «consolidation fiscale» qui sont mises en œuvre dans les pays avec ou sans mémorandum au nom de la création d'un excédent dans le budget de l'Etat et de la nécessité de subventionner le capital servent aussi le développement. Les «changements structurels» en Grèce et dans toute l'UE, également au nom du déve- loppement, concernent surtout l'abolition de la sécurité sociale et des droits des travailleurs afin que le travailleur soit moins cher pour le capital.

A suivre…