RETOUR À LA POLITIQUE ET AUX PARTIS POLITIQUES ?

Le bordel politique des élections législatives qui se prolonge dans l'enceinte de l'Assemblée Natio- nale française avec les déboires du nouveau député Harry Chalus frappant désespérément à la porte du groupe socialiste va-t-il démonter les mécanismes politiciens et les pratiques électoralistes détestables en œuvre dans la société guadeloupéen- ne depuis plusieurs décennies ?

Certaines voix, dont celles qui ont participé à toutes ces dérives ont éloi- gné les citoyens de la politique et des partis politiques, s'élèvent pour appe- ler à une moralisation de la vie poli- tique en Guadeloupe. Il nous plait de rappeler que depuis 1992 nous avons mis en débat dans le pays un code moral et éthique pour les élus. De Albert Dorville, l'ancien maire de Trois-Rivières qui reste, malgré son appel qui se voudrait salvateur, un activiste anti-parti aux journalistes du lundi politique de RCI qui n'ont cessé de travestir la politique et de marginaliser les partis politiques, le constat est alarmant, le cri est chargé d'inquiétudes et de doutes sur les chances de faire exister une société démocratique en Guadeloupe si les rapports à la politique, aux partis et aux élections ne changent pas.

Wopso, kod a yam maré yam !

Ils sont pris à leur propre piège. Pour avoir accompagné depuis des années le système de la personnali- sation et de l'institutionnalisation de la vie politique en Guadeloupe, ils se retrouvent aujourd'hui au milieu de ce désert démocratique qui se mani- feste par ce taux élevé d'abstention d'une élection à l'autre et par un tas d'électrons libres.

Ceux-là mêmes qui, hier, nous t raitaient de ringards, de gens du passé parce que nous affirmions qu'il ne peut y avoir de politique sans ligne idologique, sans projet, sans organisation politique donc de parti structuré, sans actions et débats dans la société, nous tressent une couronne en reconnaissant que la vacuité actuelle est la conséquence du recul, de la faiblesse et de la «dépos- session» des partis de la direction de l'action politique. Ils font l'expérience après d'aut - res, que la vérité se trouve tou- jours dans la vie !

Mais, les causes qu'ils avancent pour expliquer l'étendue de ce désert res- tent à la marge d'une analyse sérieuse des mutations politiques et sociales internes et externes qui ont désarticu- lé le rapport à la politique chez nous. Certes, il y a comme ils avancent : l'apparition de la société de l'informa- tion avec internet, le câble et le satel - lite ; la multiplication de petits grou- pes politiques aseptisés à l'échelon communal ; la disparition des leaders charismatiques. Mais, ce n'est pas tout et ce n'est pas l'essentiel.

L'apparition de ce désert démocra- tique dans lequel s'est développé ce bordel politique qui éclate au grand jour, trouve sa source dans : la trahison du Parti Communiste Guadeloupéen orchestrée par ses leaders élus : Henri Bangou, Ernest Moutoussamy, Daniel Génies, Jérôme Cléry en 1991; la recomposition de l'espace politique dans une alliance honteuse : PPDG, GUSR, Objectif Guadeloupe en 1992, la dislocation du courant nationaliste avec l'enlisement de L'UPLG dans les eaux sombres de l'é- lectoralisme en 1993. A la base de tout cela il y a, sans rien nier du contexte économique et social, les changements introduits par la décentralisation dès 1982 dans les comportem ents et pra- tiques des élus guadeloupéens.

Totalement drogués en goutant à l'illusion du pouvoir, ils ont fait le choix politique néfaste de substituer le pouvoir exécutif des Assemblées élues à la direction des partis poli- tiques et d'institutionnaliser la lutte politique en Guadeloupe.

Les dernières élections cantona- les, sénatoriales et législatives montrent que cette expérience arrive à son terme.

L'appel de Victorin Lurel à la rue Oudinot devrait précipiter la fin du cycle.

Alors s'ouvre le temps de revenir aux fondamentaux, de renouer avec la politique et les partis politiques.