REPONSE DU PARTI COMMUNISTE GUADELOUPEEN A LA DEMANDE DE CONTRIBUTION DU CONSEIL DEPARTEMENTAL

Nous avons reçu le lundi 15 mai votre lettre de demande de contribution, après être intervenu auprès de vos services en ce sens. Le délai de rigueur du 12 mai qui y est indiqué ne saurait donc nous être opposé. Nous ne sommes pas dupes, que la demande de contribution restreinte, que vous avez adressée aux partis politiques est destinée à donner aux Guadeloupéens l’illusion d’une démarche de concertation. Pour autant face à la gravité de la situation qui affecte le pays, le Parti Communiste Guadeloupéen ne restera pas taisant. Il assume ses responsabilités en vous adressant son analyse et ses propositions pour ouvrir une perspective au pays.

LA RECHERCHE D’UN ARRANGEMENT AVEC LE GOUVERNEMENT DANS LE DOS DU PEUPLE
Dans votre courrier vous indiquez explicitement que votre démarche se situe dans le cadre de «l’Appel de Fort-de France», du Comité Interministériel des Outre-Mer (CIOM) et de la tenue d’un prochain énième congrès.
Il s’agit là d’une stratégie consistant à pérenniser le système colonial en réaménageant et réagençant son mode de fonctionnement et ses institutions au travers d’une révision constitutionnelle établissant «la différenciation» comme nouveau cadre de l’assimilation-coloniale.
Cette différenciation n’est donc en effet qu’un nouvel habillage de l’assimilation coloniale qui nous emprisonne dans le droit commun français et européen.
En effet le pouvoir français recherche et prépare, avec des élus partisans de l’assimilation,
une solution qui permette de nous maintenir sous tutelle coloniale.
L’ÉCHEC IRRÉVERSIBLE DU PROJET D’ASSIMILATION-INTÉGRATION
Après 77 ans de départementalisation la preuve n’est plus à faire de l’échec de toutes les réformes, les lois- programmes et autres lois d’orientation, décidées par les gouvernements successifs de la France, toutes tendances confondues.
De la départementalisation adaptée aux lois Notre et 3DS, en passant par la décentralisation acte 1,2, et 3, aucune de ces réformes, n’a empêché la catastrophe économique, sociale, environnementale, humaine et sociétale qui défigure et désintègre notre pays et nous conduit à la catastrophe.
C’est tromper et trahir le peuple guadeloupéen que de prétendre oeuvrer pour le développement et l’émancipation en maintenant la Guadeloupe dans le cadre du droit commun français et de l’intégration européenne.
Nous ne nous inscrivons pas dans la quête d’adaptations, d’habilitations, de différenciation, mais dans une rupture avec le système colonial et le système d’exploitation capitaliste.
Le Parti Communiste Guadeloupéen ne transigera pas sur la défense des intérêts fondamentaux de la Guadeloupe, du peuple et des travailleurs guadeloupéens.
Nous ne serons jamais complices d’une quelconque stratégie qui vise à consacrer la domination politique et à sanctuariser la position de la classe des pwofitan.
LA GUADELOUPE à L’HEURE DE LA DÉCOLONISATION
Nous réaffirmons l’existence du peuple guadeloupéen, différent du peuple français, et de son droit imprescriptible à choisir librement son destin, conformément à la résolution 1514 du 14 décembre 1960, de la charte de l’ONU sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Nous confirmons que :
- La Guadeloupe ne pourra jamais se développer si elle demeure dans le cadre de l’assimilation législative française et de l’intégration Européenne qui imposent l’application bornée des lois et des règlements pensés pour la France et l’Union européenne.
- La Guadeloupe ne pourra jamais se développer pour elle-même et au bénéfice du peuple guadeloupéen, si elle n’a pas la propriété et la capacité politique de disposer de ses richesses et ressources naturelles, de son espace maritime, de ses ressources énergétiques, de sa biodiversité, de son patrimoine foncier et naturel.
- La Guadeloupe ne pourra avoir de développement économique tout autant qu’elle sera assujettie aux règles de la libre circulation des capitaux, des biens et des personnes et sans aucune protection ni priorité pour la production, les producteurs et les citoyens guadeloupéens.
- Le peuple guadeloupéen ne pourra s’épanouir s’il n’est pas défini une citoyenneté guadeloupéenne qui détermine les devoirs et les droits politiques, économiques, sociaux, patrimoniaux et culturels du citoyen guadeloupéen.
- La Guadeloupe ne pourra jamais se développer si elle ne peut pas choisir librement le statut politique qui lui permettra de mettre en oeuvre avec efficience son modèle de développement économique, social et culturel.
La question majeure qu’il nous faut donc résoudre c’est celle de la décolonisation de notre pays, que nous, communistes, avons posée depuis 1955 et confirmée dans un acte politique majeur : la résolution historique du congrès fondateur du Parti Communiste Guadeloupéen en 1958.
Conscient que la gravité de la situation de notre pays exige des réponses et des changements en urgence, notre Parti, assumant ses responsabilités sans renoncer au droit inaliénable du peuple guadeloupéen à la pleine souveraineté, a décidé de rechercher un compromis avec l’Etat avec pour finalité la conquête d’un statut d’autonomie, à l’étape actuelle de notre lutte de libération nationale démocratique.
NOTRE STRATÉGIE POUR LA CONQUÈTE D’UN STATUT D’AUTONOMIE POLITIQUE
1- Le rétablissement de l’existence du peuple guadeloupéen, en supprimant le nom de la Guadeloupe dans l’article 72-3 de la Constitution française qui en fait une population dans le peuple français.
2- L’élection d’un Congrès instituant au scrutin de liste à la proportionnelle intégrale.
3- Ce Congrès instituant aura pour unique mandat l’élaboration d’un projet de statut politique comportant les institutions pour la Guadeloupe et sa négociation avec le Gouvernement français.
4- Dans le contexte socio-économique, culturel et politique de la Guadeloupe, nous optons résolument pour la conquête d’un statut d’autonomie comportant :
• une assemblée délibérante, dotée du pouvoir législatif et réglementaire
• un conseil exécutif collégial, responsable devant l’assemblée.
• un conseil consultatif, économique, social, culturel et de l’environnement
5- La consultation des électeurs sur le projet définitif issu de la discussion et de la négociation avec le gouvernement.
6- C’est le projet approuvé par les électeurs, qui déterminera les contenus du statut politique de la Guadeloupe.
EN CONCLUSION
L’exigence de nouveaux rapports avec la France se pose aujourd’hui avec beaucoup d’acuité face au processus de dislocation de notre pays et de notre peuple menacé de génocide par substitution.
Il y a une exigence de soumettre aux Guadeloupéens un projet politique d’émancipation et de développement, en rupture avec le système assimilationniste-colonial en vigueur.
Mais, l’autonomie ne pourra être gagnée que par le rapport de forces et la mobilisation des Guadeloupéens.
Au nom de l’intérêt supérieur de la Guadeloupe, nous appelons tous ceux, organisations politiques, organisations sociales, organisations et mouvements culturels et associatifs, tous les Guadeloupéens qui se revendiquent et oeuvrent à l’émergence d’une souveraineté guadeloupéenne, à se réunir pour s’accorder en urgence sur un Projet Commun Guadeloupéen, un projet global, politique, économique, social, culturel, d’émancipation par la conquête du pouvoir politique.
Pour nous, Parti Communiste Guadeloupéen, l’avenir de la Guadeloupe ne peut pas se décider en dehors du peuple guadeloupéen souverain.
Recevez, Mesdames et Messieurs les élus, nos salutations guadeloupéennes.

Pointe-à-Pitre, le 25 mai 2023

Le Secrétaire général
Félix Alain Flémin