Conclusions de la présidence lors du Sommet pour un Nouveau Pacte financier mondial (4e partie et fin)

De nombreux acteurs publics et privés se sont réunis à Paris les 22 et 23 juin 2023 et ont affirmé leur détermination collective à relever les défis communs en matière de climat, d’environnement et de développement par une coopération mondiale renforcée. Ils ont pris une série d’engagements qui contribueront à réformer le système financier international, près de 80 ans après la création des institutions de Bretton Woods, et à améliorer la protection des biens publics mondiaux permettant de préserver la planète et d’en prendre soin tout en garantissant aux plus pauvres des financements à faible coût.

3. PROTÉGER LA PLANÈTE ET NOS BIENS COMMUNS :
AIR PUR, FORÊTS ET OCÉANS

• Un Partenariat pour une transition énergétique juste a été instauré entre le Sénégal et les pays du G7 pour soutenir la transition de ce pays vers un bouquet énergétique dans lequel la part des énergies renouvelables représentera 40% d’ici 2030, les premiers engagements des donateurs bilatéraux, des banques multilatérales de développement et des investisseurs privés s’élevant à 2,5 milliards de dollars.
• Une première série de paquets nationaux pour les forêts, la nature et le climat pourrait être préparée d’ici la COP28 par les pays intéressés, avec le soutien de tous les partenaires internationaux désireux de s’associer à cet effort.
• La Société financière internationale a annoncé son intention de lancer une initiative collective sur l’eau et le climat d’ici la COP28. Il sera crucial de consentir des efforts supplémentaires en matiè-re de décarbonation pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. De nouvelles contributions financières, notamment des mécanismes obligatoires ou des taxes portant sur les activités contribuant le plus aux changements climatiques, peuvent permettre d’accroître ces efforts tout en fournissant des ressources additionnelles pour financer l’action climatique.
• Il a été proposé de créer un groupe de travail pour étudier la possibilité d’obtenir de nouvelles ressources financières par la fiscalité. Ce groupe pourrait présenter ses premières conclusions d’ici le sommet sur le financement de l’action climatique organisé par le Kenya en septembre 2023.
• Lors de la 80e session du Comité de protection du milieu marin de l’Organisation maritime internationale (OMI) (3-7 juillet 2023), 23 pays2 et organisations régionales se sont engagés à adopter une stratégie révisée de l’OMI concernant les émissions de gaz à effet de serre afin de définir pour le secteur du transport maritime international une trajectoire conforme à l’objectif de limitation de l’élévation de la température mondiale à 1,5° C. Ils ont également soutenu l’adoption du principe d’un prélèvement sur les émissions de gaz à effet de serre de ce secteur, dans le cadre d’un ensemble de mesures visant à mettre en oeuvre cette stratégie, et ils ont souligné que les recettes de ce prélèvement devraient contribuer notamment à une transition juste et équitable du transport maritime. Cela représentera un aspect essentiel de la lutte contre les effets des changements climatiques. Les pays concernés sont également favorables au lancement avant la fin de 2023 d’une évaluation générale de l’incidence de l’ensemble de mesures agréées lors de la 80e session du Comité de protection du milieu marin, afin de les approuver en amendant dès que possible la convention MARPOL.
2. Barbade, Chypre, Commission européenne, Corée du Sud, Danemark, Espagne, France, Géorgie, Grèce, Ile Maurice, Iles Marshall, Iles Salomon, Irlande, Kenya, Lituanie, Monaco, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Slovénie Vanuatu, Vietnam.

4. MOBILISER DES RESSOURCES FINANCIÈRES SUPPLÉMENTAIRES PROVENANT NOTAMMENT
DU SECTEUR PRIVÉ

Les banques multilatérales de développement jouent un rôle fondamental pour soutenir les efforts de financement de projets confor-mes aux ODD afin de mettre en oeuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Leur évolution sera déterminante pour permettre des flux financiers supplémentaires répondant aux besoins des pays vulnérables et de la protection de la planète, conformément à l’objectif de 1,5° C et au cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal.
• À Paris, 30 pays et 8 banques multilatérales de développement ont entériné une déclaration sur une nouvelle vision des banques multilatérales de développement en les appelant à continuer de jouer un rôle clé en appui aux transitions justes et au développement durable dans le monde entier et à mettre en oeuvre une série de principes visant à tirer le meilleur parti des ressources du système financier international.
• La Banque mondiale et les autres BMD ont été invitées à élaborer de nouveaux projets de coopération entre elles, et à créer, en tant que de besoin, des plateformes communes permettant d’apporter davantage de soutien coordonné.
• Durant le Sommet, neuf banques multilatérales de développement ont publié une méthodologie commune sur la mise en conformité avec les objectifs de l’Accord de Paris. Le Groupe de la Banque mondiale a annoncé le lancement d’un processus pour mieux intégrer dans les nouveaux projets les effets du financement de l’action climatique dans les efforts d’adaptation et d’atténuation, et appelé les banques multilatérales de développement et d’autres membres de la coalition «Finance en commun» à lancer des initiatives analogues.
• La Commission européenne et l’initiative «obligations vertes» de la Banque européenne d’investissement ont pour objectif de fournir une assistance technique et 1 milliard d’euros pour réduire les risques des instruments sur les marchés de capitaux afin de mobiliser 15 à 20 milliards d’euros pour des investissements durables.
L’ampleur des investissements nécessaires pour que la lutte contre les changements climatiques permette de respecter l’objectif de 1,5°C et que les ressources mondiales en matière de biodiversité soient préservées suppose que les flux de financements privés soient bien orientés avec des consultations ex-ante et une coordination avec le secteur privé. Garantir à tous un accès égal et plus stable, à un coût abordable, aux capitaux et aux liquidités est essentiel pour financer la transition climatique et énergétique au cours de la prochaine décennie.
Parmi les facteurs clés pour réussir dans ce domaine doivent figurer les mesures et les outils réglementaires favorisant les stratégies d’investissements verts grâce à la transparence en matière d’information et à l’accès à des données vérifiables, ainsi que les stratégies de réduction des ris-ques et de la perception des risques liés aux projets changeant la donne pour les populations, la nature et le climat. Le système financier international a entrepris une évolution prudentielle majeure pour asseoir sa stabilité après la crise de 2008. Le moment est venu d’évaluer l’incidence et les conséquences de ce cadre réglementaire afin de repérer et de supprimer les éventuels freins, non intentionnels et non justifiés, à la mobilisation des capitaux privés internationaux en faveur des pays en développement. En particulier, l’innovation doit mieux prendre en compte les mécanismes innovants de partage du risque déployés par les acteurs financiers et notamment par les banques publiques de développement.
• Les partenaires ont encouragé les BMD à étudier et éventuellement adopter des paramètres harmonisés pertinents pour mesurer la mobilisation des capitaux privés et à intégrer des objectifs quantifiés au niveau institutionnel dans leurs indicateurs clés de performance mais aussi au niveau de leur encadrement et de leur personnel en introduisant des indicateurs et des primes spécifiques d’efficacité fondés sur la performance.
• Lors du Sommet, le Groupe de la Banque mondiale a lancé le laboratoire pour les investissements du secteur privé afin de concevoir et de déployer rapidement à grande échelle des solutions pour remédier aux obstacles qui empêchent le secteur privé de réaliser des investissements d’échelle dans les pays émergents et en développement, en gardant l’énergie renouvelable et les infrastructures énergétiques au coeur des préoccupations.
• La plateforme publique de données relatives à l’absence d’émissions nette (NZDPU) soutenue par les Nations Unies et par de multiples parties prenantes a annoncé son intention de lancer lors de la COP28 un répertoire central, ouvert et gratuit de données permettant à toutes les parties prenantes d’avoir facilement accès aux données clés relatives à la transition climatique, aux engagements et aux progrès effectués par les entreprises et les institutions financières dans la mise en oeuvre de ces engagements.
• Le Conseil des normes internationales d’information sur la durabilité a publié en juin 2023 son référentiel mondial d’informations sur la durabilité à l’intention des marchés de capitaux, prenant en compte les besoins spécifiques des économies émergentes et en développement afin de veiller à la bonne adoption de ces normes dans les différentes juridictions.
• L’Agence multilatérale de garantie des investissements a annoncé qu’elle ouvrirait le dialogue avec les autorités de régulation financière, notamment le Conseil de stabilité financière, afin d’intégrer les garanties proposées par les BMD dans les modèles prudentiels.
• Les BMD et les institutions de financement du développement pourraient s’efforcer de développer leurs instruments d’atténuation des risques de change pour remédier aux enjeux liés aux risques croissants de change sur les marchés en développement.
• Quarante pays ont exprimé leur volonté de déployer la plateforme SOURCE, composante clé du financement et de l’étiquetage de l’infrastructure de qualité, notamment grâce à des initiatives telles que Fast-Infra. L’International Develo-pment Finance Club (IDFC) a été encouragé à renforcer les capacités des banques publiques de développement et des acteurs locaux pour la conception et l’élaboration de projets durables et viables sur le plan financier, en s’appuyant sur la réussite du mécanisme d’assistance technique sur le climat de l’IDFC. En outre, l’Alliance pour des infrastructures vertes en Afrique a reçu un soutien financier et technique de la part de bailleurs et d’institutions financières afin de préparer des projets en amont et de mobiliser des capitaux pour le développement destinés à des investissements du secteur privé en Afrique, et il pourrait être utile d’étudier la possibilité d’apporter d’autres aides.
• La nécessité de renouveler les initiatives pour mieux évaluer le niveau actuel des risques associés aux projets dans les pays en développement a été soulignée et des données supplémentaires seront communiquées aux investisseurs privés à cet effet. La Banque européenne d’investissement (BEI) a annoncé des avancées concrètes vers la transformation de la base de données mondiale sur les risques des marchés émergents (GEMs 2.0), afin de faciliter l’accès des agences de notation et des investisseurs privés aux statistiques de cette base. Cela pourrait constituer une étape majeure pour accroître la transparence et la prévisibilité des notations financières.
• L’Agence internationale de l’Énergie émettra au début de 2024 des recommandations sur la manière de réduire le coût du capital pour la transition énergétique dans les pays en développement.
• Le Conseil de stabilité financière, par le dialogue entre ses membres et avec ses groupes consultatifs régionaux, continuera d’aborder la question des enjeux financiers avec les pays en développement, tout en mettant en oeuvre sa feuille de route pour faire face aux risques financiers liés aux changements climatiques.
• Lors du Sommet, la Société financière internationale, la France et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement ont promis un appui supplémentaire à l’Alliance pour l’entrepreneuriat en Afrique.
• La mise en place par les banques multilatérales de développement de processus simplifiés et accélérés d’approbation des financements pour les petits projets du secteur privé dans les pays à faible revenu a été identifiée comme un moyen possible d’améliorer et de faciliter l’accès aux financements nécessaires.
• La mise en place de stratégies nationales pour soutenir le développement du secteur privé dans les politiques publiques et de planification du développement des pays à revenu faible et intermédiaire a été identifiée comme étant un fort accélérateur et facilitateur de l’accès aux financements.
• L’OCDE pourrait organiser d’ici la fin de 2023 un groupe de travail pour échanger sur les progrès, partager les informations et évaluer les bonnes pratiques en matière de mobilisation des financements du secteur privé au service du développement durable, de la lutte contre les changements climatiques et de la protection de la biodiversité. Les travaux de ce groupe de travail s’appuieront sur les recueils de données de l’OCDE en matière économique, d’investissement, de développement, d’environnement, de biodiversité et de climat. Le groupe pourra utilement compléter le cadre de Soutien public total pour le développement en favorisant des échanges aux niveaux politique et opérationnel entre les membres intéressés de l’OCDE concernant les résultats et l’incidence relevés en matière de mobilisation des financements privés.
Un mécanisme de suivi sera mis en place pour assurer le suivi des progrès tous les six mois. Un bilan des progrès accomplis et des objectifs atteints sera organisé en 2025.