Diaz-Canel : «le G77 + la Chine et les Brics ont l''opportunité de générer une transformation historique»

Le Premier secrétaire du Comité central du Parti communiste et président de la République de Cuba, Miguel Diaz-Canel Bermudez, a participé jeudi aux sessions du 15e Sommet des Brics, en Afrique du Sud. Le président a notamment souligné les responsabilités des deux organisations dans la résolution des défis actuels auxquels l''humanité est confrontée et le rôle qu''elles sont appelées à jouer à cet égard.

«Les pays membres du G77 + la Chine et des Brics ont l''opportunité de générer une transformation historique. Dans l''intérêt des générations futures, agissons !». C''est par cette phrase urgente et audacieuse que le Premier secrétaire du Comi-té central du Parti communiste et président de la République de Cuba, Miguel Diaz-Canel Ber-mudez, a conclu son discours lors de la dernière session du 15e Sommet des Brics qui s''est tenue jeudi 24 août 2023.
Le chef d''État a considéré comme un «grand honneur et un privilège» la participation de Cuba, en tant que président pro tempore du Groupe des 77 et de la Chine, à ce Sommet des Brics, un mécanisme d''intégration qui, de par sa nouveauté et sa diversité, ouvre des perspectives et des espoirs sur la voie du renforcement du multilatéralisme, qui est aujourd''hui aussi urgent qu''essentiel pour le destin même de l''Humanité.
Le président a également souligné l''importance du fait que «cet événement se déroule sur le sol africain, berceau d''une partie de nos ancêtres, qui nourrit profondément l''essence même de l''identité cubaine», car, comme le veut un dicton bien connu sur ce continent : «Les empreintes de ceux qui ont marché ensemble ne pourront jamais être effacées». Cuba n''oublie pas, pas plus que l''Afrique, la solidarité partagée et le sacrifice de tant de personnes sur ces terres. Dans le cas de Cuba et de l''Afrique du Sud, comme l''a rappelé le président Diaz-Canel, les traces de l''amitié «sont aussi solides et indélébiles que la mémoire des dirigeants historiques de nos nations. Nous n''oublierons jamais l''étreinte de Nelson Mandela et de Fidel Castro lorsqu''ils se sont rencontrés ici et qu''ils ont demandé à se retrouver, comme cela ne se produit qu''entre de véritables frères».
Le président cubain s’est félicité de la participation à ce Sommet des Brics du Groupe des 77 et de la Chine, le groupe le plus important et le plus diversifié de nations en développement. «Nous sommes 134 pays, les deux tiers des membres des Nations Unies, où vit près de 80% de la population mondiale, confrontés aux défis colossaux d''un monde de plus en plus inégalitaire, où l''exclusion et la pauvreté se sont multipliées après deux années de pandémies, suivies de conflits dramatiques».
Après avoir évoqué les multiples défis auxquels les nations du Sud ont été confrontées au cours des dix dernières années et leurs conséquences pour leurs peuples, le chef de l''État a insisté sur le fait que «si nous n''agissons pas immédiatement, nous léguerons à nos enfants et petits-enfants une planète non seulement méconnaissable pour ceux d''entre nous qui viennent du siècle précédent, mais hélas condamnée à devenir inhabitable».
Face aux perspectives décourageantes associées à la réalisation des Objectifs de développement durable de l''Agenda 2030, le président cubain a qualifié d''inefficace l''ordre international conçu par les pays développés de l''Occident et les grandes transnationales, car il ne tient absolument pas compte des progrès des nations du Sud.
«Le G77 et les Brics ont la responsabilité et la possibilité d''agir pour changer cet ordre mondial injuste. Ce n''est pas une option, c''est la seule alternative», a-t-il souligné. Il a rappelé que le G77, tout comme les Brics, avait demandé historiquement d''entreprendre une «véritable transformation de l''architecture financière internationale, qui est profondément injuste, anachronique et dysfonctionnelle».
Dans ses remarques, le président Diaz-Canel a également salué l''élargissement éventuel des Brics, qui contribuera à renforcer leur pertinence et leur représentativité ; par ailleurs, il a salué «de manière particulière la nomination de la chère Dilma Rousseff à la tête de la Nouvelle Banque de Développement créée par les Brics».
«L''extension de ce mécanisme à d''autres pays contribuerait certainement à atténuer les déséquilibres du système monétaire actuel», a ajouté Diaz-Canel, qui a estimé que plusieurs des initiatives proposées dans ce sens, si elles étaient appliquées dans les relations avec d''autres pays en développement, pourraient réduire «le monopole abusif de la monnaie des États-Unis, qui renforce et garantit une hégémonie préjudiciable au reste du monde».
Le président de Cuba a également commenté les multiples actions communes que les Brics et le G77+Chine peuvent entreprendre, parmi lesquelles il a souligné la valeur stratégique d''une coordination efficace entre les deux organisations sur le changement climatique. «Lors de la COP28, qui aura lieu cette année à Dubaï, se tiendra pour la première fois un sommet des dirigeants du G77, convoqué par Cuba, afin de renforcer la coordination stratégique», a-t-il rappelé. Il a également invité les personnes présentes à participer au prochain sommet des chefs d''État et de gouvernement du groupe des 77 et de la Chine sur la science, la technologie et l''innovation en tant que prémisses du développement, qui se tiendra les 15 et 16 septembre à La Havane.
«Pour avancer vers un avenir plus juste et plus durable, le temps de l''action collective n''est pas demain. C''est maintenant», a souligné Diaz-Canel, qui a réitéré sa conviction «du pouvoir de l''unité dans la diversité». Il est temps, a-t-il dit, d''agir ensemble «pour défendre des revendications historiques qui, faute d''avoir été prises en compte à temps, ont multiplié les problèmes auxquels nos nations sont confrontées aujourd''hui».
Assumons, a-t-il insisté devant l''assistance, tous les «préceptes de la sage philosophie humaniste africaine de l''Ubuntu, l''éthique de l''attention à l''autre qui, face à l''égoïsme et à l''individualisme, promeut une vie de solidarité, de fraternité et de respect, dans laquelle personne n''est laissé pour compte».
LE SUD MONDIAL :
UNE VOIE MULTILATÉRALE
ET INCLUSIVE
Après trois journées de travail, les cinq pays du Brics mettent un terme, dans cette ville, la moderne Johannesburg, à un sommet, le quinzième, susceptible de catalyser la voie tant attendue mais insaisissable pour parvenir, le plus tôt possible, au monde multilatéral et inclusif dont l''humanité et la planète ont tant besoin, car la dimension environnementale est intrinsèque à tout avenir, à commencer par le plus proche, une question essentielle qui est également un principe sine qua non pour ce groupe.
Jeudi matin, dans la salle réservée aux conférences de presse du Centre des congrès de Sandton, lieu de la réunion, les dirigeants des pays Brics -Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud- ont présenté la déclaration finale et résumé les résultats de la réunion.
Le plus spectaculaire des accords, bien qu''attendu, a été l''annonce, quelques heures plus tôt, de l''élargissement du groupe qui, à partir du 1er janvier 2024, comprendra également l''Arabie saoudite, l''Argentine, l''Égypte, les Émirats arabes unis, l''Éthiopie et l''Iran. Les Brics représentent actuellement 30% du Produit intérieur brut (PIB) mondial et 42% de la population mondiale. Dès l''année prochaine, leur PIB dépassera 36% et leur population approchera 44%.
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa a salué l''élargissement ; son homologue chinois Xi Jinping a déclaré qu''il s''agissait d''une décision historique : «C''est un autre signe», a-t-il affirmé, «de la décision des Brics de s''unir et de coopérer, mais maintenant dans un cercle plus large de pays, de pays en développement». Cette détermination, a-t-il ajouté, répond aux attentes de la communauté internationale et aux intérêts communs des marchés émergents. Pour le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, le fait que tant de pays (il y en a plus de vingt), y compris ceux qui vont adhérer maintenant, expriment leur intérêt à rejoindre les Brics, démontre la pertinence de ce concert de nations.
«Notre diversité renforce la lutte pour un nouvel ordre qui tienne compte de la pluralité économique, géographique et politique au 21e siècle», a indiqué Lula da Silva. Outre le consensus entre les cinq premiers Brics pour élargir le groupe, ses dirigeants ont progressé sur les conditions d''établissement d''une monnaie commune et d''autres liens dans les domaines de l''économie, du commerce international -pour lequel ils favorisent l''utilisation des monnaies nationales-, de la politique, de l''environnement...
D''un point de vue symbolique, le grand intérêt suscité par ce 15e Sommet des Brics, auquel ont été invités plus de 60 chefs d''État et de gouvernement de ce que l''on appelle le «Sud mondial», n''est pas non plus passé inaperçu dans le monde. Dans la déclaration finale de la réunion, qui compte plus de 26 pages, les Brics soulignent leur défense du multilatéralisme, parmi de nombreux autres postulats et positions, et expriment leur inquiétude face à l''utilisation de mesures coercitives unilatérales, qui -insistent-ils- sont incompatibles avec les principes de la Charte des Nations unies et produisent des effets négatifs, en particulier dans les pays en développement.
Auteurs : René Tamayo León | Yaima Puig Menesesn