Les élus de la Guadeloupe sont-ils des agoraphobes politiques ?

Dans la sphère de la pensée politique, il existe deux concepts sociaux philosophiques qui se posent en opposition : L’agoraphobie politique et l’agoraphilie politique.
Ils ont été développés dans un livre écrit et publié en 2016 par Francis Dupuis-Deri, Chercheur et Professeur politiste à l’université de Montréal au Canada : «La peur du peuple : Agoraphobie et Agoraphilie politiques».
Dans cette étude que tous ceux qui s’intéressent à la gouvernance des sociétés humaines et à la question de l’exercice du pouvoir gagneraient à s’approprier, il ouvre un débat à partir de ces interrogations : Est-ce que le pouvoir est un bien commun ou le monopole d’une élite ? Le peuple, est-il inapte à l’autonomie politique ? Quelle place accordée à la démocratie participative ou délibérative ?
Pour clarifier les enjeux philosophiques et politiques de ce débat, il s’emploie à définir les deux concepts qu’il a exposés en ces termes :
• L’agoraphobie politique, c’est la peur ou la haine du peuple assemblé à l’agora pour délibérer et se gouverner
• L’agoraphilie politique, c’est l’amour du peuple assemblé à l’agora.
Dans la société, la traduction de ces deux concepts s’exprime sans équivoque. Qu’en est-il chez nous en Guadeloupe ? La pratique de ceux qui gouvernent les collectivités renvoie indiscutablement à un comportement d’agoraphobie politique. La tendance affirmée ces derniers temps, c’est l’administration des affaires du pays en dehors de la participation du peuple social.
Les élus affichent la prétention de co-construire avec les Guadeloupéens un projet de statut politique pour le pays, ils organisent un simulacre de concertation encadrée par une commission ad hoc composée des mêmes élus accompagnés de quelques spécialistes auto proclamés, cooptés, qui n’ont rien à voir avec ce peuple social. Ils n’ont pas le courage d’ouvrir ce grand débat libre décidé à leur XVIIe Congrès, dans l’agora avec tous les Guadeloupéens ou leurs représentations.
Par peuple du peuple, il préfère laisser à une élite le pouvoir de décider de l’avenir de toute une communauté. Ce comportement d’agoraphobie politique se voit aussi dans cette démarche qui consiste à décider loin et hors contrôle du peuple des questions qui conditionnent sa vie et son avenir.
C’est l’objet de toutes ces expéditions sur le territoire français et ces promenades futiles et stériles dans les palais ministériels. C’est de la peur du peuple qu’il s’agit ici.
Dans un sondage réalisé par l’institut Qualistat au mois de juin de cette année, il ressortait déjà clairement que c’étaient les élus guadeloupéens qui craignaient le changement de statut. Mais toutes les manoeuvres qu’ils déploient depuis : colloque à l’université des Antilles et au Sénat sur l’évolution statutaire, conférence de Paris du GURS sur le statut, «cirage de pompes» au Congrès des maires de France et à la réunion du CIOM montrent très clairement que les élus guadeloupéens pratiquent l’agoraphobie politique, c’est-à-dire la peur du peuple.
Il faut mettre un terme à cette dérive pour faire avancer le concept d’agoraphilie politique qui assure au peuple le pouvoir de décider de ce qu’il désire collectivement.
Faisons vivre le «Bik a pèp Gwadloup», véritable agora pensé comme un espace de discussion où se rassemblent librement tous ceux qui veulent participer à l’élaboration de ce projet guadeloupéen, conçu démocratiquement par tout le peuple social.