Ils sont nos héros !

Ils sont morts en plein combat un 3 décembre, fidèles à leur idéal communiste, à leur Parti et à leur peuple. Les idées qu’ils ont défendues restent vivantes pour nous. Leur engagement dans l’action nous sert d’exemple et indique aujourd’hui encore la voie que nous devons suivre.

EUVREMONT GENE (4 juin 1920 3 décembre 1969)
SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU PCG DE 1964 À 1969
Le 3 décembre 1969, le camarade Euvremont Gène disparaît tragiquement, victime de la catastrophe aérienne du vol AF 242 au décollage de l’aéroport de Caracas au Venezuela. Il revenait d’une mission politique de la plus haute importance au Chili.
Euvremont Gène adhère jeune à Port-Louis, à la première organisation communiste créée en Guadeloupe à la fin de la 2de guerre mondiale. Au 3e congrès de 1964, il devint Secrétaire général de l’organisation. C’était un dirigeant reconnu du mouvement ouvrier et il avait une grande renommée sur le plan international.
SON DERNIER EDITORIAL
(Samedi 15 novembre 1969)
Seule une action populaire conséquente peut obliger le gouvernement à s’orienter vers les solutions humaines
que nous ne cessons de proposer. Par Euvremont Gène, Secrétaire général du Parti
Plus que jamais maintien du pays sur la voie
du sous-développement
Le 29 octobre, notre camarade député Paul Lacavé, est intervenu devant la Commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

. Il a notamment attiré l’attention de la Commission sur la gravité de la crise économique qui sévit ici et fait la démonstration que le budget pour 1970 traduisait «un renforcement de l’appareil administratif de l’Etat et non un effort d’investissement nécessaire pour favoriser les mutations économiques».
Il n’empêche, la Commission donnait un avis favorable à l’adoption des crédits des départementales d’Outre-mer, se caractérisant comparativement au budget de 1969 par une régression des dépenses en capital c’est-à-dire par une diminution des subventions d’investissement accordées par l’Etat, et un accroissement des dépenses de fonctionnement c’est-à-dire par l’augmentation des crédits devant servir au renforcement de l’appareil administratif et répressif. Ces dépenses sont en accroissement de 9% par rapport à 1969.
Ainsi face à la situation catastrophique du pays, le gouvernement n’envisage rien pour améliorer le marché du travail. Au contraire, il pousse plus avant la politique du mépris du Guadeloupéen. Il aggrave la discrimination dans la sécurité sociale, pour les allocations familiales (Projet de loi du 8 octobre 1969 concernant l’octroi d’une allocation exceptionnelle à caractère familial) et par la non application des lois sur le chômage.
Conserve l’écart entre les salaires de référence métropolitains et ceux payés ici, malgré la reconnaissance officielle du coût de la vie plus élevé qu’en France de 40%.
Favorise la fermeture des usines : Darboussier, Bonne-Mère, Sainte-Marthe, Gardel, Beauport, doivent être démantelées.
Mise sur le Bumidom et le service militaire adapté pour expatrier la jeunesse, l’encadrer, l’isoler des autres couches de la population et affaiblir la lutte anti-colonialiste.
Se prépare à reprendre le fameux projet de Département-Région.
Car, la France qui a consenti à la décolonisation de territoires plus vastes et plus riches entend rester coûte que coûte sur cette «poussière» pour des raisons de stratégie militaire.
L’AERODROME DU RAIZET : UN RELAIS ATOMIQUE
Qu’on se rappelle de la déclaration du général Ravault D’Allonges commandant inter-armé du groupe Antilles-Guyane explicitant la politique véritable du gouvernement ici : «… l’aérodrome du Raizet, a-t’il déclaré, est le seul et indispensable relais entre la France et les bases atomiques du Pacifique. L’importance de ce relais justifie à lui seul les efforts que nous fournissons…». «C’est sur la réussite ou l’échec aux Antilles que peut s’épanouir ou butter la politique étrangère de la France…». «Mieux vaut donc prévenir que d’avoir à pratiquer la chirurgie». «La Défense nationale est ici, précise Ravault D’Allonges une affaire de prévention coordonnée par le gouvernement, animée par le préfet…». C’est claire, c’est net !
C’est donc l’aérodrome du Raizet, un maillon de l’ensemble nucléaire de la France, qui intéresse le gouvernement, et non les Guadeloupéens sur lesquels il est prêt à faire «pratiquer la chirurgie» traduisez l’extermination pour rester maître de son «seul et indispensable relais atomique».
Et, tous les Bernier et les Ludger, tous les béni-oui-oui et les «j’applaude» inconditionnels de la départementalisation-colonisation, tous les caméléons qui sciemment prennent les conséquences de notre sous-développement pour les causes, tous les gauchistes qui s’appliquent à diviser la classe ouvrière, à dévoyer l’action anti-colonialiste sont les complices de la politique abominable des gouvernants français.
Ce sont les rapports colonialistes qui entretiennent le sous-développement. Il convient de les briser. En les brisant nous créerons la condition nécessaire pour mettre fin à cette situation de misère par la réforme agraire, l’industrialisation, une superstructure politique guadeloupéenne populaire qui libéreront les forces productives matérielles et humaines.
Pour y parvenir porter chaque jour, toujours plus haut, le niveau de la lutte contre fait colonial : le chômage, les discriminations, l’humiliation, le mépris, la dépersonnalisation.
PAUL LACAVE (13 décembre 1913 3 décembre 1976)
MAIRE ET CONSEILLER GÉNÉRAL JUSQU’EN 1976
Paul Lacavé adhère à Capesterre Belle-Eau à la première organisation communiste naissante en 1944. Bien avant, il était déjà aux côtés des ouvriers en lutte contre l’exploitation et les violences des capitalistes usiniers. Il est élu maire et conseiller général de la commune et le restera jusqu’à sa mort en 1976.
De 1967 à 1973, il est député de la 2e circonscription de la Guadeloupe. Victime d’un infarctus du myocarde au retour de «l’évacuation Soufrière» il décède le 3 décembre 1976, plongeant dans le deuil Capesterre et toute la Guadeloupe. Son nom reste à jamais gravé dans la mémoire des Capesterriens.
SON INTERVENTION À L’ASSEMBLÉE NATIONALE
(le 9 novembre 1968)
Si vous aviez affecté à certains équipements comme nous le demandons depuis plusieurs années, les crédits consacrés à l’immigration, beaucoup de problèmes seraient résolus. Si toutes ces sommes, destinées à l’immigration, avaient été affectées sur place, aux Antilles, à des investissements publics, votre budget eut été tout simplement plus conforme aux réalités.
Si le «capital s’était déplacé vers l’homme et non l’homme vers le capital», autrement dit si ces capitaux avaient été affectés aux Antilles, notre problème aurait été résolu. Ce problème, c’est celui du sous-emploi et de la création d’emplois nouveaux générateurs d’une impulsion économique.
Votre budget eut alors esquissé un effort sincère en vue de la résolution des problèmes locaux. Mais tel qu’il se présente, il ne résout rien et n’offre l’espoir d’aucun règlement. Car à travers tout cela, quelle solution proposez-vous aux travailleurs antillais qui, victimes de la concentration des usines, sont totalement privés d’emploi ?
Quelles solutions envisagez-vous, Monsieur le Ministre pour les petits planteurs et les colons qui ne savent pas encore à quel prix sera fixé la tonne de canne ?
Quelles garanties apportez-vous à ces malheureux qui, sans perspective nouvelle, se sont jetés dans la plantation de la banane ?
Enfin quelles solutions, autres que celle de l’immigration offrez-vous à cette jeunesse livrée au chômage, qui risque un jour, pour la défense de ses légitimes revendications de libérer une juste colère ?
La raison de tous ces errements qui fourmillent dans ce budget vient du fait qu’en 1968, comme avant-guerre, comme autrefois, une volonté excessivement centralisatrice anime votre politique.
De Paris ou plus précisément des bureaux de l’ancien ministre des Colonies, on veut régler dans tous leurs détails les problèmes qui se posent aux Antilles, à 7 000 kilomètres de là.
Or, il est incontestable que la Guadeloupe, comme les autres Antilles, présente, par son peuplement, son économie, son environnement géographique, des caractères intrinsèques, très différents de ceux de la Métropole.
D’ailleurs, notre préoccupation autonomiste, vieille de plusieurs années, était à ce point judicieuse que, sous couvert de régionalisation, le gouvernement l’a reprise à son compte. Alors pourquoi différer pour les Antilles ce qu’il prépare pour ses régions ?
Le Statut d’Autonomie, dans le cadre de la République française est une solution viable pour la Guadeloupe et les autres départements d’outre-mer. Seule, elle permettra de sauvegarder l’union avec la France. Seule, elle permettra aux populations locales maîtresses de leur destin, d’harmoniser des solutions conformes aux réalités de leur pays.
Dans les Caraïbes composées aujourd’hui exclusivement d’Etat autonomes ou indépendants, le statut politique de la Guadeloupe et de la Martinique semble être un défi lancé à la situation géographique et aux réalités économiques. Dire de la Guadeloupe qu’elle est la France, c’est prôner une fiction qui s’effondrera comme les autres.
Seule au contraire, la politique d’autonomie, en union avec la France que nous préconisons est capable d’affronter les réalités et de promouvoir aux Antilles un ordre social basé sur l’équité et la dignité.