Le Xe congrès du Parti Communiste Guadeloupéen

Il y a trente-deux ans, le 13 décembre 1991, dans la salle Gratien Archimède à Petit-Canal, Florent Mitel, maire communiste de la commune à l’époque, ouvrait le Xe congrès du Parti Communiste Guadeloupéen. Ce congrès qui allait duré trois jours les 13, 14 et 15 décembre affichait comme mot d’ordre : «Un Parti Communiste, moderne, uni, influent, rassembleur» s’est déroulé dans un climat de résistance et de reconstruction face au défi d’anéantissement du Parti lancé par les déserteurs. Ce Xe congrès représente incontestablement une étape importante dans l’histoire du Parti.

DES EXTRAITS DE LA RESOLUTION POLITIQUE ADOPTEE PAR LES CONGRESSISTES
NOS PROPOSITIONS
POLITIQUES
Depuis longtemps les Communistes proclament l’existence d’une nation guadeloupéenne, distincte de la nation française. Cette thèse a été reprise et défendue par de nombreux compatriotes. Elle est admise par une fraction de plus en plus importante de l’opinion guadeloupéenne. C’est qu’en effet, il existe bel et bien une communauté d’hommes et de femmes historiquement constituée à travers différents mouvements de peuplement, ayant des intérêts économiques communs et liés par une vie culturelle spécifique. Cette collectivité, irréductible à tout autre, a des droits imprescriptibles reconnus par la communauté des nations à tout peuple : droit à un territoire, à un pouvoir national indépendant, au développement économique et à l’instauration d’une société de son choix. Elle est la seule habilitée à exercer ses droits et à choisir son destin de peuple.
• Le Parti Communiste Guadelou-péen, historiquement pour un pouvoir guadeloupéen et un changement de société
La transformation de la Fédération du PCF, (elle-même issue de la région communiste de 1944) en Parti Communiste Guadeloupéen en 1958 mettait en évidence la différence entre la Guadeloupe et la France et aussi l’existence d’une communauté guadeloupéenne distincte de la nation française

. Les orientations proposées dès le début au peuple guadeloupéen ont toujours été très claires : l’instauration d’un pouvoir guadeloupéen, la construction d’une société socialiste. Le contenu de ces orientations a évolué avec le temps, pour tenir compte de la situation réelle du pays et de l’état d’esprit du peuple guadeloupéen. De «l’autonomie dans le cadre de la République française», puis «autonomie démocratique et populaire», avant d’être elle-même une étape sur la voie d’une indépendance à contenu socialiste pour arriver à la formulation du IXe Congrès de mars 1988 : «Vers une Indépendance nationale à orientation socialiste, selon des étapes choisies démocratiquement par le peuple guadeloupéen», il y a la même démarche théorique et politique.
L’originalité de la démarche réside dans le fait que le Parti, à chaque étape, a proposé au peuple guadeloupéen une revendication théoriquement juste (le droit à la séparation des nations opprimées), politiquement réaliste en ce sens que tout en ralliant l’adhésion déterminée de la fraction la plus lucide des Guadeloupéens de progrès, elle permet de rassembler et de mobiliser toutes les victimes du colonialisme.
Il ne pourra y avoir un vrai développement du pays sans récupération du pouvoir de décision par les Guadeloupéens, sans sortir du cadre actuel qui recouvre en fait des rapports de colonisation.
• Vers une Indépendance nationale à orientation socialiste selon des étapes choisies démocratiquement par le peuple guadeloupéen
Le PCG s’appuyant sur l’analyse de la situation interne et externe, sur l’expérience des luttes qui se sont développées dans le pays et sur l’impérieuse nécessité de rompre tous rapports de colonisation pour avancer sur la voie du développement et du progrès social, estime juste de formuler l’objectif de la lutte du peuple guadeloupéen comme suit : vers une Indépendance nationale à orientation socialiste selon des étapes choisies démocratiquement par le peuple guadeloupéen. Ce mot d’ordre correspond parfaitement à la situation dans notre pays aujour-d’hui, et il ouvre des perspectives de luttes et de rassemblement.
Il contribue à développer la cons-cience nationale, à démythifier la revendication d’indépendance et à préparer les esprits aux changements.
L’indépendance à orientation socialiste selon des étapes démocratiquement choisies par le peuple guadeloupéen exprime clairement notre volonté de marcher à notre rythme, de ne pas chercher de modèles. Il faudra, compte tenu de notre formation socio-historique et du niveau de développement du pays, passer par des étapes intermédiaires avant d’accéder à la pleine souveraineté et nous engager dans la construction d’une société nouvelle. Le Parti Communiste Guade-loupéen, fidèle à ses orientations démocratiques, n’entend imposer aucun choix, aucune étape, aucune échéance à la lutte du peuple guadeloupéen ; C’est le peuple, et lui seul qui, en toute responsabilité, choisira, et à son rythme, les étapes par lesquelles il doit passer pour atteindre sa totale souveraineté.
• A l’étape actuelle, un statut politique spécifique
Depuis la ratification de l’Acte unique européen de 1986, le PCG développe inlassablement une campagne dans le pays pour mobiliser et rassembler les énergies contre les dangers du grand marché de 1993. La volonté d’apporter une réponse politique à cette nouvelle agression de l’Europe des douze prend corps et se renforce.
La revendication d’un statut politique spécifique dans le cadre de la République française, formulée par le Parti depuis 1988, gagne du terrain. Ce statut qui a pour base juridique l’article 72 de la Constitution française permettra de sortir du carcan départemental, de supprimer les deux Assemblées et d’ériger la Guadeloupe en une nouvelle collectivité territoriale avec des compétences plus élargies que celles cumulées du Conseil général et du Conseil régional. Elle aura compétence pour négocier les relations de coopération avec l’Europe.
Ce changement de statut exige le rassemblement majoritaire de tous les Guadeloupéens qui s’opposent à l’intégration au marché unique européen. Après les avancées significatives des Etats Généraux de juillet 1989, force est de reconnaître que le mouvement marque le pas et que l’Europe Communautaire se construit à grande vitesse. Le PCG réaffirme sa volonté d’oeuvrer pour arracher un Statut Spécifique, conformément à sa proposition de loi n° 1550 déposée sur le Bureau de l’Assemblée nationale par le Groupe Communiste.
• Une société de justice, de fraternité et de démocratie
Le Parti Communiste Guadelou-péen ne limite pas son action à la prise du pouvoir. Son objectif c’est la transformation de la société ; c’est l’instauration à terme d’une société fondée sur la justice, la fraternité vraie, la sécurité pour tous et la légalité. La société que nous voulons construire aura les caractéristiques suivantes :
- Un socialisme démocratique, respectueux des règles de légalité, assurant la liberté à chacun, augmentant les libertés publiques et collectives dans la cité et sur les lieux de travail, donnant la parole et le pouvoir effectif au peuple, refusant l’utilisation de l’appareil administratif pour diriger les consciences ;
- Un socialisme édifiant une véritable économie de production, s’appuyant sur l’intervention des pouvoirs publics et d’entreprises, propriétés du peuple guadeloupéen tout entier, dans le cadre de Plans de Développement élaborés démocratiquement par les forces vives et les acteurs économiques du pays, mais préservant un secteur privé et coopératif large, diversifié, concurrentiel, non monopoliste ;
- Un socialisme assurant une vraie justice et une vraie égalité sociale entre les composantes multiples de la nation guadeloupéenne ;
- Un socialisme «à la guadeloupéenne» respectant et renforçant nos traditions culturelles, nos acquis sociaux, nos diversités ethniques, nos relations internationales privilégiées mais sur des fondements nouveaux.