Beauport : Hommage au patriarche Fernand Bernard

Monsieur Fernand Bernard est l’un des rares vétérans de l’usine de Beauport qui du haut de ses 94 ans, soit encore en vie, tout en ayant bon pied, bon oeil. Après de nombreuses années de bons et loyaux services au sein de cette usine et tout particulièrement en tant qu’ouvrier distillateur, (car il faut rappeler que toutes les usines en dehors du sucre et de la mélasse qui en découlait, produisaient du rhum destiné à l’exportation et de l’alcool à 90° pour les pharmacies et autres) poste qu’il a occupé jusqu’à la fermeture de cette dernière en juin 1990. Il jouit aujourd’hui d’une paisible retraite, entouré de l’affection et de l’amour de sa famille dont sa femme Mireille, ses dix enfants, ses seize petits-enfants et ses treize arrière-petits-enfants.
Autrefois, dans les différentes usines sucrières de la Guadeloupe, il y avait une tradition, qui se perpétue encore de nos jours, qu’on peut voir au niveau de l’usine Gardel du Moule, à la Sucrerie Rhumerie de Marie-Galante et sur le site de l’ancienne sucrerie de Beauport

. Cette tradition, bien ancrée chez les ouvriers, consistait à célébrer une messe et réaliser un programme de fête, durant les premiers jours du mois de décembre en l’honneur de la Saint-Eloi, qui symbolise le patron des ouvriers et des métallurgistes. Cha-cun en fonction de ses cro-yances, implorait les bonnes âmes pour que l’usine soit restaurée, réparée, remise en état dans le bon timing, tout en souhaitant que tous les ouvriers soient en santé et opérationnels pour démarrer la récolte le jour J.
Dans le Nord-Grande-Terre, la perfidie de certains élus politiques de la Guadeloupe, notamment ceux siégeant au niveau du Conseil Général de l’époque, ne sera jamais effacée des mémoires, depuis la disparition de Beauport. Tout un chacun se rappelant qu’ils avaient obligé la SCOOP (Société Coopérative Ou-vrière de Production) qui avait en charge la gestion de l’usine à déposer son bilan pour soit-disant mettre en place un plan de restructuration de la filière. Ce faisant, le glas définitif de l’usine de Beauport en tant qu’unité de production sucrière avait sonné.
C’est pour faire revivre les nombreux souvenirs et anecdotes autour de ce poumon économique, que fut jadis l’usine de Beauport dans la région, que les amis et les anciens ouvriers de Beauport ont créé l’association du même nom, présidée par l’infatigable et dynamique Emilienne Siounandan dite Mémé. Chaque année l’association perpétue la célébration de la messe suivie d’un dépôt de gerbes sur la stèle érigée en mémoire des ouvriers de l’usine décédés dans l’exercice de leur métier.
Lors de l’édition de cette année 2023, l’association, en collaboration avec la SEM Patrimoniale gérant le site de Beauport pour le compte du Département, a décidé de mettre à l’honneur Fernand Bernard, qui de tout temps est un fidèle des rendez-vous annuels de la St-Eloi. En compagnie bien sûr de sa famille et de ses proches, chacun a eu à raconter une anecdote retraçant la vie de Fernand Bernard. L’ancien député Ernest Moutoussamy présent, a eu à faire part de son émotion en ces lieux et en cette circonstance, tout en souhaitant longue vie à son confrère Fernand, à qui il est lié par une amitié de plus de soixante ans.
D’autres élus, dont le conseiller départemental Louis Galantine, qui n’est autre que le gendre du patriarche a manifesté sa fierté de bénéficier de l’amour et de la complicité d’une aussi grande et belle famille. Le député de la deuxième circonscription Christian Baptiste, également présent lors de cet hommage, était agréablement surpris par le parcours exemplaire de ce patriarche qu’il dit ne connaître qu’au travers de ses enfants mais qu’il salue avec bonheur aujourd’hui. Saisi par des témoignages tous aussi vivants que profonds, sur la vie de ce père de famille et sa respectabilité, il décida de lui décerner la médaille d’honneur de l’Assemblée Nationale.
Fernand Bernard, témoin vivant d’hier et d’aujourd’hui de l’histoire de la canne et du rhum, en dépit de ce bel hommage et du témoignage vibrant donné en son honneur par sa petite fille Laura, au nom de la famille, était du reste déjà immortalisé pour son exemplarité, à travers l’illustration de l’exposition permanente consacrée à l’usine de Beauport et à l’industrie sucrière, qu’il est permis à tout un chacun de voir sur le site
Derrière tout grand homme il y a toujours une femme dit-on. Longue vie, force et santé à Fernand Bernard auquel on ne peut s’empêcher d’associer son épouse Mireille !