VOUS AVEZ BIEN DIT “PEUPLES”, MONSIEUR LE MINISTRE ?

P renant la parole à la rencon- tre entre les parlementaires des «Outre-mer» et le Pre- mier ministre Jean-Marc Ayrault le mercredi 25 juillet 2012, le minis- tre des «Outre-mer» Victorin Lurel a déclaré : «Je tiens à vous remer- cier, Monsieur le Premier ministre, pour cette invitation qui est la marque d'une considération parti- culière pour les parlementaires des «Outre-mer» et, au-delà, pour les PEUPLES qu'ils représentent».

Vous avez bien lu : les PEUPLES. La majuscule est de nous, mais le prononcé de son discours fait foi. Lapsus, erreur de vocabulaire vou - dront penser certains ? Non, pas Victorin, pas le Ministre de laRépublique.

On peut être en désaccord poli- tique avec Lurel, lui reprocher ses choix politiques, mais pas d'être un inculte, quelqu'un de limite qui ne connait pas la signification des mots, qui ne sait pas ce que parler et écrire veut dire. Nous devons à la vérité de dire que c'est un homme de grande érudition. Il ne va pas lire un discours de cabinet, s'il ne l'a pas pensé intel lectuellement.

Nous sommes donc autorisés à croire, qu' intervenant dans le cadre de sa charge de Ministre, Victorin Lurel qui avait pris l'habitude de laisser entendre dans des conversations informelles que la Guadeloupe est une nation sans Etat, vient d'affirmer officiellement à la face de l'Etat français, identifié par son Premier Ministre, que les parlementaires qu'il recevait repré - sentaient des Peuples et non des populations, cyniquement camou- flés sous les vocables les plus extravagants : les Outre-mer, les Ultramarins, les Départements français des Amériques, les Régions ultrapériphériques etc… Ces parlementaires qui, dans leur grande majorité, étaient venus faire allégeance aux nouveaux maîtres de l'Etat ont-ils saisi la portée de cette déclaration ?

En tout cas, le Premier ministre oui ! Car, il n'a pas manqué de «tacler» le Ministre des «Outre-mer» en pré- cisant dans son discours en réfé - rence aux collectivités qui ont fait le choix de l'Autonomie : «Ces ter- ritoires sont, je le répète, dans la République française et leurs populations sont des Français à part entière».

Si le Ministre des Outre-mer, qui a mis le doigt volontairement ou malencontreusement sur un des éléments de la contradiction, continue à tirer sur la ficelle, le face à face sera inévitable.

Une telle perspective nous rappel- le l'évolution fracassante de l'an - cienne ministre de Jacques Chirac, Madame Lucette Michaux- Chevry, après son expérience de pouvoir, au cœur de l'Etat colonial. Cela a donné la Déclaration de Basse-Terre. En tout cas, si Victorin Lurel reconnaît qu'il existe dans tous ces pays encore sous domina - tion française, des peuples distincts du peuple français, il doit tirer les conclusions.

Il n'aura pas d'autres choix que d'inscrire son action dans un retour au préambule de la Constitution française de 1946, repris dans celui de 1958 qui décline clairement que : «La France s'engage à conduire les peuples qu'elle a pris en charge à la capacité de s'administrer euxmêmes», donc à choisir leur destin en exerçant leur droit à l'autodé termination. Que va-t-il se passer maintenant ? Nous sommes en sentinelles !