De la nécessaire organisation du mouvement anticolonialiste
«Je parle de millions d''hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d''infériorité, le tremblement, l''agenouillement, le désespoir, le larbinisme». A. Césaire
Et certains de parler des... bienfaits du colonialisme.
L''aventure criminelle qu''est la colonisation européenne débute avec ce qu''ils appellent les grandes découvertes. Poussés par le besoin d''étendre leurs territoires, ces conquérants sans foi ni loi, animés déjà de l''esprit d''être investis d''une mission civilisatrice souvent divine, vont envahir, dominer et coloniser des terres occupées entraînant destruction de civilisations et génocides.
Ces empires coloniaux distillent encore de nos jours leur venin suprématiste engendrant chez leurs adeptes, ces impressions de fierté, de grandeur et d''accomplissement que véhiculent des comportements hégémoniques empreints de volonté d''humilier, de mépriser et d''avilir et qui autorisent certains à parler des bienfaits de la colonisation.
Cependant dès la fin de la deuxième guerre mondiale, poussés par leur désir d''émancipation fondé sur le droit naturel à la liberté et aidés des idées de la Révolution d''octobre 1917, les peuples colonisés ont entrepris la lutte pour leur indépendance provoquant répressions, massacres et crimes de guerre. C''est ainsi que de l''Afrique à l''Asie, des peuples ont accédé à la souveraineté au prix d''immenses sacrifices.
Mais c''était sans compter sur la férocité de l''impérialisme financier qui règne de par le monde imposant un régime néocolonial montrant à l''évidence que la décolonisation formelle n''a pas du tout marqué la fin de l''histoire coloniale.
Aujourd''hui les luttes se poursuivent face aux violences caractérisées exercées par les menées néocolonialistes scélérates qu''imposent aux peuples sous domination, les puissances occidentales impérialistes et néolibérales.
Notre pays, la Guadeloupe fait partie de ces pays à décoloniser, à sortir des derniers confettis de l''empire colonial français. C''est un droit imprescriptible inscrit dans la charte des Nations unies et reconnaissant le droit des peuples à disposer d''eux-mêmes.
Le Parti communiste Guadelou-péen, dès 1958, lors de son congrès constitutif, a clairement posé un diagnostic sur la nature coloniale des rapports qui régissent nos relations avec la France. Signifiant ainsi que le peuple Guadeloupéen est un peuple différent du peuple français, il revendique un statut d''autonomie pour la Guadeloupe. Ce fut l''une des premières étapes de sa longue lutte aux côtés du peuple dans sa marche vers son émancipation et sa pleine souveraineté.
Attaqués de partout, vilipendés et diabolisés, les militants communistes ont payé un lourd tribut à leur indéfectible attachement aux idéaux de liberté et de justice sociale. Des événements qui ont jalonné ces luttes, la convention de Morne rouge regroupant en 1971 en Martinique les partis communistes et mouvements progressistes des quatre colonies françaises est peut-être celui dont le contenu pourrait servir d''éléments référents à l''indispensable organisation du mouvement anticolonialiste guadeloupéen.
Ainsi le document final concluait par cet appel au peuple plus que jamais d''actualité 53 ans après : «Par le programme politique, économique, social et culturel qu’elle implique, la lutte pour l’autonomie peut et doit rassembler toutes les forces démocratiques des pays concernés. C’est la raison pour laquelle, les partis et organisations signataires appellent tous les démocrates, tous les honnêtes gens de leurs pays à réaliser un front uni contre le colonialisme, pour la libération et le développement, quelles que soient leurs opinions philosophiques et religieuses».
Il apparaît clairement que pour avancer à visage découvert dans ce combat salutaire, chacun doit faire montre de clairvoyance et d''intelligence révolutionnaire pour comprendre que seule l''unité pourra nous forger et nous permettre de nous intégrer en une force effective, capable de créer sa propre progression et d''apporter à chaque étape une précieuse contribution à l''avancée de la lutte.
Il paraît tout aussi évident que si le problème n''est pas abordé sous l''angle de la constitution d''un front commun, nous risquons de perdre notre temps en marchandage et arguments non productifs.
Le combat contre l''ennemi commun ne doit pas être un lieu de mémoire où chacun vient conter ses exploits et mettre en avant les nécessaires divergences qui font la force et la richesse du mouvement.
Les militants anticolonialistes n''ont plus le droit d''apporter le moindre retard à aborder objectivement la question de l''unité des forces. Toute hésitation tournerait en dérision les espoirs de nos compatriotes. Il faut impérativement jeter les fondations sur lesquelles doit s''élever une union garantissant le respect de l''identité politique et idéologique à chacun et à tous.