Le Mas en exposition

Depuis le début de la saison carnavalesque 2024, une exposition forte des vingt dernières éditions du carnaval guadeloupéen est ouverte au public au Pavillon de la ville à Pointe-à-Pitre. Le thème de l’exposition du Mas c’est «20 lanné woubay». Bernard Pincemail, artiste plasticien de Guadeloupe, curateur momentané de l’exposition, nous en dit un peu plus.

Comment définissez-vous cette exposition ?
Bernard Pincemail : C’est le travail des groupes à peau de Guadeloupe réalisé sur les vingt dernières années que nous avons souhaité porter à la connaissance des nouvelles générations qui aiment le Mas pour certains, qui découvrent pour d’autres, pour raviver les souvenir. Le public visé : les scolaires, les touristes et tous les autres enfants du pays.
Combien de groupes sont-ils ?
C’est le travail d’une quinzaine de groupes, de la Basse-Terre comme de la Grande-Terre. De nos jours, chaque commune de l’archipel a sur son territoire un groupe à peau.
Y-a-t-il un lyannaj entre
les groupes à peau ?
Cela a toujours existé, le lyannaj entre les Mas. Le week-end dernier, le groupe 50-50 a reçu trois groupes. Nous faisons toujours des choses ensemble, car pour nous c’est une musique, un esprit, un amour.
Le carnaval, a-t-il toujours cet aspect de dérision, est-il toujours satirique ?
Oui, il a toujours ce même aspect de dérision même si les groupes vont plus loin comme ceux qui travaillent avec des artistes, ceux qui utilisent les prospectus publicitaires dans le Mas

. C’est une manière pour eux de dénoncer une consommation effrénée dans le pays.
Quel retour avez-vous sur
l’exposition ?
C’est un retour positif, les gens sont agréablement surpris car ils n’imaginaient pas une telle créativité et une telle recherche. Il faut reconnaître que les spectateurs n’ont pas l’occasion d’apprécier les costumes des groupes à peau lors de leur marche cadencée, tandis qu’à l’exposition ils peuvent voir les costumes sous tous les angles.
Les costumes exposés, ne démontrent-ils pas que nul besoin de faire de grosses dépenses pour être déguisé ?
Bien sûr, c’est aussi cela, l’esprit de créativité montre bien qu’on n’a pas besoin d’aller dans les magasins pour pouvoir s’exprimer. Il y a suffisamment de matières de récupération pour créer de belles choses qui reflètent l’idée que l’on veut mettre en avant.
Est-ce que notre carnaval qui est réputé le plus important dans la Caraïbe parvient à capter quelques devises ?
Vous avez mis l’accent sur un sujet brûlant, je pense qu’il y a un travail à faire en ce sens. Nous devons travailler avec les petits métiers du pays, avec des artistes, des couturiers, des sculpteurs. Il faut mener la réflexion sur le développement du carnaval avec d’autres personnes. Je pense qu’il nous faut un grand bâtiment qui nous servira d’atelier pour créer nos costumes du carnaval.
Ne pensez-vous pas qu’il serait nécessaire d’avoir un musée du carnaval en Guadeloupe, ce qui pourrait apporter quelques devises ?
En effet, tout cela fait partie d’un grand projet global. Nous pourrions aussi vendre nos costumes pour les gens de l’extérieur qui en font la demande. Ce sont effectivement des pièces uniques mais il y a une demande de ceux qui font le déplacement uniquement pour voir notre carnaval.
Quel message adressez-vous à la population durant cette période enflammée ?
Je les invite à rester confiant même s’ils entendent des incidents par-ci et par-là. Notre carnaval est magnifique et nous ne pouvons qu’en être fiers parce qu’il y a beaucoup de recherches et de créativité avec des hommes et des femmes engagés. Nous ne devons pas le mettre de côté parce que c’est le nôtre.