Lettre à Monsieur Guy Losbar, président du Congrès des éus de Guadeloupe

Monsieur le président,
La Commission mixte ad hoc, après sept mois d’un silence assourdissant, a convoqué une conférence de presse le lundi 19 janvier pour annoncer la poursuite de ses travaux.
Il est évident que la «sortie du bois» de cette commission installée par le Conseil régional et le Conseil départemental pour préparer, disent-ils, les travaux du Congrès sur la question de l’évolution institutionnelle n’est pas anodine. Elle intervient, coïncidence ou tentative d’extirper les présidents des collectivités colonisées du piège dans lequel ils se sont enfoncés avec «l’Appel de Fort-de-France», après la désignation par le président de la République de deux experts pour cadrer les débats sur l’avenir de la Guadeloupe.
Cette conférence de presse fait suite à une lettre que vous avez adressée aux organisations politiques, les invitant à une rencontre dans le cadre de la Commission ad hoc, afin d’échanger sur leur vision, leur position et leurs suggestions sur les thématiques adoptées au sein de la deuxième résolution du Congrès du 07 juin 2023.
Cette démarche est surprenante et interpelle car vous avez, précisément à l’occasion du 17e Congrès, enregistré les propositions des organisations politiques sur la question institutionnelle, mais aussi leur vision sur un projet guadeloupéen de société.
En fait, vous persistez dans votre choix idéologique et politique à vouloir définir l’avenir de la Guadeloupe dans un cadre captif et élitiste en dehors des organisations politiques et sociales qui représentent aussi le pays réel.
Car, pour avoir largement développé aussi bien au 17e congrès, au colloque à l’Université des Antilles, au forum du Sénat et lors des débats publics du GUSR, l’idée de co-construction du projet guadeloupéen, vous devez comprendre que vous empruntez le chemin du discrédit politique en ramenant l’apport des organisations politiques et sociales à une simple consultation. Est-ce par peur du peuple ?
Les élus du Congrès qui ont une légitimité issue de leur élection dans un cadre précis, n’ont pas de mandat pour définir seuls l’avenir du peuple guadeloupéen.
Les universitaires guadeloupéens auto-proclamés experts, malgré leurs compétences reconnues dans le domaine de leur formation, restent des techniciens qui peuvent et doivent éclairer sur la faisabilité des choix qui sont faits dans le cadre de la co-construction.
Quant aux «experts extérieurs» choisis par vous ou imposés par le président de la République française, ils ne peuvent aucunement intervenir au stade actuel de l’élaboration en co-construction de notre projet guadeloupéen.
Pour toutes ces raisons, nous nous adressons à vous, Monsieur le président du Congrès, pour vous renouveler nos propositions d’une démarche réellement démocratique pour co-construire un projet de statut politique qui sera l’expression du choix éclairé des Guadeloupéens. Il faut donc :
- Ouvrir les 7 ateliers de la Commission ad hoc que vous avez mis en place, aux organisations politiques, économiques, sociales et culturelles pour donner sens à la co-construction que vous prônez.
- Organiser un véritable Congrès du peuple à travers des débats publics directs où des propositions concrètes seront validées
- Présenter au vote du Congrès des Élus le projet issus de la co-construction.
- Engager la discussion avec le pouvoir français sur la base du projet guadeloupéen validé par le Congrès et les assemblées locales.
Monsieur le président, Les communistes guadeloupéens qui depuis quatre-vingt ans, se tiennent, sans trébucher sur le front de la lutte de libération des travailleurs et de la totale émancipation de notre peuple, sont en ordre de marche, prêts à apporter leur contribution et à assumer leur responsabilité pour permettre au pays de franchir une nouvelle étape historique.
Le suffrage universel vous a placé en situation, si vous savez entendre le «bruit de l’herbe qui pousse» de contribuer à ce mouvement qualitatif en marche dans notre société.
Veuillez recevoir, Monsieur le président du Congrès, l’assurance de mes salutations distinguées.
Pointe-à-Pitre, le 5 mars 2024
Le Secrétaire général, Félix Alain Félin