Projet de loi relatif à la régulation économique Outre-Mer Victorin Lurel mettra-t-il fin à la pwofitasyon ?

C'est indiscutable : la vie est chère en Guadeloupe, dans tous les sec- teurs, l'Etat ne s'étant jamais soucié d'intervenir sérieusement, pour ne pas déranger la situation bien établie de tous ceux qui profitent, depuis des décennies, d'une économie à structure coloniale. Cela a été d'ailleurs à la base de la puissante mobilisation sociale de 2009, pour dénoncer la pwofitasyon. Ce mouvement, malheureusement, n'a pas donné les résultats attendus. Après l'avoir dénigré avec détermination, alors qu'il était Président du Conseil Régional, Victorin Lurel, actuellement ministre des Outre- Mers, est sur la voie d'obtenir des parlementaires français une loi de régulation économique Outre- Mer. C'est tant mieux ! Mais, celle-ci sonnera-t-elle le glas de la pwofitasyon ? «Chat mouillé pè dlo fwèt !»… Quoiqu'il en soit, nous conti - nuerons à af firmer que seul un pouvoir politique guadelou - péen créera les conditions d'une société d'équité et de jus - tice sociale dans notre Guadeloupe. Des forces vives, syndicales et poli - tiques notamment, continuent la réflexion. Nous publions la contribution de la Convention pour une Guadeloupe Nouvelle que nous avons reçue. Emmanuel Broussillon

D ans un exposé récent, Jean- Paul Eluther disait que Lurel et les conservateurs socialistes guadeloupéens de l'ordre colonial comme ceux de la droite, font tout pour que la Guadeloupe prenne du retard et gaspille ses maigres ressources en proposant une loi inutile. Avec l'article L 410-2 du code de commerce que nous reprenons, les prix devraient se stabiliser voire diminuer : «Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l'ordonnan- ce n°45-1483 du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Toutefois, dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en rai - son soit de situations de monopole ou de dif ficultés durables d'appro - visionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d'Etat peut régle - menter les prix après consultation de l'Autorité de la concurrence. Les dispositions des deux premiers ali - néas ne font pas obstacle à ce que le gouvernement arrête, par décret en Conseil d'Etat, contre des haus - ses ou des baisses excessives de prix, des mesures temporaires motivées par une situation de crise, des cir - constances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé. Le décret est pris après consultation du Conseil national de la consom- mation. Il précise sa durée de validité qui ne peut excéder six mois». S'il n'y a pas eu de stabilisation de prix, c'est que ce dispositif n'est pas une bonne réponse à l'exigence d'une société équitable et perfor- mante. Ajouter de nouvelles dispositions à celles qui existent déjà ne vont rien changer de fondamental.

Pour les nationalistes et notam- ment LA CONVENTION POUR UNE GUADELOUPE NOUVELLE, les prix élevés et les inégalités dans le domaine de la consommation sont la conséquence d'une économie désarticulée, dominée et spéciali- sée dans la consommation de pro- duits importés. La nouvelle politique que nous préconisons se donne pour objectif la stabilité des prix et l'amélioration du pouvoir d'achat afin de permettre aux ménages de consommer d'une manière satisfaisante ce qui n'est pas le cas actuellement.

L'objectif de stabilité des prix s'ap - plique au niveau général des prix dans l'économie et implique qu'il ne doit pas y avoir de périodes pro - longées d'inflation ou de défla - tion. La stabilité des prix contribue de plusieurs manières à la réalisa - tion d'un niveau élevé d'activité économique et d'emploi.

Le pouvoir d'achat est la quantité de biens et de services que l'on peut acheter avec le revenu disponible. Le pouvoir d'achat est donc la capacité d'achat de biens et services pour un revenu déterminé. Mais, c'est aussi une quantité donnée de monnaie, tirée d'un revenu, donnant la capacité d'acheter une quantité donnée de biens et de services, que l'on a souvent réduit au «panier de la ménagère» afin d'en vérifier le pouvoir d'achat.

Pour réaliser ces deux objectifs, LA CONVENTION propose un texte dont le contenu sera le suivant :

EXPOSÉ DES MOTIFS L'économie de la Guadeloupe est petite, insulaire et les ménages consomment quasi exclusivement des biens et services importés. L'importation des biens et les politiques de concurrence mises en place depuis 1986 ont engendré deux types d'organisation de mar- chés à savoir d'une part, des mono- poles ou oligopoles liés à l'étroitesse du marché (grande distribution, transport aérien, carburant) et d'autre part, des monopoles ou oli- gopoles liés aux réseaux d'acheminement (fret, port, grossistes et importateurs) qui favorisent de profondes inégalités de consom- mation et engendrent un fort taux de chômage. Ces inégalités sont aggravées par une distribution inégale des revenus avec en bas de la hiérarchie tous ceux qui vivent des prestations du système social et au sommet les agents publics qui bénéficient d'une prime de vie chère. Pour remédier à cette situation il faut tendre vers une stabilité des prix et améliorer le pouvoir d'achat des rémunérations.

ARTICLE 1

En Guadeloupe, les prix des biens, produits et services sont déterminés à la fois par les pouvoirs publics et par le jeu de la concurrence. Le gouvernement arrête, par décret la liste des biens, produits et services à réglementer et le prix des produits et services après consulta- tion obligatoire du Conseil régio- nal et du Conseil régional de laconsommation. Il est créé un Conseil régional de la consommation composé de repré- sentants de l'Etat, du Conseil Régional, des associations de consommateurs et des organisations syndicales représentatives dans la région. La durée des fonc- tions des membres est de cinq ans renouvelable.

ARTICLE 2

Le pouvoir d'achat des salaires ne doit en aucun cas diminuer. Les salaires doivent prendre impérativement tous les ans l'évolution de l'indice des prix de l'année.

En Guadeloupe, le SMIC est fixé le premier janvier de l'année en cours par le gouvernement après consul - tation du Conseil Régional et du Conseil guadeloupéen des salaires en prenant en compte le PIB de la Guadeloupe, l'indice INSEE des prix de produits importés et l'indice INSEE des prix des produits fabri - qués localement. Il est créé un Conseil guadelou - péen des salaires composé des représentants de l'Etat, des orga - nismes patronaux et des syndicats de salariés représentatifs en Guadeloupe. Ce conseil détermine tous les ans les évolutions de salai - res qui doivent être appliquées par toutes les entreprises et toutes lesadministrations.

ARTICLE 3

T ous les ans, au cours du pre - mier trimestre de l'année, le gouvernement présente au Conseil Régional un rapport sur l'évolution des prix, des salaires et du pouvoir d'achat. Cette présentation donne lieu à un débat et à un vote.

Enfin ce projet doit être adopté en Guadeloupe par le Conseil Régional selon les dispositions prévues par la Constitution française.