LES FAUSSAIRES

D ans un article publié à la rubrique politique de ce numéro du journal titré «Résister à l'Anticommunisme», Claudy Chipotel réagit à une déclaration d'un journaliste de télévision qualifiant le leader historique Cubain, Fidel Castro, de dicta - teur alors qu'il est toujours adulé par son peuple, plus de quatre ans après avoir laissé le pouvoir. J'ai entendu, moi aussi, cette sortie qui n'était, au fond, que la position du systè - me capitaliste vendue à l'opi- nion par un agent de ce système menant une guerre idéolo - gique, camouflé derrière un micro et des caméras. Ses autres comparses et lui disent la même chose d'Hugo Chavez qui vient d'être réélu avec plus de 54% de voix dans son pays. Mais, par-delà ces agressions anti- communistes permanentes auxquelles il nous faut répliquer sans faiblesse, le comportement de ces journalistes ou des soi-disant «experts» qu'ils invitent régulière- ment nous renvoie à une entreprise de plus grande aliénation que nous devons aussi combattre. Au cours de ces vacances, j'ai lu un livre écrit par Pascal Boniface, un spécialiste des questions de géopolitique, ayant pour titre «Les intellectuels faussaires» et sous-titré : «Le Triomphe médiatique des experts en mensonge». Il mérite le détour pour com- prendre les mécanismes invisi- bles mis en œuvre par les puis- sants pour formater les consciences. Dans ce livre, il fait référence à ce que disait le philosophe Régis Debray en 1979 :Les mass média marchent à la person- nalité, non au collectif ; à la sensation, non à l'intelligence ; à la singularité, non à l'universel. Ces trois caractéristiques inhérentes aux nouveaux sup- ports, qui n'en font essentiellement qu'une, détermineront désormais, et la nature du discours dominant, et le profil de leur porteur. Elles imposent à la fois une stratégie individuelle et une désorganisation col - lective. Plus besoin des codes, ni de problématique, ni d'enceinte conceptuelle». Pascal Boniface enfonce le clou avec Laurent Joffrin ancien directeur du journal libération qui, lui, écrit : «Progressivement l'idée s'est répandue dans le public que le sys - tème médiatique n'est qu'un vaste appareil de manipulation de l'opi- nion mis au service d'intérêts obscurs et malfaisants, une simple région du pouvoir sans autonomie propre ni règle loyale de traitement de l'actualité». La question ne se pose plus aujourd'hui à savoir, si les médias ont pour ambition d'informer l'opi- nion ou s'ils cherchent à l'influencer pour leurs commanditaires : l'Etat ou le Capital. Pour mener à bien cette mission, ils font appel de plus en plus sou- vent à des «experts» censés appor- tés un gage de crédibilité à la parole des journalistes. En fait, ces «experts» sont sollicités pour, précisément, auréolés de leur science, peser sur l'opinion en occultant par omission, complaisance ou mensonges, la vérité. Ils sont, selon l'expression de Boniface, des faussaires. La bataille pour une information propre, respectueuse des citoyens, passe aussi par le déboulonnage des faussaires.