Petit-Canal : Une marche révélatrice des méfaits du colonialisme français

La liquidation de l'industrie sucrière,méthodiquement organisée par le patronat qui sévissait dans ce secteur de notre économie,a été d'une violence extrême,causant des préjudices irréparables à ce pays et son peuple. Humainement,elle a anéanti les espérances de milliers de travailleurs,de familles guadeloupéennes qui ont sombrédans le chômage et la déchéance,quand ce n'était pas,par bateaux ou par avions “charters”\1vol vacan- ces\que les plus jeunes,les plus courageux acceptaient, contraints et forcés,de se laisser embarquer dans ces “charrettes bubidomisées”en partance pour la France.

B onne à tout faire, cette main-d'œuvre providentielle venue des colonies, taillable et corvéable à merci, était la bienvenue. Matériellement, des structures performantes, en parfait état de fonctionnement, pouvant encore servir toute une éternité, ont été laissées à l'abandon, au bon vouloir de la nature et des intempéries. Des silos à sucre, jadis grouillant de vie, aujourd'hui envahis, submergés, croupissent sous le poids d'une luxuriante végétation qui, repris tous ses droits. Chaque jour, la mer indifférente, accomplit son lent et patient travail de fragilisation, de dmolitiondes grues et des installations qui servaient à l'embarquement du sucre, venu de l'usine Beauport toute proche, sur les chalands à destination de Pointe-à-Pitre. Le “moins-disant social” des paysACP(1 impossible à concurrencer, et les perspectives d'ouverture de grands centres commerciaux, ont offert des possibilités inouïes pour la réalisation de super pro- fits au patronat local, aux capitalistes prédateurs.

“LES BILANS TRUQUÉS ET LES SANS-VISAGE” (2
L'admirable combat mené par les communistes guadeloupéens pour le maintien en activité de l'industrie sucrière, n'a pas été couronné de succès. Les “sans-visage” de ce secteur d'activité et leurs “bilans tru - qués” avaient déjà choisi la voie de sa disparition pure et simple.La production locale d'une manière générale et le petit commerce de proximité enparticulier , ont eux aussi été liquidés. Les plans sociaux se sont multipliés, jetant à la rue des milliers de travailleurs. Le sort des gens, l'avenir du pays n'ont jamais intéressé les capita - listes quelle que soit leur natio - nalité. Ils n'ont qu'un mot à la bouche : le profit, encore le pro - fit, toujours le profit. Nous avons ainsi donc été livrés au chômage massif, à la misère, à la non-production, à la violence, et à l'hyper-consommation par cette classe de capitalistes criminels, soutenus contre vents et marées, par une meute de politiciens ignorants, prêts à toutes les trahisons, à toutes les compromissions, à tous les mensonges. La Guadeloupe a ainsi atteint la phase la plus parfaite de sa condition de colonie, à savoir : un marché idéal pour l'hyper - consommation de produits venus de l'extérieur . L'économie de goût, le clinquant ont pris le dessus. Le pays de Guadeloupe a été transformée en une zone pavillonnaire, peu - plée d'assistés, de fonctionnaires, d'af famés, de petits bourgeois irresponsables, imbus d'un senti - ment de supériorité par rapport à nos voisins de la Caraïbe, un pays vivant de transferts sociaux, attendant tout de l'extérieur . Un peuple qui n'a pas encore décidé de se poser les vraies questions sur son avenir et désireux de le prendre en main.

UNE NEUTRALITÉ BIENVEILLANTE
La marche organisée le samedi 27 octobre 2012 par les étudiants du temps libre (AETL Beautiran dans la commune de Petit-Canal a plongé de nomb- reux participants dans la stupeur, en découvrant tous ces cadavres, tous ces gâchis que nous laisse le colonialisme français. Le choc a été rude pour certains. Ils n'en croyaient pas leurs yeux. Mais c'est cela la Guadeloupe, un grand corps malade, tombé à la renverse, en état de somnolence avancée. Dans tous les secteurs, le constat est pratiquement identique. Ce sont les conséquences tangibles de la politique de liquidation du secteur productif du pays, politique combattue sans concession et avec constance par les communistes guadeloupéens. Malheureusement, l'indifférence manifestée par une majorité de nos concitoyens pour la défense des intérêts bien compris de la Guadeloupe, a été en fait, un appui de poids porté à la politique de saccage de l'économie du pays, mise en place par les capitalistes. Ici, toutes les activités, même les plus anodines en apparence, sont toujours porteu- ses d'occasions de découvrir la face hideuse du colonialisme. Il n'est jamais trop tard pour prendre conscience d'une situation pour reconnaître que l'on s'est réfugié consciemment ou pas, pendant trop longtemps dans une indifférence bienveillante, favorable à nos ennemis.

PROTÉGER NOTRE MANGROVE
Satisfaction tout de même ! La mangrove traversée pour se rendre à Beautiran est quasiment vierge de toute pollution. Le degré de pollution constaté, relè - ve de “l'infinitésimalité.” Zone lacustre par excellence, inondée en permanence à cause de la proximité de la mer, la mangrove de Beautiran est bien vivante, et fourmille d'une vie débordante : oiseaux, crabes, têtards, huîtres, poissons, larves de toutes sortes, y trouvent un refuge, de la nourriture, un lieu de protection, une réserve ornithologique. Par ces temps de pollution extrême, de diminution ultra-rapide des surfaces boisées, il est réconfortant de disposer encore d'une aussi belle mangrove. Un trésor inestimable que Canaliens et Guadeloupéens doivent préserver à tout prix. Son maintien en l'état - superficie, degré de pollution insignifiant revêt une importance capitale pour la protection et la sauvegarde de la flore, de la faune et de l'environnement de notre pays.

(1 (2 sans-visage” que furent publiés dans un recueil, la série d'articles consacrés à l'industrie sucrière par le communiste Siméon Pioche. Ces articles furent écrits pour “L'Etincelle” entre 1944 et 1948.