«Souveraineté partagée !»

R adio Caraïbe Internationale dans son émission «le lundi politique» a mis en débat la situation du mouvement nationaliste et indépendantiste en Guadeloupe après les élections départementales de mars dernier. Spéculant sur l'absence d'élus communistes et indépendantistes au Conseil général après l'échec de Kancel et de Hubert, la tentation était grande, comme beaucoup l'ont fait après l'effondrement des pays à régime communiste en Europe en 1991, de décréter la fin de la lutte pour l'autonomie ou l'indépendance de la Guadeloupe. Les représentants de ces courants de pensée politique : le Secrétaire Général du Parti Communiste et laSecrétair e de l'UPLG invités, ne se sont pas laissés intimider par lesraccour cis des jour nalistes qui analysent la situation politique en Guadeloupe avec les grilles de la pensée unique. Ils ont eu raison de rappeler ces points souvent ignorés dans les commentaires des journalistes et des politologues : Les succès électoraux ne traduisent pas toujours des avancées sur le plan politique. Si le Parti Communiste et le mouvement national n'ont pas gagné la bataille pour la conquête du pouvoir , personne ne peut contester les avancées extraordinaires que leurs luttes ont imposées dans le domaine de l'éducation, de l'identité, de la culture, de l'économie et des relations avec leur environnement géographique. Incontestablement, ils n'ont pas réussi à faire passer le peuple guadeloupéen d'un peuple en soi à un peuple pour soi, décidé à prendre en main son destin. Si on doit parler d'échec, il est là. En précisant tout de même qu'il découle de deux facteurs : La contre-attaque violente du pouvoir colonial sur tous les fr onts pour enrayerla montée de lar evendication du changement des rapports politiques entre la France et la Guadeloupe. Les erreurs des communistes et des nationalistes dans la conduite de la lutte pour la décolonisation du pays. Cela veut-il dire que le combat est définitivement perdu ? Le plus extraordinaire de ce débat, c'est la réponse apportée par Pierre-Yves Chicot, consultant de l'émission, à cette question. Il répond non, en s'appuyant sur les éléments en interaction dans la société guadeloupéenne, la façon dont la jeunesse exprime son identité et ses aspirations à s'inscrire dans le mouvement d'intégration du monde. Le plus, ce qu'il ne s'arrête pas à ce constat, il ouvre une piste de réflexion à tous ceux qui sont engagés sur le terrain de la lutte de libération politique en mettant sur la table : le concept de «souveraineté partagée». Car, cette notion renvoie à l'essentiel de la lutte pour la conquête du pouvoir politique : la souveraineté réside dans le peuple. Les anticolonialistes guadeloupéens l'ont oublié, tout en la répétant souvent : «C'est le peuple qui fait l'histoir e. Un peuple ne se fixe à chaque étape de son histoire, que les tâches qu'il est en mesur e d'accomplir». Les fondateurs du Parti Communiste Guadeloupéens à l'image d'Ibéné, de Girard avaient bien intégré ces principes en pr oposant au peupla guadeloupéen en 1958, la revendication d'un statut d'Autonomie, présenté comme uncompr omis historique avec le colonialisme français. C'est-à-dire, le partage de notre souveraineté avec la France, prenant en compte entre autres raisons objectives liées à notre situation particulièr e, que le guadeloupéen se considérait comme profondément français.Cela a-t-il changé aujour d'hui ? Reconstruire le mouvement de décolonisation exige de répondre avec courage et honnêteté à cette question. Pierre-Yves Chicot nous renvoie à la case départ, cela peut fair e mal, mais c'est salutaire !