Quelles perspectives pour la révolution bolivarienne ?

Le 14 avril prochain,conformément à la Constitution vénézuélienne,de nouvelles élections seront or ganisées. Nicolás Maduro,vice-président de Chávez et président par intérim,sera le candidat du Parti socialiste unifié du Venezuela(PSUV). Face à lui,il retrouvera très probablement Henrique Capriles,gouverneur de l'État de Miranda et candidat de la droite aux dernièr es élections d'octobre 2012.

L es millions de Vénézuéliens qui ont défilé dans les rues pour rendre hommage à «leur» président dans les jours qui ont suivi son décès montrent que l'influence du Coman-dante se fera sentir encore après sa mort. Maduro, désigné par Chávez lui-même, gagnera vraisemblablement ces élec - tions et aura la lourde tâche de prendre la direction du pays et de poursuivre la révo - lution bolivarienne. Après 14 ans, la révolution bolivarienne s'est ancrée solidement au sein du peuple vénézuélien. Les 30 000 comités de quartier, de santé, d'usine ou de réfor - me agraire témoignent de l'enracinement du processus. Cette démocratie participative se frotte quelquefois aux intérêts de la «boli-bourgeoisie», cette nouvelle classe aisée qui profite de l'appareil d'État par lequel elle est employée pours'enrichir . La «boli-bourgeoisie» voit cette démocratie à la base d'un mauvais œil,car elle y constate la perte graduelle de son pouvoir ainsi qu'une entrave à ses pratiques de corruption, très courante dans le pays.

DONNER UN POIDS PLUS GRAND AUX TRAVAILLEURS

La création du PSUV comme grand parti de gauche du pays est un projet que Chávez considérait vital pour porter la révolution bolivarienne. Des centaines de milliers de personnes y ont adhéré. Mais le Parti communiste du Venezuela (PCV), tout en reconnaissant l'apport positif du PSUV, n'a jamais voulu y adhérer. Le PCV estime que le PSUV ne s'implique pas suf fi- samment dans la mise en place des prérequis permettant d'atteindre le socialisme. Le PCV déclarait récemment que l'on pouvait difficilement parler de socialisme au Venezuela alors que la «base matérielle de l'économie est restée capitaliste, dépendante de la rente pétrolière et improductive». Pour les com - munistes vénézuéliens, il est fondamental d'accélérer l'industrialisation du pays, qui reste aujourd'hui bien trop dépendant de ses exportations de pétrole brut. Le PCV pense également qu'il est nécessaire de garantir le monopole étatique à deux secteurs économiques straté - giques encore aux mains des capitalistes : le secteur des banques et celui des importations (commerce extérieur). Le PCV souligne aussi l'importan - ce de donner un poids de plus en plus grand aux travailleurs dans la gestion et les prises dedécision.

LE PCV APPUIE LA CANDIDATURE DE MADURO

Au-delà de ces problèmes éco- nomiques cruciaux, deux autres enjeux de taille devront être traités. La violence et la criminalité endémiques dont souf fre le pays (Caracas est encore l'une des villes les plus violen - tes du monde) méritent d'être traitées de manière ferme. Avec la lutte contre la corruption, Chávez en avait d'ailleurs fait sa priorité lors de sa réélection. D'autre part, Nicolás Maduro aura des difficultés à remplacer le leader charismatique, visionnaire et emblématique que fut Chávez. La révolution bolivarienne a trop souvent reposé sur le seul Chávez et n'a pas encore pu développer une direction solide plus collective. Dans ces conditions, c'est un bon signe que, ce diman- che, Nicolás Maduro ait proposé au Parti communiste du Venezuela, à sa Conférence nationale tenue à Caracas, de s'incorporer à la direction de la révolution bolivarienne. Ce même PCV y a annoncé son appui à la candidature de Maduro pour les élections présidentielles du 14 avril, comme il a, dans le passé, toujours appuyé celle de Chávez.

En 1998, le PCV était d'ailleurs le premier parti à se positionner pour Chávez comme prési - dent, a fait remarquer encore Maduro. Les couches populaires organisées, conscientes de l'enjeu historique que repré- sente la mise en œuvre de l'après Chávez, ne permettront pas que les acquis de la révo- lution bolivarienne soient galvaudés et espèrent que leur probable- nouveau président sera à la hauteur de sa tâche. «Nous sommes tous Chávez», scandaient des centaines de milliers de gens au lendemain de l'annonce du décès du pré- sident. Un véritable pied-de-nez à l'oligarchie qui veut (faire) croi- re que le processus bolivarien s'effondrera avec la mort de son leader. Le peuple, lui, ne l'en- tend pas de cette oreille.