LE FAUX-DÉBAT !

D ans le numéro précédent nous avons qualifié le congrès de «cour de men- songes». Certains ont pu trouver cette appréciation excessive. On droit aujourd'hui, se rendre à l'évidence, nous n'avions pas tapé trop fort. Le débat était vraiment tronqué. En vérité, le vrai débat n'a pas eu lieu. La contradiction essentielle a étémasquée. Car en fait, qu'est-ce qui oppose la majorité des élus droite et gauche confondue, à l'exception de ceux de la gauche alternative ? Pour ceux qui arrivent à décrypter ce débat, ce n'est certainement pas des questions de fond, car, le fond n'a pas été vraiment abordé. Ce n'est pas le projet guadeloupéen de société. Ils ont voté à deux mains une résolution pour continuer à l'approfondir. Cela ne les engage en rien parce qu'ils l'ont déjà enterré. Contrairement à ce que l'on peut penser, si on se contente des mots, ce n'est pas l'acte III de la décentra - lisation. Parce qu'une résolution portant amendement d'un texte qui ne prévoit rien pour ce qu'ils appellent encore les outre-mer français a été adoptée à l'unanimité, en tout cas à une large majorité. Ce n'est pas non plus la question institutionnelle, parce que les élus, là encore, dans leur grande majorité sont d'accord pour rester dans le régime d'assimilation législative avec l'article 73 de la Constitution. C'est simplement la question de l'architecture qui oppose les organisations et élus de ce qu'ils avaient baptisé à tort, le socle de gauche pour masquer une banale alliance électorale. Le GUSR et le PPDG se disent pour une collectivité unique, le PS jusqu'au congrès de 2011 était pour une assemblée unique. Aujourd'hui, les socialistes étant au gouvernement de la France, ils s'alignent sur l'acte III. Alors, qu'est-ce qui a fracturé le socle de gauche ? Sur quoi repose cette opposition frontale GUSR-PS ? De notre point de vue et en lisant à tra - vers les lignes des discours qui ont été prononcés au congrès, il nous semble que l'antagonisme porte sur une ques- tion de perturbation de calendriers et de stratégies de pouvoir, entraînée par la rupture du pacte de confiance entre Gillot et Lurel. A l'origine de cette affaire, et nous l'avions analysée en son temps, se trouve le projet guadeloupéen de société. Victorin Lurel n'a jamais été pour, parce qu'il l'a perçu comme une tentative de Gillot de contourner sa résistance à toute évolution institutionnelle. La preu- ve, il a tenté de le vider de tout contenu en produisant et en publiant son propre projet en décembre 2011 : une société de projet. L'appareil de Gillot était arrivé à bloquer cette initiative. Mais Lurel, en noyautant le comité guadeloupéen de projet, est arrivé quand même à ses fins. Le document remis par le comité de pilotage a pratiquement évacué la question statutaire, apportant ainsi de l'eau à son moulin. Voyant sa démarche de projet guadeloupéen partir en vrille, Gillot a pris la décision de dynamiter le système, en lançant sans crier garde son idée d'une consultation référendaire. Lurel, retenu hors de la Guadeloupe par ses charges de ministre, a encaissé ce coup comme une agression, une atteinte à son pouvoir. Une consultation maintenant, dans sa position de ministre, le place en dehors du débat. Son intervention au 13e congrès avait clairement annoncé qu'il n'allait pas laisser faire. Au 14e congrès, il n'a pas parlé, mais, il a armé sa garde préto - rienne et le canon a sonné. La tentative de Gillot de désamorcer la bombe, en annonçant qu'il ne va plus briguer aucun mandat en 2014 et 2015 n'a pas enrayé la machine de destruc - tion. Lurel a tranché en imposant un rapport de force. Mais, vous n'avez rien entendu de tout cela. Les Guadeloupéens ont été baladés toute une journée par un débat virtuel et convenu. Ils continueront à penser que les deux camps s'opposent sur le changement de statut et sur l'acte III de la décentralisation. Tard dans la soirée, ils ont adopté très majoritairement une résolution disant qu'ils attendent de trouver le consensus pour revenir à la question institutionnelle. Mon œil !