«Le changement, c'est pour maintenant» : Promesse électoraliste de François Hollande ?

N ous sommes à quelques jours du 5 mai, date anniversaire de l'élection de François Hollande à la présidence de la République française. La grande question qui agite toute la France est celle-là : François Hollande a-t-il déli- bérément «arnaqué» les élec- teurs avec ce puissant leitmo- tiv : «le changement, c'est pour maintenant ?».

Car, des changements de fond qu'il a annoncés dans son programme présidentiel, on ne voit guère grand chose aujourd'hui, en dehors de la loi qui a été votée «le mariage pour tous» qui a pro - fondément divisé la France. Mieux, il donne l'impression d'avoir tourné casaque, de faire le contraire de ce qu'il avait promis. La République exemplaire, dont il se voulait le chantre est sérieu - sement com prise par l'affaire de fraude fiscale de l'ancien ministre du budget, le dénom - mé Cahuzac et par les soup - çons de prévarication qui tou - chent son ancien mandataire pour les élections présidentielles. Avant de prendre le large, le bateau donne des signes de naufrage, en tout cas, tout indique qu'il y a un sérieux problème de gouvernail. Cela se traduit déjà par une descente aux enfers du Président dans les sondages où il émarge à 24% d'opinion favorable, une première dans la VeRépublique, un an après des élections. Mais, ce qui frappe le plus et qui dérange, ce sont les revirements opérés sur certains points de sonprogramme. Par exemple, ses relations avec les finances et la politique européenne. On se souvient de cette déclaration fracassante faite par le candidat Hollande lors de son meeting du Bourget :

«Mon véri- table adversaire, il n'a pas de nom, pas de visage. Il ne sera pas élu, et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c'est le monde de la finance, qui a pris le contrôle de nos vies».

Ces mots ont soulevé l'en - thousiasme du peuple de gau- che, de toutes les victimes de ce système financier . Depuis, le candidat devenu Président a oublié ses promesses de campagne. Il avait promis de séparer les banques de détail des banques d'investissement, il s'est plié devant les injonctions des PDG des grandes banques. Il avait promis d'interdire les pratiques spéculatives les plus dangereuses, il a fait marche arrière devant les marchés financiers. Il s'était engagé à inverser les mécanismes d'austérité mis en place par l'Union Européenne pour impul - ser un redressement économique basé sur la recherche de la croissance. Il s'est mis à la remorque de la chancelière allemande, et c'est l'austérité qui est aujourd'hui au cœur de sa politique. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'a pas tenu parole. Il en est ainsi de la question des langues régionales : «Je ferai rati - fier la Charte européenne des langues régionales et minoritaires» a-t-il dit ? Un projet de loi constitutionnel était prévu, afin de permettre la ratification de la charte, le Président vient d'y renoncer au prétexte d'un avis négatif émis par le Conseil d'Etat, qui n'a été communiqué à personne. Cette décision a provoqué un gros mal- aise dans les rangs de la majorité. Jean-Jacques Urvoas, Président PS de la commission des lois a fait part de son irritation. Même l'opposition UMP y va de son couplet : «Sur la question des langues régionales, le Président Hollande cherche manifestement un pré- texte pour ne rien faire» a décla- ré le député Marc le Fur. On a observé la même reculade sur la question de l'acte III de la décentralisation, détricoté, ren - voyé à plus tard et sur l'affaire de la nationalisation de la sidérurgie qui a vu le ministre du développement productif, Montebourg, se faire lâché publiquement. Mais, le dernier en date, le plus brutal et le plus inquiétant, c'est le revirement du gouvernement sur le vote du projet de loi d'amnistie socia - le proposé par les communis - tes et déjà voté au Sénat.T andis que la gauche fustige un tel comportement : «C'est une rupture avec le monde du travail et le peuple de gauche» a déclaré Eliane Assasi, Présidente du groupe communiste au Sénat, la droite se réjouit de ce «coup de poignard» dénoncé par le Parti de gauche, voyant en cette prise de position du Président de la République «Une victoire nette pour le pays». Ce rejet vient après le choix fait par le gouvernement, sur injonction de l'Elysée, de recourir à l'ar - ticle 4 4-3 pour obtenir un vote bloqué sur le projet de loi retranscrivant l'Accord National Interprofessionnel (ANI) sur la flexibilité de l'emploi, refusé par la CGT et FO et com - battu par les communistes. Les communistes voient là unc hangement de cap politique du gouvernement qui fait le choix de céder aux désirs de la droite et du patronat plutôt que d'écouter le malaise et la souffrance des salariés. Les gens ont de plus en plus le sentiment que ce gouvernement n'est pas celui pour lequel ils ont voté il y a à peine un an.