Faire du Coronavirus une opportunité pour construire une autre Guadeloupe

Chers compatriotes,

En s’adressant à la Guadeloupe, nous n’entendons pas sacrifier à un impératif de communication, mais porter à la réflexion de cha- cun notre analyse et nos proposi- tions afin d’éclairer le chemin que nous devons emprunter pour répondre aux questions qui sont posées devant le pays.

LA CATASTROPHE SANITAIRE MONDIALE EST LA CONSE- QUENCE DU DOGME NEO LIBE- RAL ET DE LA MONDIALISATION CAPITALISTE

L’épidémie de coronavirus ne relève ni d’un complot, ni d’une malédiction, ni d’une punition divine. C’est une crise sanitaire majeure liée à la propagation sur toute la planète d’un virus, le coro- navirus vecteur du Covid-19.

Il faut bien comprendre que si ce virus peut être mortel, la catas- trophe sanitaire qu’il génère ne relève pas cependant de la fatalité mais découle des politiques publiques du système capitaliste mondialisé.

Bien plus que la virulence du coro- navirus, c’est la défaillance et la faiblesse du système de santé et des structures hospitalières qui sont la cause des dizaines de mil- liers de morts dénombrés à ce jour à travers le monde.

Cette faillite des systèmes sanitaires est la conséquence directe des poli- tiques néo-libérales, dictées par les institutions du capitalisme financier international et de la gouvernance mondiale (Fonds monétaire inter- national (FMI), Banque mondiale, G7, G20, Organisation mondiale du commerce, OTAN, accords de libre- échange) qui, au nom de la rigueur budgétaire, ont imposé aux peuples des politiques d’austérité et de casse des services publics de santé, au mépris des besoins humains.

Le lourd bilan en pertes humaines, à ce jour, en France : - C’est le résultat des politiques libé- rales de réduction des dépenses et de rentabilité de la santé, mises en oeuvre depuis près de 30 ans par tous les gouvernements, sans exception, droite et socialiste, et qui ont conduit au désastre actuel avec notamment la fermeture des hôpi- taux, de lits, la diminution des effec- tifs, la pénurie de matériels et d’équipements.

- C’est la conséquence d’une ges- tion chaotique et politicienne de cette crise sanitaire par un gouver- nement de mensonges qui a fait passer ses intérêts électoraux et politiciens avant ceux de la santé des citoyens. En effet, alors que depuis le mois de janvier il savait l’extrême gravité de la menace, ce gouvernement n’a pris aucune mesure de prévention : pas de masques, ni de tests de dépistage ; aucune mesure, de protection pour les travailleurs du secteur sanitaire, de moyens d’intervention pour le personnel soignant, d’équipements en matériels pour l’hôpital public.

- C’est la conséquence du mépris de classe et de la surdité du chef de l’Etat, de son gouvernement et de sa majorité parlementaire vis-à-vis des agents de l’hôpital public, notamment ceux des urgences, en grève depuis plus d’un an pour obtenir les effectifs, les moyens matériels, les équipements, et les salaires, leur permettant d’assurer leur mission de soins et qui sont aujourd’hui encensés par ceux-là mêmes qui hier les traitaient avec mépris et arrogance.

- C’est, avant tout, la consé- quence du parti pris idéologique du Président de la république, de sa majorité parlementaire, et de ses soutiens et appuis politiques, qui considèrent que la maladie est un marché, le soin un produit, le malade un client, la santé un busi- ness et l’hôpital, une source de rentabilité et de profit.

La pandémie de coronavirus n’est pas une catastrophe naturelle, c’est le produit de la mondialisa- tion capitaliste, qui est une menace pour la sécurité et la sur- vie de l’humanité en soumettant les hommes à la dictature du pro- fit capitaliste, au mépris des droits humains fondamentaux.

Il convient de dénoncer, ici, la démagogie et la duplicité de tous les chantres et apôtres du libéra- lisme économique, qui font mine de découvrir aujourd’hui que le capitalisme, est un système crimi- nel qui n’obéit qu’à la loi de l’ar- gent et du profit à tout prix au détriment de l’humain.

Cette crise sanitaire mondiale mon- tre l’impératif d’un changement radical des rapports politiques et économiques entre les peuples, les nations et les Etats.

Elle commande une organisation du monde fondée sur l’application effective des principes de respect des droits politiques, économiques, sociaux et culturels de tous les peu- ples, de coopération, d’amitié et de solidarité, de partage des res- sources, des connaissances et progrès scientifiques et technolo- giques, de préservation et de ges- tion des ressources et du patri- moine commun de l’humanité, au seul bénéfice des besoins et du bien-être humain.

L’avènement de cette société monde, fondée sur ces principes et ces valeurs, n’est pas une vue de l’es- prit, mais une nécessité qui suppose d’engager et de gagner la guerre contre le capitalisme mondialisé, ses soldats et ses serviteurs.

Plus que jamais la construction du ▲c ommunisme est une exigence pour l’humanité. La Guadeloupe qui subit la double peine du capi- talisme et de la domination colo- niale n’y échappe pas.

LA VULNÉRABILITÉ DE LA GUADELOUPE

La gestion de l’épidémie a mis à nu la défaillance, les carences et les mensonges de l"État, la mise à l’écart des élus guadeloupéens, la marginalisation du Guadeloupéen, le mépris, l’arrogance et la condes- cendance des représentants de l’Etat, étrangers à nos réalités, à nos valeurs et à notre identité, qui sont des atteintes insupportables à la dignité guadeloupéenne.

La crise sanitaire a montré la vulné- rabilité, la dépendance et les failles de la Guadeloupe. Cette situation n’a rien d’inédite. Elle découle de notre relation de soumission poli- tique et de dépendance écono- mique à la France. Elle est globale et structurelle. Elle s’illustre par notre extrême dépendance pour répon- dre à nos besoins.

Il n’est plus possible en effet, de nier l’échec du modèle et des politiques assimilationnistes sur le plan écono- mique et social, en matière de poli- tiques publiques, sanitaire, environ- nementale, d’éducation et de for- mation, de transports, de gestion de l’eau, de gestion des déchets, d’aménagement du territoire, de sécurité civile.

La vulnérabilité de la Guadeloupe est inhérente au système d’écono- mie de consommation, qui garantit aux entreprises de l’import-distri- bution, les débouchés et la rente coloniale qui leur procurent leurs profits et empêchent l’émergence de la production guadeloupéenne comme base pour asseoir le déve- loppement de notre pays.

FAIRE DE LA CRISE ENGENDRÉE PAR LE CORONAVIRUS, UNE OPPORTUNITÉ POUR CONSTRUIRE LE PAYS

Cette crise sanitaire, en mettant en évidence des vérités qui dérangent, nous fait l’obligation d’un change- ment en profondeur du système politique, du modèle économique et social, et du fonctionnement de notre société.

Il est irresponsable de vouloir «un retour à la normale», autrement dit, de poursuivre dans le système et le modèle qui nuisent aux intérêts de la majorité des Guadeloupéens, qui génère le chômage massif, la préca- risation des travailleurs, la pauvreté e t la précarité pour près de 40% de la population, l’exil de la jeunesse, la marginalisation des producteurs, artisans, petits entrepreneurs gua- deloupéens, la dépossession des Guadeloupéens de leurs terres, de leur patrimoine, de leur pays.

La crise sanitaire, avec ses inci- dences économiques, sociales et sociétales, nous offre l’opportu- nité d’une remise à plat et d’un changement global du fonction- nement de notre société. Elle nous impose de rechercher et de trou- ver une alternative au cadre de l’assimilation politique qui orga- nise et structure la dépendance et la vulnérabilité de la Guadeloupe.

La crise du coronavirus est une opportunité pour mettre en place une nouvelle politique économique, orientée sur la production et la réduction de notre dépendance vis- à-vis de l’extérieur par l’exploitation des importantes ressources du pays, au bénéfice de l’intérêt commun de tous les Guadeloupéens.

C’est une opportunité pour repen- ser l’entreprise, sa fonction et sa finalité, son mode de fonctionne- ment et sa gestion, le rôle et la place des travailleurs créateurs de sa richesse, la répartition de la plus- value créée par le travail.

Cette crise sanitaire montre la nécessité d’un pouvoir politique guadeloupéen, disposant des préro- gatives légales pour administrer le pays, en décidant de son organisa- tion politique, économique, sociale, culturelle, sportive, de ses rapports de coopération internationale.

Elle nous commande de dépasser le cadre politique de l’assimilation coloniale pour nous inscrire dans des rapports nouveaux avec la France, avec l’Union Européenne, avec le monde, avec notre environ- nement proche et penser nous- mêmes notre pays.

La véritable réponse n’est ni la Collectivité unique, ni dans le droit à la différenciation qui ne sont qu’un remodelage, un nouvel habillage de l’assimilation, sans rupture avec la domination et la dépendance coloniales.

Or, c’est précisément de cette relation de dépendance et de sou- mission dont il faut s’affranchir. C’est le défi que la Guadeloupe doit relever. C’est un devoir que nous avons à remplir vis-à-vis des générations qui viennent.

UNE RÉPONSE GUADELOU- PÉENNE QUI RASSEMBLE UNE M AJORITÉ DE GUADELOU- PÉENS SUR UN PROJET POLI- TIQUE, ÉCONOMIQUE ET SOCIAL PORTEUR DE PROGRÈS, DE JUSTICE, DE DÉMOCRATIE ET D’ÉMANCIPATION

Cette exigence ne peut être l’affaire d’un camp politique seul, encore moins d’un parti politique. Elle ne peut être que la réponse d’une Guadeloupe rassemblée.

L’heure n’est pas à la recherche de leadership, mais à l’avènement d’un accord politique, sur le contenu d’un projet politique guadeloupéen de rupture avec l’assimilation, pour de nouvelles relations avec la France respectant les droits politiques, économiques, sociaux et culturels du peuple guadeloupéen.

Pour se faire, il conviendrait, dans un premier temps, que se réunis- sent les organisations politiques anticolonialistes, progressistes et démocratiques de la Guadeloupe, en vue de rechercher et d’aboutir dans la plus grande transparence à un accord politique permettant d’avancer sur la question cardinale d’un pouvoir politique guadelou- péen, pour apporter une réponse globale aux problèmes qui condi- tionnent l’avenir de notre pays.

Cette démarche doit, impérative- ment par la suite, s’élargir aux forces sociales, culturelles, économiques, associatives qui font la Guadeloupe et dont la mobilisation est indispen- sable pour faire entendre et res- pecter la volonté guadelou- péenne dans le cadre de discus- sions et de négociations avec le gouvernement de la France. Il y a urgence à dépasser les opposi- tions stériles qui font le jeu de l’Etat et hypothèquent l’existence d’un pays Guadeloupe, propriété commune des Guadeloupéens.

Nous appelons à une réponse gua- deloupéenne qui rassemble sur un contenu politique, économique et social minimum, une majorité de Guadeloupéens.

La preuve n’est plus à faire que la Guadeloupe ne pourra défendre ses intérêts propres sans la mise en pla- ce d’un cadre politique qui donne au peuple guadeloupéen la capacité politique de mettre en oeuvre les politiques publiques qu’il juge nécessaire aux intérêts de son pays.

La question de l’autonomie poli- tique, comme condition du dévelop- pement de la Guadeloupe défendue depuis 1958 par le Parti Com- muniste Guadeloupéen est plus que jamais une exigence de notre temps.