Olivier Serva : «Je suis prêt à mener les combats pour notre territoire»

Nouvellement réélu député de la 1ère circonscription de Guadeloupe. Quelques jours après avoir rencontré le Président Macron à Paris lors d’un dîner de travail, il exprime sa détermination à défendre ses idéaux et à répondre présent pour tous les Guadeloupéens. (Interview réalisée avant la rencontre avec le président).

Vous allez être reçu par le président Macron d’ici quelques heures. Qu’attendez-vous de ces échanges ? Olivier Serva : Je ne suis pas un doux rêveur, je sais pertinemment qu’il n’y aura pas de solutions immédiates aux problématiques que vous allons soulever avec mes camarades députés ultramarins mais je pense que c’est une première pierre à l’édifice que nous disposons ce jour. J’aurais le temps de pouvoir exprimer les attentes des Guadeloupéens et c’est un temps que je vais valoriser. Nous savons tous que le président Macron doit redorer son blason, notamment aux Antilles, où son image a été largement écornée lors de l’instauration du pass vaccinal. C’est d’ailleurs l’une des premières choses que j’évoquerai avec lui. C’est un combat que je mène depuis le départ et je n’entends pas baisser pavillon. Nous espérons que cette rencontre ne sera pas un coup d’épée dans l’eau et qu’il prendra à bras le corps les différents éléments mis sur la table. Y’a-t-il une part de vous quelque peu revanchard vis-à-vis du président ainsi que de la LaREM ? En 2017, j’ai été élu député sous les couleurs de la LaREM (La Républi-que en marche, devenue En marche). Ce fut un parti aux valeurs que j’affectionnais et que je défenmaidais. Mais, j’ai été très déçu de voir le gouvernement faire le choix de la force en imposant le pass vaccinal dans tous les territoires français. Or, il y a des disparités d’histoire et de culture qu’il fallait prendre en compte à ce moment précis et les Antilles, ainsi que moi-même, avons été surpris de ce choix unilatéral. Dès lors, j’ai fait le choix de m’éloigner de ce parti et, aujourd’hui, je suis très heureux au sein du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires. Nous sommes très fiers d’avoir constitué ce groupe de 16 députés, deux membres devraient également nous rejoindre, et nous espérons pouvoir porter, haut et fort, la parole des territoires insulaires. Pour la première fois depuis vingt ans, la majorité n’est pas absolue et la démocratie parlementaire reprend ainsi ses droits. Le Président doit composer avec toutes les oppositions, dont la nôtre, et nous apprécions cette indépendance. Elle va nous donner la capacité de défendre nos intérêts et de faire avancer certains dossiers de manière constructive, cohérente et commune afin de travailler assidûment sur le retard de développement de nos territoires. Quels sont vos futurs points de travail ? Comme je l’ai dit lors de ma campagne, priorité reste la réintégration du personnel soignant non vacciné en Guadeloupe. Nous connaissons des déserts médicaux sur l’archipel et ce n’est pas normal que nos soignants ne peuvent exercer leurs fonctions. Dès le mois d’octobre, ce dossier brûlant sera présenté au Parlement et nous allons nous démener. Il faudra également prévoir le maintien de l’état d’avancement et de grade qu’ils possédaient avant leur suspension. Par la suite, je me pencherais sur la question du pouvoir d’achat, en m’attaquant aux frais postaux. L’an passé, la douane gérait la tarification de ceux-ci. Aujourd’hui, c’est la Banque Postale qui a pris la main et c’est complètement hallucinant. Je souhaite contraindre les transporteurs à appliquer la double franchise (Octroi de mer et TVA) prévue par les textes. Nous avons rendez-vous, courant septembre, avec la direction de la Banque Postale. Puis, j’ai à coeur de revaloriser les retraites des fonctionnaires. Ils disposent d’une sur-rémunération due à la vie chère. Or, ils ne cotisent pas pour celle-ci et, à leurs retraites, les pensions ne sont donc pas indexées. Je souhaite qu’il soit instauré un mécanisme de sur-cotisation de retraite de maniè-re à les mettre en cohérence avec le coût élevé de la vie dans les Outre-mer. C’est le début de nos ré-flexions. Il y a de nombreuses luttes mais nous sommes élus pour cela. Votre optimiste offre de nouvelles perspectives. Comment voyez-vous évoluer la Guadeloupe de manière plus générale ? Il y a une asphyxie étouffante sur notre territoire. Elle est explicable par la dureté de la crise sanitaire et par cette crise du pouvoir d’achat. Je suis conscient des injustices que les Guadeloupéens vivent et je ressens cette frustration. Le niveau de violence en Guadeloupe est trois fois plus élevé qu’à Marseille, la ville la plus dangereuse de France. Ce chiffre me fait froid dans le dos et je ne reconnais pas notre archipel. La souffrance se traduit par de la violence et ce n’est pas une bonne chose. Nous attendons des répon-ses du gouvernement et c’est notre rôle à nous, élus, de mouiller le maillot pour nos concitoyens. Je suis animé par la passion de la politique et je souhaite, comme tous, que la France cesse d’ignorer ses territoires éloignés. Je pense que cela devra passer par un meilleur déploiement des politiques pu-bliques. Je préconise de faire un meilleur usage de la CTAP (Confé-rence Territoriale de l’Action Publique) en ayant recours davantage à la délégation de compétence pour plus de cohérence dans l’action publique. A l’avenir, il sera essentiel que nous revoyions notre organisation statutaire et institutionnelle en profondeur.