«Comment aimer son enfant pour le faire réussir ?»

C’est une question qui peut paraître incongrue, qui peut prêter à sourire ou peut-être le contraire. D’aucun pourrait dire qu’il n’y a pas de méthodologie pour apprendre à aimer sa progéniture. Mais, il n’en est rien de tout cela. Faisons table rase des préjugés.

Pour une meilleure compréhension du thème qui peut porter à confusion, Nouvel-les-Etincelles a interrogé M. Ray-mond Otto sociologue et anthropologue, lequel a présenté ce thème, le samedi 21 janvier 2023, au lycée générale et technologique de Baimbridge.
De prime à bord, la réponse à la question paraît facile, mais qu’en est-il exactement ?
Raymond Otto : En fait, c’est une question simple dans sa formulation, mais c’est une question philosophique. On s’est rendu compte de ce que les gens ont pu penser au départ, et comment on a cheminé, que les notions de calme, de coercition sont venues sans jamais être nommées. En fait, aujourd’hui plus que hier, nos enfants ont besoin qu’on les accompagne, même si nous sommes dans une société où on fait primer l’amusement, la légèreté.
On s’est bien rendu compte qu’il y a une stratégie qu’il faut mette en place, qu’il s’agit purement de méthodologie, pour que nos enfants soient autonomes dans leur choix de carrière, mais surtout qu’ils aillent au fond, à fond et au bout, parce que s’ils comptent sur leur environnement, c’est raté

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C’est-à-dire, qu’en ce moment, c’est la période des choix d’orientation mais en même temps, c’est six semaines de carnaval. Il ne faut pas opposer les choix. C’est à nous de savoir ce qui est bon pour notre enfant et ne pas perdre de vue qu’il y a une société d’amusements, et qu’elle le sera toujours.
C’est une question qui peut paraître incongrue, qui peut
prêter à sourire ou peut-être
le contraire. D’aucun pourrait dire qu’il n’y a pas de méthodologie pour apprendre à aimer
sa progéniture. Mais, il n’en est rien de tout cela. Faisons
table rase des préjugés.
Mes grands-parents disaient la même chose, mes parents disaient la même chose : «Tini on biten ki pâ jen mô sé amizman !». Donc, cela veut dire, pour nous aussi, nouvelle génération, même si nous avons beaucoup lu sur le bien-être, sur la bienveillance, tout ce qu’on veut, ce ne sont que des lectures.
Lorsque ce sont des temps d’orientation, que nous soyons aux côtés de nos enfants ! Singulièrement, depuis 2017, on a vu les enfants de seconde d’aujourd’hui avec un niveau de Cm2. Cela veut dire que le faible niveau d’aujourd’hui, c’est la conséquence de toutes les situations que nous avons connues de l’ouragan Irma à l’ouragan Fiona.
En fait, l’école à la maison c’était une bonne chose, mais dans une société où tout le monde joue le jeu, c’est-à-dire qu’effectivement il y a une couverture, internet, qu’il y ait une organisation sociale de qualité mais aussi qu’il y ait une organisation de vie de qualité.
Il y avait toujours cette opposition, cette défiance entre les parents et l’Institution. Lorsque les parents ont eu justement à faire face à leurs enfants, ils se sont rendus compte qu’ils n’étaient pas si glorieux que cela.
C’est cela, le thème de mon propos. Si on veut que nos enfants réussissent, déjà il faut qu’on les aime, c’est-à-dire, on les met en face de leur vraie réalité et de leur vraie potentialité. Non pas qu’on soit encore sur la représentation de nos projets qu’on a pour eux, ce temps-là est révolu.
La deuxième chose, c’est qu’il faut qu’on soit bienveillant avec l’institution même, si on sait qu’une partie de l’institution joue son rôle géopolitique. En même temps, nous aussi, avons à travailler sur des alternatives pour nos enfants.
C’est vrai qu’on nous a habitués à nous donner l’information toute cuite, mais il va falloir qu’on repren-ne l’habitude comme avant, qu’on reprenne notre bâton de pèlerin et qu’on aille chercher l’information, et ce faisant, avec nos enfants, pour qu’ils soient ancrés sur leur projet.
Souvent, on dit que l’institution ne propose pas suffisamment de place mais on oublie toujours que les places sont conditionnées au niveau scolaire et que si l’enfant ne travaille pas à la maison, ou s’il travaille à la maison et que c’est à l’école, pour X raisons, il n’arrive pas à réaliser, il faut qu’on change de méthodologie.
Donc, il faut qu’on puisse compter sur les outils qui existent aujour-d’hui et qui n’existaient pas hier. Il faut le dire, aujourd’hui le lycée n’est plus un bunker. Il y a des professionnels qui sont arrivés sur les 50 ou 60 dernières années. Il nous faut quitter notre zone de confort en pensant que l’école, c’est l’affaire de l’institution et pas l’affaire des parents.
Il nous faut revenir au premier chef et arrêter de déléguer nos compétences à d’autres structures. On a vu ce que cela a donné au travers des associations de parents d’élèves.
Non ! Il faut que les parents reprennent leur bâton de pèlerin et qu’ils s’occupent de leurs gamins parce qu’en fait, l’enfant est avant tout le projet des parents et pas le projet de la société. Il faut qu’on soit clair avec cela.
C’est vrai qu’on a trop de parents qui lâchent la question éducative et la question de formation pour les institutions. Ils pensent qu’ils n’ont pas leur rôle à jouer.
Non ! On a des blessures, oui, parce qu’à un moment donné dans nos vies, on a subi des choses mais, il faut qu’on arrête d’être des relents de regrets et qu’on soit plus dans les opportunités.
On dit qu’il y a une impossibilité de vivre en Guadeloupe et pourtant, chaque année, deux à trois mille personnes viennent habiter chez nous. Est-ce que c’est nous qui som-mes schizophrènes, qui ne voyons pas le bon côté du territoire ?
Il n’en demeure pas moins qu’on devrait s’investir pour savoir comment on fait pour que les choses s’améliorent. Peut-être que cela passera par des choix politiques autres. Il faudra qu’on arrête d’être dans la bienveillance avec des personnes qui n’ont ni les compétences, ni la vision pour le territoire et que nous aussi, nous revenions militants comme avant, pour les enfants, parce que pendant des années on s’est recentré sur nos enfants de manière égoïste et on a le bilan aujourd’hui. Cela ne sert à rien. Donc, la collectivité appartient à tout le monde.